Gaspare Spontini

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Compositeur italien (Maiolati, Ancona, 1774 – id. 1851).

Voué à l'état ecclésiastique, il s'en détourna grâce à sa passion pour l'orgue, étudia à Naples dès 1793 et fut encouragé par Cimarosa et Piccinni. En 1796, il donnait à Rome I Puntigli delle Donne, mais, peu fait pour le genre bouffe, réussissait davantage avec son opera seria Il Teseo riconosciuto (1798). Après avoir écrit une quinzaine d'ouvrages légers, il vint s'établir à Paris, où sa Finta filosofa, jugée naguère trop sévère à Naples, conquit le public français en 1804. Il donna alors des opéras-comiques où il adoptait la manière des Grétry, Cherubini et Méhul, puis une cantate d'un ton nouveau (L'Eccelsa Gara, 1806), qui lui valut d'être nommé directeur de la musique de l'impératrice. C'est à elle qu'il dut de triompher des attaques de Grétry et de Lesueur et qu'il put faire jouer à l'Opéra sa Vestale en 1807. Plus audacieuse encore, sa partition de Fernand Cortez (1809) ne s'imposa véritablement que dans son remaniement de 1817, année où il opta pour la nationalité française. En 1810, il avait pris la direction du Théâtre-Italien, où il donna pour la première fois Don Giovanni en version originale et, après y avoir fait créer Olympie (1819), il quitta Paris, pour s'établir à Berlin où ses idées réformatrices obtinrent un accueil favorable ; il y donna notamment un chef-d'œuvre grandiose, Agnes von Hohenstauffen (1829, remanié 1837), eut avec la presse des démêlés qui conduisirent Ludwig Rellstab en prison et dut, en 1842, laisser son poste à Meyerbeer. Ayant été fait membre de l'Institut en 1831, il regagna Maiolati et s'intéressa à la réforme de la musique religieuse.

Représentant typique du cosmopolitisme musical de l'ère napoléonienne, considéré à tort par la postérité comme le témoin d'un « style empire » assez glacé, il sut, mieux que Cherubini, adapter sa veine mélodique italienne à la grandeur de la tragédie lyrique française et au nationalisme de l'opéra romantique allemand naissant, dont il fut le véritable initiateur. Ses audaces d'écriture, son chromatisme, inattendu à l'aube du xixe siècle, son orchestration innovatrice eurent, durant tout le siècle, une forte influence sur Berlioz, sur Verdi et sur Wagner qui le portait en grande estime. En 1845, Spontini déclarait précisément à ce dernier « qu'aucune partition n'avait été écrite, depuis sa Vestale, qui n'ait pillé ses innovations ». Jugement excessif, sans doute, mais plus fondé qu'il n'y parut alors.