Small Faces

Groupe britannique de rock formé en 1965 à Londres par Steve Marriott, mort en 1991, (guitare, chant), Ronnie Lane, mort à Trinidad, Colorado, en 1997, (basse), Jimmy Winston puis Ian McLagan (claviers) et Kenny Jones (batterie).

Le jour de juin 1965 où Steve Marriott vit débarquer dans la boutique d'instruments de musique où il travaillait Ronnie Lane et Kenny Jones, il sut qu'ils étaient faits pour s'entendre. Ils partageaient la même passion pour le rhythm and blues et un sens commun de l'élégance. Mais, surtout, ils étaient aussi petits de taille que lui. Riches de leurs expériences respectives — Marriott avait déjà publié quelques singles sans succès, Lane et Jones jouaient en trio avec un certain Jimmy Winston —, ils s'allièrent sous le nom de Small Faces, le terme « face » signifiant dans le jargon des mods un type qui « en jette un maximum ».

Icônes mods. Un premier single est aussitôt enregistré, Watcha Gonna Do About It, grossière décalque bouillonnante d'énergie du Everybody Needs Somebody To Love de Solomon Burke. Le titre fait mouche. Mais le suivant, écrit par Marriott et Lane, est un échec. Tandis que le groupe congédie Winston, jugé trop grand, et recrute un organiste aux dimensions conformes, McLagan, le management des Small Faces remédie au faux départ de leurs poulains en faisant appel aux talents de faiseur de tubes de Mort Shuman. Sha La La La Lee, avec son refrain entêtant crié par le puissant timbre de soulman en colère de Marriott et sa prise de son décapante, remplit à la perfection sa mission. En mars 1966, les Small Faces sont devenus les icônes du mouvement mod de l'est de Londres (East End), au même titre que leurs copains des Who régnaient à l'ouest (West End). En septembre, le savoureux mais franchement brut All Or Nothing déboute le Yellow Submarine des Beatles de la tête des charts. Début 1967, frustrés d'être confinés au marché adolescent, les Small Faces signent chez Immediate, le label aventureux lancé par Andrew Loog Oldham, manager des Rolling Stones. Les Small Faces, en quête de reconnaissance artistique, entament leur période psychédélique. Les singles se font plus complexes (Here Come The Nice, Itchycoo Park) sans sacrifier pour autant à l'urgence pop. Lorsque l'expérimental Otgen's Nut Gone Flake, avec sa célèbre pochette circulaire, occupe six semaines de suite le sommet du classement des ventes d'album, durant l'été 1968, les Small Faces semblent avoir atteint leur but. Mais il n'en est rien. Marriott est persuadé, à juste titre, que la forme inhabituelle de la pochette, stratégie marketing de la maison de disques, est l'unique raison de son succès. Prenant ses distances avec le reste du groupe, il rêve de plus en plus d'une véritable crédibilité rock. Fin 1968, il rencontre Peter Frampton, alors chanteur mignon des populaires Herd, avec lequel il forme quelques mois plus tard le peu subtil groupe de heavy blues Humble Pie.

Deuxième vie. Humble Pie connaît un succès retentissant au début des années 1970. Mais les Small Faces abandonnés s'en sortent encore mieux : enrichis de Ron Wood et Rod Stewart, ils deviennent, sous le nom raccourci des Faces, l'un des plus populaires et savoureux groupes de rock dans le sillage des Stones. En 1976, alors que la carrière de Marriott est sur le déclin et que les Faces viennent, une fois de plus, d'être lâchés par leur figure de proue (Rod Stewart, superstar, triomphe en solo), les anciens mods se rabibochent. Mais la réunion laisse indifférent le public. Deux albums décevants plus tard, les Small Faces se séparent définitivement, fin 1978.

Kenny Jones remplacera naturellement Keith Moon au sein des Who, McLagen, entre deux projets en solo, jouera alternativement avec les Stones et Rod Stewart. Le destin des deux autres est beaucoup moins heureux. Ronnie Lane, atteint de sclérose en plaques, meurt, à 51 ans, le 4 juin 1997, à Trinidad (Colorado). Quant à Marriott, après avoir passé les années 1980 à jouer dans le quasi-anonymat des pubs londoniens, il meurt dans l'incendie de son manoir, le 20 avril 1991.