image en relief ou image en 3D

Voies de la vision
Voies de la vision

Technologie restituant l’illusion d'un jeu de saillies et de retraits dans l'espace, en photographie, cinéma, etc.

1. Principe de la perception du relief

En optique, le relief est défini comme l'impression visuelle du relief. Il dépend de divers facteurs physiologiques et psychologiques, mais sa cause principale est la vision binoculaire. Dès l’Antiquité, Euclide écrit, pour expliquer le relief : « Voir le relief, c'est recevoir au moyen de chaque œil l'impression simultanée de deux images dissemblables du même sujet. »

Notre perception du relief, de la profondeur, provient en partie de la vision binoculaire, notre œil gauche percevant une image légèrement différente de notre œil droit, duquel il est séparé de 6,5 cm en moyenne. Les informations sont transmises sous forme de message nerveux au cerveau, qui reconstruit l’image en volume dans le lobe occipital.

Les images stéréoscopiques simulent cette vision binoculaire en présentant à nos yeux deux images distinctes, enregistrées par deux objectifs distants de 6,5 cm. Pour ne pas voir double mais bien en relief, il est nécessaire que l’œil droit et l’œil gauche reçoivent chacun uniquement l’image qui lui est destinée.

Il n’est donc pas aisé de reproduire le relief à partir d’une seule image, comme sur une photographie ou un film. Diverses idées ont été testées, tentant de reproduire la combinaison des deux angles de la vision couverte par nos deux yeux.

En beaux-arts, l'impression de profondeur sur un support en deux dimensions peut être produite par la perspective.

2. La stéréoscopie en photographie

La stéréoscopie se définit comme l’ensemble des techniques permettant une vision en relief à partir d’une combinaison de deux images situées sur un même plan. L’œil droit perçoit une image différente de l’œil gauche, et ces deux images réunies reproduisent la sensation d’un environnement tridimensionnel. Les premières techniques satisfaisantes du relief en stéréoscopie ont reposé sur le système des anaglyphes.

2.1. Les anaglyphes

Venant du grec anaglyphos, qui signifie « ciselé en relief », l'anaglyphe est un couple stéréoscopique dont l'une des images est tirée en rouge, l'autre en bleu-vert. Si l'on observe l'image rouge à travers un filtre bleu-vert et l'image bleu-vert à travers un filtre rouge, le sujet apparaît en relief et les couleurs s’estompent.

Le physicien britannique Charles Wheatstone est le premier à mettre au point des images stéréoscopiques à l’aide d’un stéréoscope équipé de miroirs, et initie les débuts de la 3D par anaglyphe en 1838. L’inventeur David Brewster perfectionne son principe en plaçant plutôt des prismes sur le stéréoscope en 1844, pour une plus grande précision du relief. En 1891, le Français Louis Ducos du Hauron, l’un des créateurs de la photographie couleur, baptise le système « anaglyphe ».

2.2. Les réseaux lignés et lenticulaires

Cinq ans plus tard, en 1896, l’ingénieur suisse Auguste Berthier inaugure un nouveau principe : le réseau ligné. Pour cette méthode, les deux images sont toujours prises de points de vue différents, mais sont superposées. Chacune d'elles est découpée en petites bandes parallèles (une dizaine par millimètre), et les bandes de rang pair de l'une des vues alternent avec les bandes de rang impair de l'autre. L'observateur examine ce complexe à travers un réseau ligné, placé en avant et qui porte le même nombre de bandes, alternativement transparentes et opaques. Dans une position optimale, l'un des yeux n'aperçoit que les bandes d'images de rang pair, et l'autre, que les bandes de rang impair ; la sensation du relief est ainsi obtenue. Ce principe repose sur la parallaxe, autrement dit l’angle formé par les droites qui joignent un point déterminé de l’espace à chacun des deux yeux.

L’inventeur américain Frederic Eugene Ives conçoit en 1903 le stéréogramme à parallaxe. Cette visionneuse reprend le principe du réseau ligné, mais est la première à fonctionner sans verres. En 1908, Gabriel Lippmann obtient le prix Nobel de physique pour son concept novateur de la photographie intégrale pour le relief à vision directe. C’est durant cette même année qu’Eugène Estanave met au point la plaque autostéréoscopique : plus besoin de lunettes, le relief est visible avec les yeux directement.

En 1934, Maurice Bonnet améliore considérablement la qualité de l’image et du relief par la méthode du réseau lenticulaire ; cette technique sera développée plus tard, sous la forme de la barrière de parallaxe, encore utilisée dans les images flip (changeantes selon l’angle d'orientation, elles peuvent aussi donner l’illusion du mouvement), ou sur les écrans numériques qui jouent sur les colonnes de pixels.

2.3. Les hologrammes

Le principe de l'hologramme a été posé en 1947 par Dennis Gabor : il repose sur un phénomène de diffraction de la lumière au contact d'un objet à trois dimensions, et qui, illuminé sous un certain angle par un faisceau de lumière, restitue une image en relief de l'objet photographié. Il a fallu attendre la découverte du laser pour passer aux réalisations pratiques (1963).

3. Le cinéma en relief : de la stéréoscopie à la lumière polarisée

On tente de filmer en relief dès la naissance du cinéma. En 1890, le photographe britannique William Friese-Greene met au point la toute première caméra stéréoscopique, qui sera vite délaissée car la qualité de l’image ne suit pas. En France, l’ingénieur Auguste Rateau propose en 1897 une paire de lunettes électriques dans lesquelles des obturateurs tournent en synchronisation avec l’obturateur de l’appareil de projection, permettant ainsi au spectateur de voir sur l’écran alternativement chaque image avec un œil puis l’autre. Ces recherches se concrétiseront en 1936, avec l’appareil « Maury-Houssin ».

Dans les années 1920, le cinéma s’approprie la stéréoscopie en utilisant le système des anaglyphes, qui consiste à séparer les images droite et gauche par un artifice de couleurs. En 1935, Louis Lumière améliore ce système et réalise un remake en relief de L’arrivée d'un train en gare de La Ciotat.

En 1945-1946, le Français François Savoye présente dans un parc d’attractions son « cyclostéréoscope », permettant de visionner des films en relief sans lunettes. Un écran gigantesque dissimule une machinerie qui projete des images stéréoscopiques à travers une grille tournant autour de l’écran, et sélectionnant les images à visualiser par les yeux du spectateur. Le dispositif sera installé au Clichy-Palace en 1953.

Le relief au cinéma connaît un premier âge d’or dans les années 1950, notamment auprès des amateurs de sensations fortes, avec des films comme L’Homme au masque de cire (1953) ou L’Étrange Créature du lac noir (1954). Un nouveau procédé relance la production des films en relief : la lumière polarisée. Les images sont projetées à travers deux filtres polarisés, les ondes lumineuses du côté gauche étant orientées perpendiculairement à celles de droite. Les spectateurs portent également des lunettes polarisantes, mais sans filtres colorés cette fois. Plus confortable, ce procédé sera employé pour une soixantaine de films, dont Le crime était presque parfait (1954) d’Alfred Hitchcock. Mais l’expansion du relief est freinée à l’époque par des problèmes d’équipement de salle : l’écran doit être entièrement métallisé et la projection nécessite de synchroniser deux projecteurs.

3.1. La stéréovision des années 1980 et l’IMAX

Le relief refait surface dans les années 1980 avec le perfectionnement du procédé de la stéréovision, qui repose sur la superposition de deux images par le biais d’une focale anamorphique. L’horreur est encore à l’honneur avec des films comme Vendredi 13 : meurtres en trois dimensions (1982) ou Les Dents de la mer 3 (1983). Le résultat, toutefois, ne convainc pas totalement le public.

En 1986, le format de pellicule IMAX permet des projections sur des écrans gigantesques entourant les spectateurs, et sa déclinaison en 3D, l’IMAX 3D, qui s’accompagne de nouvelles technologies de visionnage, fournit des images sensationnelles. Mais seuls de grands parcs d’attractions peuvent financer de telles salles.

3.2. Le procédé RealD des années 2000

Le développement des technologies numériques conduit à la création, en 2003, d’un nouveau format, le RealD Cinema, qui utilise toujours le principe de polarisation, mais ne requiert qu'un projecteur pour la diffusion des films stéréoscopiques. Par conséquent, les salles se sont rapidement équipées et, dix ans après, elles sont plus de 5 800 d’entre elles à proposer ce système dans le monde. Au programme, on trouve essentiellement des films d’animation pour un public jeune (comme Volt, star malgré lui, 2008 ou Là-haut, 2009) ou de l’épouvante pour adolescents en quête de sensations fortes (Destination finale 4, 2009 ou Piranha 3D, 2010).

La révolution s’amorce en 2005, quand James Cameron entame la production d’Avatar. Cette création, sortie en 2009, va nécessiter une recherche technologique qui aura un impact déterminant sur la qualité des films en 3D.

4. La révolution du relief au cinéma avec Avatar

Pour renforcer les qualités immersives du film Avatar, la dernière technologie 3D numérique, RealD, a été sollicitée.

Sur Avatar, la qualité de l’image en relief est améliorée par l’emploi d’une nouvelle génération de caméras, la 3D Relief Fusion. Les anciennes caméras 3D utilisaient deux objectifs séparés de 6,5 cm (l’écartement des yeux) pour former une image double, stéréoscopique. Les deux objectifs étant parallèles, la netteté se faisait spontanément sur les objets lointains et, pour passer à un objet proche, le spectateur devait loucher pour opérer la mise au point. Tous désagréments que Cameron évite en recourant à un système d'« autofocus relief » : il y a toujours deux objectifs, mais leur convergence se règle automatiquement selon la profondeur de champ − les objectifs, en quelque sorte, louchent pour le public. Par ailleurs, sur Avatar, les techniques d’animation, des images de synthèse par « motion capture » (« performance capture » qui reproduit les expressions des acteurs → image de synthèse) s’ajoutent au réalisme de la 3D.

Depuis les années 2010, de nombreux films à grand spectacle utilisent ce système bien plus confortable et réaliste que les anciennes lunettes vert-rouge d’autrefois. Ces lunettes ressemblent à des lunettes de soleil, sont recyclables et s’adaptent à toutes les têtes.

Les films proposés en 3D trouvent progressivement une certaine reconnaissance dans le milieu cinématographique. Pour preuve les Oscars des meilleurs effets visuels décernés à Avatar (2010), Hugo Cabret (2012), L'Odyssée de Pi (2013) et Gravity (2014).

La recherche de la perfection visuelle et réaliste est plus poussée encore. Les trois volets du Hobbit (2012, 2013 et 2014) ont été tournés avec des caméras permettant des prises de vues à 48 images par seconde (le double du nombre classique). Cette technique, le « High Frame Rate » augmente la fluidité de l'image, donc l’illusion de réalité. En plus du Hobbit, Prometheus (2012) et Pacific Rim (2013) sont passés à ce type de caméras. De même, il est prévu que les deux suites d’Avatar soient tournées en 60 images/seconde.

Le marché est si porteur que la majorité des films sortant en 3D ont été tournés en 2D, puis convertis avant leur sortie, quand leur potentiel spectaculaire est avéré. C’est, par exemple, le cas de The Avengers (2012), World War Z (2013) et Noé (2014). Dans la même logique, de vieux succès cinématographiques passent en 3D pour ressortir au cinéma (entre autres, rien qu'en 2012, Le Roi Lion, Star Wars : la Menace fantôme et Titanic) ; mais le public est mitigé, et ces sorties peu plébiscitées.

Les cinémas proposent la diffusion (en direct ou non) de spectacles en 3D, en particulier des ballets et opéras. Le public est au rendez-vous, car elle permet d’accéder à des événements d’exception là où ils ne sont pas programmés. De plus, les places sont, certes plus coûteuses que pour un film ordinaire, mais toujours moins chères que pour une véritable place de spectacle.

Le futur s’annonce prometteur pour le marché de la 3D : en 2015, 15 % de films seront préparés à une sortie en 3D.

5. La 3D à domicile

5.1. Les petits écrans en relief

Les premiers modèles de télévision 3D sont arrivés sur le marché en 2009, mais la véritable démocratisation des prix s’est effectuée en 2010. Les premiers modèles fonctionnent toujours sur le principe de la polarisation des images, un petit adaptateur commandant des lunettes spéciales qui s’obturent très rapidement à gauche, puis à droite, pour créer l’impression de relief. Certains constructeurs travaillent sur des télévisions en relief sans lunettes. Jusqu’à aujourd’hui, les chaînes de télévision n’ont pas rencontré leur public, comme c’est le cas pour Canal 3D). Sur Internet, YouTube a lancé en 2011 la conversion et la possibilité de visionner certaines vidéos en 3D.

5.2. Les jeux vidéo

Sur console, Nintendo avait essayé de créer, en 1995, une console sous forme de casque de vision 3D, la Virtual Boy. Malheureusement, c’est un échec commercial retentissant, et les effets secondaires (maux de tête) montrent que le produit n’est pas au point. Le succès arrive en 2011, avec la Nintendo 3DS. Grâce au système de l’autostéréoscopie à barrière de parallaxe (voir plus haut Les réseaux lignés et lenticulaires), la 3D est désormais possible. Les deux yeux perçoivent deux images divisées en colonne de pixels, que le cerveau recompose en une seule image en relief. Néanmoins, le joueur doit rester bien en face de l’écran, autrement l’effet sera biaisé.

En 2012, l’Américain Palmer Luckey crée l’Oculus Rift. Ces grosses lunettes placent un écran plat face aux yeux, qui affiche une image par stéréoscopie déformée pour augmenter le champ visuel et la définition. L'écran est placé de telle manière que l'image virtuelle ainsi générée se trouve projetée sur 110 degrés. Des capteurs détectent les mouvements de tête du joueur, ce qui permet d'adapter le jeu sur l'écran, et donne l’impression d’être dans le décor perçu. Les premiers tests sont prometteurs et les fabricants de consoles envisagent très sérieusement d’adapter leurs jeux à ce système. Dépassant la simple expérience de réalité virtuelle, ce principe de lunettes est envisagé et testé pour des visites virtuelles d’appartements et de maisons.

6. Le futur en 4D ?

Jusqu’ici réservée aux parcs d’attractions tels que le Futuroscope, l’idée de salles équipées de projecteurs en 3D associés à des sièges vibrants et des effets de jets d’eau, de diffusion de parfums et de ventilateurs se répand. En 2010 déjà, certaines salles américaines équipées pour une séance en quatre dimensions avaient tenté l’expérience avec Tron et The Green Hornet.