charriage

Déplacement de masses de terrains pouvant atteindre une centaine de kilomètres et plus et constituant une nappe de charriage.

La notion de nappe de charriage (ou de chevauchement ou de recouvrement) a été proposée par M. Bertrand qui, suivant des galeries de mines, observa que des terrains étaient recouverts par des terrains plus anciens.

En tectonique alpine, on appelle nappe de charriage un ensemble de terrains qui a été déplacé (allochtone) de son lieu de formation, et est venu recouvrir un autre ensemble de terrains (autochtone) dont il était très éloigné à l'origine.

Épais de centaines ou de milliers de mètres, il s'agit de terrains aussi bien sédimentaires qu'éruptifs ou métamorphiques. Même lorsque autochtone et allochtone sont de même nature (par exemple sédimentaire), les ensembles de terrains impliqués ont, à âge égal, des caractères très différents, car ils ne se sont pas formés dans des zones équivalentes de la chaîne. Les parties les plus avancées forment le front de la nappe, l'amplitude du recouvrement est la flèche ; elle peut être hectokilométrique (nappe des schistes lustrés, dans les Alpes).

L'érosion peut mettre à découvert le soubassement (autochtone) de la nappe (fenêtre) ou isoler la nappe en petits lambeaux (klippes). À la semelle de la nappe de charriage des copeaux d'autochtone arrachés (lambeaux de poussée) sont parfois entraînés. On distingue les nappes de couverture (nappe affectant seulement une couverture, qui a été décollée de son socle au-dessus d'une couche « savon » plastique), les nappes de socle (impliquant un socle ancien avec ou sans sa couverture), les nappes penniques (du nom des Alpes pennines), formées de grands plis couchés où socle et couverture sont impliqués et en général affectés d'un métamorphisme synschisteux.

Ces nappes peuvent être totalement désolidarisées de leur domaine d'origine (racines de la nappe) et s'être écoulées sur plusieurs dizaines de kilomètres. Les nappes possèdent rarement un flanc renversé ; le plus souvent, se trouve à leur base un plan de cisaillement plus ou moins horizontal, le plan de chevauchement. Le corps principal de la nappe est appelée carapace, et les plis externes sont dits front de la nappe. Les terrains les plus jeunes de l'autochtone représentent le synclinal de raccord entre la nappe et son soubassement. C'est dans la chaîne alpine que les structures en nappes sont le mieux développées, du moins le mieux connues. Il arrive que plusieurs nappes se superposent.

Les nappes de charriage résultent de la collision de plaques lithosphériques portant des masses de croûte continentale, et de l'écrasement de leurs marges, à l'échelle de temps géologique. Poussées par les forces tangentielles de la collision ou par glissement gravitaire, elles peuvent s'avancer soit à l'air libre, soit en milieu sous-aquatique au sein même d'un bassin sédimentaire en formation, y déversant des lambeaux appelés olistostromes.

  • 1884 Le Français M. Bertrand met en évidence la notion de charriage (déplacement de nappes de terrains), fondant ainsi la tectonique moderne.