Puritains

On désigne sous le nom de puritains les membres de diverses sectes (d'inspiration calviniste) qui se formèrent parmi les protestants les plus rigides de l'Angleterre et de l'Écosse, sous les règnes d'Élisabeth Ire et des deux premiers Stuarts.

Cromwell et les Têtes rondes

Le puritanisme anglais naquit après qu'Élisabeth Ire eut confirmé, par l'Acte de suprématie de 1559 et par le bill des Trente-Neuf Articles de 1563, les rites et la liturgie établis par Édouard VI. Les protestants les plus sévères les jugeaient insuffisamment dégagés du « papisme », mais leur opposition la plus forte portait contre la haute Église anglicane (High Church), qui maintenait une hiérarchie ecclésiastique et subordonnait l'Église à l'État (raison pour laquelle ils furent également appelés non-conformistes).

Presbytériens, ils acceptaient seulement la présence de pasteurs dans les paroisses et la réunion de synodes – ou assemblées – chargés de débattre des questions religieuses. Indépendants, ils rejetaient toutes les formes de clergé, qu'il s'agisse des évêques, comme dans l'anglicanisme, ou des pasteurs, comme dans le presbytérianisme : prétendant suivre la parole de Dieu dans toute sa pureté, ils entendaient la débarrasser de toute superstition et de toute intervention humaine. Élisabeth réagit vigoureusement en faisant interdire la réunion des congrégations locales, tandis que l'Église anglicane procédait à une véritable épuration dans ses rangs et définissait sa doctrine avec plus de rigueur et de précision. À la fin du règne, la prison et l'exil avaient eu raison de beaucoup de puritains et le mouvement paraissait désorganisé.

Il devait reparaître, sous Jacques Ier et Charles Ier Stuart, avec d'autant plus de force qu'aux motivations religieuses s'ajoutaient des mobiles politiques. Appartenant essentiellement à la petite noblesse rurale, la gentry, et à la bourgeoisie urbaine, les puritains étaient bien représentés à la Chambre des communes : très attachés aux droits du Parlement, ils s'opposaient à toute extension de la prérogative royale, et, dans une large mesure maîtres de l'économie, ils supportaient mal les tentatives royales de mainmise sur celle-ci. Leur opposition au pouvoir royal s'est traduit par un rejet total de toute distraction (art, théâtre, etc.) en réaction à la frivolité des Stuarts.

Beaucoup d'entre eux choisirent d'émigrer en Amérique, mais, lorsque Charles Ier eut interdit l'émigration, en 1637, la situation des puritains devint rapidement intenable. Aussi appuyèrent-ils le Parlement dans sa révolte contre le roi à partir de 1642, et formèrent-ils l'armée des Têtes rondes – ainsi surnommés en raison de leurs cheveux coupés ras –, qui devait porter Cromwell au pouvoir. L'austère dictature de ce dernier fut le temps fort du puritanisme, qui s'atténua considérablement lorsque l'Angleterre eut retrouvé la paix civile et religieuse à la fin du xviie s.

La nouvelle Sion

Les 102 passagers du Mayflower (Fleur de mai) furent à l'origine du puritanisme américain. Ils appartenaient à un groupe de puritains du hameau de Scrooby, dans le comté de Nottingham, qui, plutôt que de supporter la hiérarchie ecclésiastique, s'étaient d'abord installés à Leyde, en Hollande, dès 1608, et y avaient été rejoints par d'autres dissidents. Mais, peu soucieux de voir leurs enfants perdre leur langue et leur identité en devenant hollandais, ils décidèrent, en 1620, de partir pour l'Amérique, pour y fonder une nouvelle Sion, où pourraient s'exprimer librement leurs aspirations religieuses.

En juillet 1620, les « Pères pèlerins » (Pilgrim Fathers, ainsi se nommaient-ils) quittèrent Delft, en Hollande, à bord du Speedwell, pour Southampton, où les attendait le Mayflower. À peine les deux navires avaient-ils quitté le port qu'ils durent y revenir, le Speedwell prenant l'eau d'inquiétante manière. Le Mayflower repartit seul, le 16 septembre 1620, et toucha terre près du cap Cod, le 21 novembre ; les Pèlerins fondèrent Plymouth. En fait, cette première fondation n'eut qu'un piètre succès, plus de la moitié des Pèlerins étant morts le premier hiver. Du moins prit-elle valeur de symbole pour les puritains, qui immigrèrent beaucoup plus nombreux en Amérique à partir de 1630 : ils créèrent, sur les côtes du Massachusetts, une colonie prospère, grâce aux capitaux dont ils disposaient, et organisée suivant les principes congrégationalistes : pratique religieuse et profit n'y paraissaient pas inconciliables ; quant aux rapports entre les individus et l'État, ils étaient fondés sur des critères démocratiques. Quelques-uns des traits de la société américaine contemporaine se trouvaient ainsi esquissés. Peu tolérants, toutefois, les puritains du Massachusetts se laissèrent aller à des gestes extrêmes, telle la chasse aux sorcières qui, en 1692, fit trembler les habitants de la petite ville de Salem et s'étendit ensuite à l'ensemble de la colonie.