la zone archéologique de Paquimé

Site archéologique du Mexique, au pied de la chaîne occidentale de la Sierra Madre, à proximité des sources du fleuve Casas Grandes, dans le nord-ouest de l'Etat de Chihuahua.

Inscrit par l'Unesco sur la liste du patrimoine mondial, le site de Paquimé constitue le principal site archéologique de la culture dite de Casas Grandes, qui se développa entre 700 et 1450. Paquimé, qui atteignit son apogée aux xive et xve siècles, joua un rôle essentiel dans les relations commerciales entre la culture Pueblo du sud-ouest des États-Unis et du nord du Mexique et les civilisations plus avancées Mexique central et méridional. Les nombreux vestiges, dont une grande partie reste encore à mettre au jour, attestent de la vigueur d'une culture brutalement anéantie par la conquête espagnole.

Cet établissement préhispanique fut construit en adobe, c'est-à-dire en brique crue, séchée au soleil. Ce matériau étant particulièrement fragile, le site est exposé à une dégradation permanente et il nécessite de constantes mesures de conservation.

Au cours du Ier millénaire après J.-C., la culture Pueblo du sud-ouest des États-Unis, à tradition essentiellement agricole, s'était lentement propagée vers le sud. Dès le viiie siècle, fut bâti sur le site de Casas Grandes un village d'habitations à demi enfouies, constructions caractéristiques de la culture de Mogollón, qui se développa alors dans l'ouest du Nouveau-Mexique et dans l'est de l'Arizona. Après une lente évolution jusqu'au milieu du xiie siècle, cette culture connut un essor spectaculaire, accompagné d'un véritable bouleversement culturel. En effet, les habitations enfouies furent remplacées par des constructions plus élaborées, édifiées en adobe sur des plans relativement complexes, mettant en communication par des portes en « T » des espaces intérieurs réduits, tantôt cruciformes, tantôt en « Z », et fréquemment disposés sur deux ou trois étages. L'influence de civilisations plus avancées de la Méso-Amérique se fait sentir, notamment à travers des caractéristiques comme des tertres recouverts de plates-formes, des jeux de pelote, un système complexe de distribution de l'eau et des bâtiments consacrés au stockage de volatiles exotiques tels qu'aras et dindons ainsi que de produits tels qu'agaves ou objets en coquillages et en cuivre.

Les archéologues s'interrogent encore sur les raisons d'une telle mutation. Fut-elle consécutive à une invasion des peuples du Sud, ou bien correspondit-elle à la mise en œuvre de nouveaux moyens destinés à permettre une expansion commerciale ? Toujours est-il que Paquimé se transforma en une place marchande de première importance, autour de laquelle vinrent se greffer de nombreux hameaux. Durant cette période de prospérité, commencée au xive siècle et interrompue par l'arrivée des Espagnols, au milieu du siècle suivant, la population atteignit, selon les estimations, le chiffre d'environ 10 000 habitants. Paquimé constituait alors l'une des agglomérations proto-urbaines les plus importantes d'Amérique du Nord.

En 1519, Cortés débarqua sur la côte du golfe du Mexique et marcha sur Tenochtitlán, qui capitula deux ans plus tard. La conquête et l'« évangélisation » du Mexique imposèrent dans tout le pays une structure sociale et économique calquée sur le modèle européen qui mit rapidement un terme à la prospérité de Paquimé. C'est ainsi que les premiers explorateurs de la région ne purent rapporter que l'existence de quelques communautés agricoles cantonnées dans le nord-ouest de Chihuahua. Le coup de grâce fut porté au xviie siècle, lorsque la colonisation espagnole se fit plus intensive, entraînant l'exode des derniers habitants de la région.

Le site archéologique de Paquimé s'étend sur 36 ha, dont un cinquième environ a été dégagé à l'heure actuelle. Selon des estimations, le secteur comporterait les vestiges d'au moins 2 000 pièces. Celles-ci se répartissent en salles à manger, ateliers et magasins dotés de patios. Le matériau le plus largement employé est l'argile crue, mais on trouve également de la pierre, utilisée notamment pour tapisser des fosses, selon une technique très probablement importée du centre du Mexique. La maison des Fours est caractéristique de ce type de construction. Ce bâtiment, qui fait partie d'un grand ensemble composé de neuf pièces et de deux petites places, comporte une pièce et quatre fosses tapissées de pierres. Non loin se trouve un tertre de roches cuites. On pense que les fosses auraient servi à la cuisson d'agaves sur des pierres brûlantes, par la suite entassées au rebut à proximité.

La maison du Serpent comportait initialement deux places, trois couloirs et vingt-quatre pièces sur un seul niveau, ainsi que quatre pièces disposées sur deux étages ; elle fut par la suite agrandie. Elle était adaptée, semble-t-il dès l'origine, à l'élevage d'aras et de dindes. Une organisation analogue se retrouve dans la maison des Aras, ainsi nommée en raison des quelque 122 squelettes de perroquets retrouvés dans son sous-sol.

Non loin de la maison des Fours s'élève ce que l'on appelle le tertre de la Croix. Il s'agit en fait de cinq tertres peu élevés, habillés de pierre et remplis de terre. Le tertre central a la forme d'une croix irrégulière. Ses bras correspondent plus ou moins aux quatre points cardinaux, raison pour laquelle on pense qu'il jouait un rôle lors des célébrations des équinoxes et des solstices.

Le rôle du tertre dit des Offrandes reste plus obscur. Cette structure à plusieurs niveaux est constituée de gravats tassés, d'une enceinte en argile crue et d'une rampe menant à une citerne. La partie centrale abrite sept pièces qui renferment des pierres d'autel, des statues et des sépultures.

Le tertre de l'Oiseau est ainsi appelé en raison de sa silhouette évoquant un oiseau sans tête. Les sondages n'ont révélé aucune structure à l'intérieur.

L'agglomération de Paquimé bénéficiait d'un système sophistiqué de contrôle, de distribution et de conservation des réserves d'eau. Plusieurs réservoirs étaient reliés par des canaux qui amenaient l'eau à chaque groupe de pièces. À l'entrée de chaque réservoir, l'eau était décantée dans des bassins de sédimentation. La maison des Puits doit son nom à la grande citerne située dans l'une de ses cours et alimentée par le réseau de canaux commun.

Deux terrains de jeux de balle de forme allongée, tels qu'on en trouve beaucoup en Méso-Amérique, ont été mis au jour. L'un d'eux est parvenu jusqu'à nous pratiquement intact. Sur trois côtés, il présente des structures elles aussi caractéristiques des civilisations du centre du Mexique à la fin de la période classique et au début de la période postclassique.