De la reforme du Vatican aux rapports avec les autres religions, des intégristes aux contrôles de la natalité, des complots aux voyages du pontife, l’Église romaine est partagée entre tradition et modernisation.
Journal de l'année Édition 1967
Les catholiques Les décisions du concile entrent dans les faits. Le bilan est imposant : organismes créés au Vatican, textes publiés, travaux d'approfondissement entrepris. 1966 demeure, cependant, une année d'attente. Deux questions de nature très différente, mais d'une importance fondamentale pour l'Église et le monde, n'ont pas encore reçu de solution. Le gouvernement de l'Église est appelé à subir, dans de brefs délais, une transformation profonde. Paul VI lui-même l'a dit à maintes reprises. Plusieurs nominations à des postes clefs de la Curie et la création de 27 nouveaux cardinaux représentent cette année le premier pas de la réforme attendue. La seconde question, l'attitude de l'Église dans le domaine du contrôle des naissances et de la contraception, reste encore sans réponse. La divulgation du rapport confidentiel des experts du Vatican est le seul élément nouveau de ce dossier dont le pape poursuit l'étude. Année d'attente encore, car le premier sommet postconciliaire, le synode épiscopal, se réunit en septembre 1967. « L'année de la foi », instituée par Paul VI, débute le 29 juin. Une année d'attente, mais non pas une année creuse. En regard des problèmes, nombreux, qui demeurent en suspens, un certain nombre de réalisations retiennent l'attention : les textes sur l'Église et les prêtres, les organismes nouvellement créés, dont l'un assure le contact entre l'Église et les laïcs, l'autre entre l'Église et le tiers monde, l'encyclique sur le développement des peuples.
Journal de l'année Édition 1968
Les catholiques En plein mois d'août, alors que Rome, vide, dort au fond de sa torpeur, Paul VI lance coup sur coup deux documents complémentaires qui constituent ce qu'on peut appeler la « loi-cadre » de la réforme de la curie. Il s'agit du motu proprio Pro comperto sane (12 août 1967) et de la constitution Regimini Ecclesiae universae (15 août).
Journal de l'année Édition 1969
Journal de l'année Édition 1970
Les catholiques Le mariage des prêtres est un point sur lequel le grand public est particulièrement sensibilisé, comme si cette révolution dans le statut clérical était le signe évident d'une réforme profonde de l'Église romaine dans le sens de la modernité. Cette vision des choses est d'ailleurs renforcée par les prises de position très avancées de l'Église hollandaise ; lors du Concile pastoral hollandais, en janvier 1970 (sous la présidence du cardinal Alfrink), une large majorité se dégage en faveur d'un clergé marié.
Journal de l'année Édition 1971
Catholiques « Pierre et Paul, avec leurs compagnons, ont quitté la Palestine pour aller aux extrémités du monde alors connu. C'est au nom de ce même mandat historique que nous allons aujourd'hui vers l'Extrême-Orient. » Ces paroles du pape Paul VI, prononcées le jeudi 26 novembre 1970, au moment où il s'apprête à quitter Rome pour l'Asie, marquent bien l'importance qu'il attache à son voyage, le neuvième hors d'Italie depuis le début de son pontificat : il n'hésite pas à se référer à l'exemple de l'apôtre Pierre quittant la Palestine.
Journal de l'année Édition 1972
Les catholiques Jésus revient. Dans les spectacles comme Jesus Christ Superstar ou Godspell, mais aussi dans la presse et peut-être les cœurs. La Jesus Revolution, née aux États-Unis, atteint l'Europe occidentale puis même l'URSS où les journaux s'inquiètent du grand nombre de jeunes croyants. Mais s'agit-il d'une mode ou d'une reviviscence de la foi ? En France, à la veille de Pâques 1972, les journaux publient deux sondages de l'IFOP et de la SOFRES, dont l'essentiel peut être ainsi résumé : trois Français sur quatre croient en Dieu — chiffre étonnamment stable au fil des ans —, mais un sur trois seulement croit que Jésus-Christ est le fils de Dieu, encore vivant aujourd'hui. Les Français seraient donc déistes plus que chrétiens. L'Église catholique pourrait pourtant se réjouir de cette persistance de la croyance, alors que l'on annonçait depuis des années la mort de Dieu. Mais elle est toujours aux prises avec ses propres difficultés. La contestation pratiquée par son aile gauche se double maintenant d'une contestation à son aile droite : le Rassemblement des silencieux de l'Église en est l'expression la plus massive et aussi la plus modérée. L'aile gauche, moins bruyante que naguère, paraît désormais se regrouper dans de petites communautés qui se désintéressent progressivement de l'Église et de ses structures. Mais l'abcès de fixation de la crise reste toujours la question du sacerdoce, évoquée au synode, lequel se termine par une déception. Au total, le climat est à l'apaisement. Mais l'apaisement ne signifie-t-il pas, dans ce cas, désenchantement ? Des rumeurs — promptement démenties — annoncent même la démission de Paul VI pour son 75e anniversaire, en septembre 1972. Fidèle miroir des angoisses et des déchirements du monde, l'Église semble entrée dans une phase d'hésitation et d'incertitude.
Journal de l'année Édition 1973
Les catholiques Paul VI fête son soixante-quinzième anniversaire le 26 septembre 1972. Contrairement à certaines rumeurs, répandues par des journaux italiens à sensation, le pape ne démissionne pas. Divers observateurs notent toutefois, dans les mois qui suivent – mais sans mettre ce phénomène en relation avec l'âge du pape –, un certain ralentissement de l'activité pontificale. Plus de grands gestes comme les voyages à travers le monde, pas d'encyclique, pas de grandes réformes.
Journal de l'année Édition 1974
Catholique Le pape Paul VI inaugure, le 10 décembre 1973, dans la basilique Saint-Jean de Latran, l'Année sainte du diocèse de Rome. De la même manière, l'Année sainte, proclamée pour 1975, est anticipée dès la fin de 1973 dans tous les diocèses du monde afin que tous les fidèles puissent participer à sa préparation et en recueillir les fruits.
Journal de l'année Édition 1975
Catholiques Le 24 décembre au soir, quelques minutes avant la messe de minuit, le pape ouvre au moyen d'un petit marteau d'argent l'une des portes de la basilique Saint-Pierre : Paul VI veut ainsi marquer le début de l'Année sainte, dont il entend faire l'année de la réconciliation.
Journal de l'année Édition 1976
Catholiques « Je vous le dis, beaucoup viendront du levant et du couchant prendre place au festin avec Abraham, Isaac et Jacob dans le royaume des cieux. » C'est en citant ces paroles du Christ dans l'Évangile de Matthieu que Paul VI dresse, le 22 décembre 1975 devant le Sacré Collège, le bilan de l'Année sainte.
Journal de l'année Édition 1977
Catholiques Au début de mars 1977, la santé de Paul VI, qui doit fêter son quatre-vingtième anniversaire en septembre, donne à nouveau quelques inquiétudes. En fait, il ne s'agit que d'une affection bénigne. Mais cela suffit pour que reprennent les spéculations, devenues habituelles depuis cinq ans, sur une éventuelle démission du souverain pontife. La plupart des observateurs en excluent l'hypothèse. Ils soulignent au contraire que le pape demeure toujours aussi actif et continue de mener les affaires de l'Église d'une main ferme. Certes, son activité réformatrice est beaucoup moins importante qu'au lendemain du Concile, mais l'administration du Vatican, sous son impulsion, poursuit ses efforts en trois directions : la préparation du synode de l'automne 1977, les relations avec les partis et les pays communistes, et le maintien de l'unité et de la discipline à l'intérieur du catholicisme.
Journal de l'année Édition 1978
Catholiques C'est désormais une sorte de tradition romaine : quand approche le 26 septembre, jour anniversaire du pape, les spéculations sur son éventuelle démission se multiplient dans la presse et dans les salons romains. En 1977, les spéculations sont particulièrement vives puisque, ce jour-là, Paul VI atteint 80 ans : on sait qu'à partir de cet âge les cardinaux ne peuvent plus participer à l'élection d'un nouveau pape. Certains observateurs se demandent donc si le souverain pontife ne s'est pas fixé cette limite à lui-même, s'il ne va pas se retirer, d'autant que son état de santé inspire toujours quelques inquiétudes.
Journal de l'année Édition 1979
Catholiques Blanche ou noire ? Blanche. Vers 18 h 20, le lundi 16 octobre, la fumée sortie du petit poêle de la chapelle Sixtine où l'on brûle les bulletins de vote des cardinaux annonce au monde qu'un nouveau pape, le 264e successeur de l'apôtre Pierre, a été élu. Vingt minutes plus tard, le nom de ce nouveau pape, le cardinal Karol Wojtyla, archevêque de Cracovie, qui prend le nom de Jean-Paul II, va susciter l'étonnement : jamais la Pologne n'avait donné un pontife à l'Église, et depuis plus de quatre siècles tous les papes étaient italiens. Une nouvelle page de l'histoire de l'Église commerce en cette année qui a vu mourir deux papes en l'espace de quelques semaines.
Journal de l'année Édition 1980
Catholiques Quel succès ! Partout où passe Jean-Paul II les foules se pressent, l'entourent, l'acclament. À Rome, chaque semaine, ils sont des dizaines de milliers — touristes curieux ou pèlerins fervents — à tenter de l'approcher. Le pape est devenu une superstar. Et sa personnalité exceptionnelle a marqué profondément la vie de l'Église dans les douze derniers mois. Douze mois au cours desquels il a confirmé les orientations de son pontificat : un style nouveau et une pratique renouvelée de la collégialité ; un renforcement de la discipline intérieure ; et la lutte pour la paix et les droits de l'homme.
Journal de l'année Édition 1981
Catholiques Il y a dans le monde quelque 750 millions de catholiques — dont 416 000 prêtres et près d'un million de religieuses — selon le dernier Annuaire des statistiques de l'Église publié par le Vatican. Jean-Paul II semble s'être promis, depuis son élection en 1978, de rendre visite dès que possible au plus grand nombre d'entre eux. Il ne cesse donc de parcourir la planète, observant dans chacun de ses voyages des programmes démesurés et épuisants : si bien qu'au terme de son périple en Asie tous les observateurs jugeront le pape vieilli et très fatigué.
Journal de l'année Édition 1982
Catholiques « Rome est toujours dans Rome, mais le pape n'y est pas encore arrivé. » Ce propos d'un prélat du Vatican reflète assez bien le climat qui règne, au début de 1982, dans les milieux proches de la curie.
Journal de l'année 1er juillet - 31 décembre 1982
Catholiques Le pape Jean-Paul II ne ralentit guère ses activités durant le second semestre de 1982. Entre de multiples réunions, réceptions de visiteurs et prises de position, il effectue, notamment, du 31 octobre au 9 novembre, un important voyage en Espagne, et un autre en Sicile, au cours duquel il s'en prend à la mafia. Mais, de curieuse manière, la vie du Vatican est surtout marquée en cette période par deux événements que l'on pourrait appeler des faits divers : l'affaire du Banco Ambrosiano, et les développements de l'enquête sur l'attentat du 13 mai 1981 contre Jean-Paul II (Journal de l'année 1980-81).
Journal de l'année Édition 1984
Catholiques Reprise en main de l'Église catholique : cinq ans après son élection, il apparaît de plus en plus clairement que Jean-Paul II veut donner ce sens à son pontificat. C'est l'un des objectifs qu'il fixe à plusieurs de ses voyages, notamment en Amérique centrale. Il prépare aussi, durant ses vacances d'été à Castel Gandolfo, une réforme de la Curie attendue de longue date, et qui va dans le même sens. Il répète enfin à plusieurs reprises l'enseignement traditionnel de l'Église : sur la sexualité ou le péché par exemple. Mais l'activité du pape ne s'arrête pas là : il consacre une grande partie de son temps à la Pologne, à la politique internationale, à la défense des droits de l'homme. Certaines de ses prises de position sont contestées par des fractions plus avancées du monde catholique, et l'importance qu'il accorde aux affaires polonaises provoque des critiques au Vatican, où des prélats lui reprochent de ne pas avoir une vision assez internationale. Mais contestations et critiques sont discrètes : il n'est pas facile de s'opposer à ce pape dont la popularité est immense.
Journal de l'année Édition 1985
Catholicisme Développement de l'action diplomatique à l'extérieur, renforcement de la discipline à l'intérieur de l'Église : le pape Jean-Paul II, tout au long de l'année 1984, accentue ces deux traits qui resteront la marque dominante de son pontificat.
Journal de l'année Édition 1986
Église catholique Au cours de l'année 1985, le souverain pontife accomplit trois nouveaux voyages pastoraux. En Amérique latine (Venezuela, Équateur, Pérou), du 24 janvier au 6 février, il s'élève avec véhémence entre les injustices sociales qui sont la plaie de ces pays, mais, dans le même temps, il lance un défi à la violence et dénonce les tonalités marxisantes de la « théologie de la libération », dont le franciscain brésilien Leonardo Boff et le théologien péruvien Gustavo Guttierez sont les représentants patentés. Si, au cours du 26e voyage de son pontificat, du 11 au 23 mai, Jean-Paul II rencontre une Église belge et une Église luxembourgeoise interrogatives mais sereines, aux Pays-Bas l'accueil est plus que réservé.
Journal de l'année Édition 1987
Église catholique L'année 1986 est encore dominée par la personnalité, à la fois charismatique et complexe du pape Jean-Paul II, dont l'enseignement doctrinal – notamment en matière d'éthique sexuelle et matrimoniale et en ce qui concerne le célibat des prêtres – se situe généralement dans la tradition catholique la plus orthodoxe et la moins aventureuse, mais dont certaines démarches et prises de position témoignent d'une conscience universelle des besoins des hommes et d'un œcuménisme dynamique.
Journal de l'année Édition 1988
Église catholique Personnalité hors du commun, défiant tous les classements, le pape Jean-Paul II, dans son enseignement écrit et verbal, continue à juxtaposer les déclarations doctrinales traditionnelles et les gestes les moins convenus. Si, dans son message du 1er janvier, il se montre résolument tiers-mondiste, reprenant l'enseignement de Paul VI dans Populorum progressio (1967) sur le développement des peuples pauvres, l'encyclique Redemptoris Mater, du 25 mars, consacrée à la Vierge Marie, à laquelle le pape a voué l'année 1987, risque de heurter les protestants.
Journal de l'année Édition 1989
Église catholique À l'occasion du vingtième anniversaire de l'encyclique Populorum Progressio, de Paul VI, et dans son prolongement, le pape Jean-Paul II publie, le 19 février, l'encyclique Sollicitudo rei socialis, qui se développe autour de quatre thèmes : il ne peut y avoir d'économie sans respect de l'homme ; le droit à l'initiative économique est trop souvent étouffé, ce qui contribue à élargir le fossé entre le Nord développé et le Sud sous-alimenté ; il est donc nécessaire de promouvoir une civilisation de la solidarité ; si elle n'a pas de solution technique à opposer à la crise actuelle, l'Église, « expert en humanité », apporte une contribution majeure au développement en dénonçant « les structures de péché ».
Journal de l'année Édition 1991
Église catholique On a parfois surnommé Jean-Paul II « l'Africain » ; il semble, en tout cas, que le pape soit davantage « chez lui » en Afrique, où les Églises locales vivent une espèce de Pentecôte, que dans l'Europe sécularisée ou dans l'Amérique déchirée par la théologie de la libération.
Journal de l'année Édition 1992
Église catholique Au cours de L'année, le pape rend publiques deux encycliques. Avec Redemptoris missio (22 janvier), Jean-Paul II attire l'attention des catholiques sur « la valeur permanente du précepte missionnaire » dans l'Église, celle-ci étant non seulement le « sacrement de salut pour toute l'humanité », mais l'institution chargée, en priorité, de lutter contre « la tentation de réduire le christianisme à une sagesse purement humaine, en quelque sorte une science pour bien vivre ».
Journal de l'année Édition 1993
Journal de l'année Édition 1996
Les tensions internes au catholicisme Certains estiment cependant que le souverain pontife prend des positions éthiques dont la rigueur contraste avec son engagement œcuménique. En mars, l'encyclique Evangelium vitae dénonce une nouvelle fois la contraception (largement pratiquée dans les pays d'Europe et d'Amérique latine de tradition catholique), la procréation artificielle, les manipulations et les destructions d'embryons. Également condamnés, l'avortement et l'euthanasie ne sont autorisés que par des lois « dépourvues d'une authentique validité juridique » qui entraînent une obligation « d'objection de conscience ».
Journal de l'année Édition 2001
La repentance de l'Église catholique 12 mars 2000. Ce jour-là, premier dimanche de Carême, dans la basilique Saint-Pierre, à Rome, se passe un événement pour lequel le mot « historique » n'est pas usurpé. « Un événement incompréhensible pour qui n'a pas la foi », devait reconnaître le cardinal Etchegaray ; « sans précédent », « grandiose », « extraordinaire », proclamera, en mal d'adjectifs, la presse française. Revêtu de la chasuble violette, couleur liturgique du temps qui précède Pâques, Jean-Paul II, entouré d'une trentaine de cardinaux, accomplit un geste qu'aucun pape n'a jamais réalisé. Dans les annales de son pontificat, ce geste comptera désormais comme l'un des plus solennels et des plus émouvants. Le chef de l'Église catholique romaine demande, ès-qualité, pardon pour les fautes commises par son Église au cours des deux millénaires de son existence.