L'affaire Calvi, elle, est peut-être encore plus compliquée. Pour Scotland Yard, le (P-DG) du Banco Ambrosiano (BA), le plus grand groupe bancaire privé d'Italie, retrouvé pendu sous le Blackfriars Bridge à Londres le 18 juin 1982, s'est suicidé. Motif : les énormes difficultés financières du BA (un trou dans la caisse de 1,37 milliard de dollars) et, accessoirement, son implication dans le scandale de la loge P-2. Pour les magistrats italiens, en revanche, il a été sans doute assassiné. La femme et les enfants du disparu sont également de cet avis.

L'homme d'affaires sarde Flavio Carboni, qui avait aidé R. Calvi à quitter l'Italie grâce à un faux passeport et qui se trouvait avec lui à Londres, est arrêté durant l'été en Suisse, de même que Licio Gelli, grand maître de la loge P-2 et, selon la rumeur publique, éminence grise de R. Calvi. Pourtant, loin de s'éclaircir, le cadre de l'enquête s'obscurcit plutôt.

Attentat antisémite

Samedi 9 octobre, 11 h 57 : un commando de six terroristes tire et lance des grenades contre les fidèles qui quittent la synagogue de Rome. C'est le jour du shemini azzeret, une cérémonie qui s'achève par la bénédiction des enfants. Bilan : un mort (un bébé de deux ans) et 34 blessés.

Débandade des BR

La débandade au sein du mouvement terroriste italien continue : après V. Bolognesi et dix de ses complices, le 2 octobre à Naples, après Natalia Ligas quinze jours plus tard à Turin, après G. Alimonti — l'ex-standardiste de la Chambre des députés — à Rome, la police antiterroriste met sous les verrous deux têtes d'affiche de la subversion Suzanna Ronconi (membre des Brigades rouges puis fondatrice de Prima Linea) et Luigi Novelli (qui est impliqué dans les affaires Moro, D'Urso et Dozier).

Mgr Marcinkus

Les liens entre Mgr Marcinkus, responsable de la banque du Vatican (IOR), et Roberto Calvi sont loin, par exemple, d'être limpides. Pour tenter, semble-t-il, de racheter des actions de son propre groupe à la barbe de son conseil d'administration, R. Calvi emprunte 1,37 milliard de dollars en 1978 sur les marchés européens au nom de plusieurs filiales du BA basées dans les Caraïbes. En guise de garantie, il exhibe des lettres de patronage signées Marcinkus.

Ces lettres n'ont certes été rédigées qu'après l'octroi des prêts et n'engagent pas juridiquement l'IOR, mais il n'empêche : les filiales qui ont encaissé l'argent sont incapables de le rembourser ; le BA est mis en liquidication judiciaire et on crée à sa place le Nuovo Banco Ambrosiano pour sauver ce qui peut l'être ; l'Italie exige de la banque du Vatican la restitution des fonds perdus, et le pape, après avoir demandé à trois experts internationaux de mettre le nez dans les comptes de Mgr Marcinkus en vue d'une prochaine réforme de l'IOR, fait finalement savoir qu'il est disposé à un compromis avec les autorités financières de la péninsule. Mais les négociations seront longues...

Bulgares

Jean-Paul II encore, mais pour une tout autre affaire : le 25 novembre 1982, l'enquête visant à démêler les fils du complot qui a failli lui coûter la vie, le 13 mai 1981, sur la place Saint-Pierre, connaît un rebondissement spectaculaire avec l'arrestation, par le juge Martella, d'un fonctionnaire bulgare de 34 ans, Sergei Ivanov Antonov, chef d'escale de la Balkanair à Rome, inculpé de « complicité active » dans l'attentat.

C'est le début d'une vaste polémique sur la responsabilité réelle ou supposée des services secrets de l'Est — et notamment du KGB, dirigé alors par Youri Andropov — dans l'acte criminel qui a bouleversé le monde catholique. Une polémique qui rejaillit bien sûr négativement sur les relations diplomatiques entre Sofia et Rome et dont Amintore Fanfani, le nouveau président du Conseil italien, se serait volontiers passé.

Quarante-troisième

A. Fanfani a succédé le 30 novembre à Giovanni Spadolini à la tête du 43e gouvernement italien depuis 1945. Âgé de 74 ans, il avait déjà occupé ce poste quatre fois dans le passé, entre 1953 et 1964 ! Pour cette personnalité de marque de la démocratie-chrétienne, c'est un retour aux sources, ou presque.