Hué par ses adversaires, contesté même au sein de ses troupes, Trudeau porte le bonnet d'âne. Un agent immobilier d'Edmonton va même jusqu'à organiser une campagne par laquelle il compte amasser 5 millions de dollars destinés à convaincre P. E. Trudeau de prendre une retraite anticipée. Il demande ainsi aux pétitionnaires d'émettre un chèque de 10 dollars à l'ordre du chef de l'État.

À la fin de l'année, le Vérificateur général du pays, sorte de comptable de l'État, dévoile le gigantisme des sociétés de la Couronne dont l'administration, qui absorbe pourtant 34 milliards de dollars puisés dans les deniers publics, échappe de plus en plus à la haute main du Parlement. Le signataire du rapport, Kenneth Dye, parle de l'émergence d'un « sous-gouvernement » et de gestions discutables dans bien des cas, ce qui jette un éclairage nouveau sur les déficits gouvernementaux. Déficits dont les ministres des Finances conversent maintenant allègrement, sans la pudeur ou la gêne qui empourprait jadis leur visage.

Espionnage

C'est sur cette trame que l'exploit de deux Canadiens, Laurie Skreslet et Pat Morrow, vainqueurs de l'Everest (5 octobre) se déroule, ne parvenant pas à soulever l'enthousiasme d'une population qui aurait pourtant bien besoin de distractions. Dans les boîtes de nuit, les lasers ne s'éteignent plus, les décibels grimpent en octaves, le scotch coule à flots.

Bonne nouvelle : la plus belle femme du monde est une Canadienne : Karen Dianne Baldwin, une brunette torontoise de 22 printemps, ravit à coups de charme, d'œillades et de mouvements de jambes le titre de Miss Univers dans la capitale péruvienne (27-7-82).

Sur le plan militaire, même si le nerf de la guerre se porte mal, Ottawa reçoit le premier des 138 appareils F-18 (commande globale de 5,2 milliards de dollars) de fabrication américaine. À ce chapitre, le Québec, qui devait recevoir des retombées importantes de ce contrat, rumine avec amertume la trahison du gouvernement fédéral qui se rétracte, diminue la part du Québec et accorde davantage à l'Ontario.

Affaire qui a fait grand bruit au pays, Hugh Hambleton, cet obscur professeur d'économie à l'université Laval de Québec, est condamné à Londres à dix ans de réclusion pour espionnage au profit des services secrets soviétiques. Son plaidoyer, selon lequel il aurait été agent double et aurait ainsi travaillé pour la France et la GRC canadienne, tombe à vide ; on ne croit plus l'homme qui a rencontré Andropov il y a quelques années à Moscou. L'espion Hambleton prend le chemin des cachots (décembre 1982), sans que l'on s'explique qu'il n'ait jamais été poursuivi chez lui.

Québec

Au Québec, la vie est ponctuée des mêmes soubresauts économiques qui tiraillent le reste du pays.

La querelle qui oppose le gouvernement Lévesque à celui de Terre-Neuve, au sujet de la construction d'un corridor hydroélectrique au profit de la province de l'Est, reflète une fois de plus la divergence des intérêts régionaux.

Le chef libéral Claude Ryan, qui n'a pu conduire les siens au pouvoir lors du scrutin provincial d'avril 1981, ne peut supporter davantage le poids des critiques qui l'accablent. Il remet sa démission et quitte le leadership du parti libéral du Québec à la mi-août 1982. Il sera remplacé de façon intérimaire par le député de Bonaventure, Gérard D. Lévesque.

Montréal, seconde ville française du monde, cède du terrain à la ville reine, Toronto, qui la supplante maintenant au niveau démographique avec ses 2 998 947 citoyens, contre 2 828 349 (zones périphériques incluses) pour la métropole de l'Est. Son maire, Jean Drapeau, qui a toujours joué la carte de l'internationalisme (Exposition universelle de 1967, jeux Olympiques de 1976, Floralies internationales de 1980), se remet juste à temps d'une maladie qui l'a paralysé pendant quelques mois pour conquérir un huitième mandat à la mairie, le 14 novembre. Le « sauveur de Montréal », dont les critiques estiment qu'il préfère « sa » ville à ses habitants, a pourtant suscité une opposition révélatrice de la part de deux groupes d'opposition, le RCM et le GAM.

USA

Washington. 227 660 000. 25. 0,8 %.
Économie. PIB (80) : 11 360. Productions (78) : A 3 + I 34 + S 63. Énerg. (80) : 10 410. CE (78) : 7 %. P (78) : 168. Ch. (80): 8 %.
Population active (80) : 97 270 000, dont A : 3,6 % ; I : 30,6 % ; D : 65,8 %. Prix à la consommation (évolution 80) : + 12,4 %.
Balance commerciale (1980) exp. : 220,7 MM$, imp. : 241,2 MM$. Productions (1980) : blé 64,5 Mt, maïs 170 Mt, coton 2,4 Mt, houille 671 Mt, pétrole extrait 485 Mt (262 Mt de brut et 76 Mt de produits raffinés importés), gaz naturel 570 Gm3, électricité 2 285 TWh (dont 265 d'origine nucléaire), fer 52 Mt, acier 101 Mt, aluminium 4,7 Mt, construction automobile 6,4 M de voitures de tourisme, 1,7 M de véhicules utilitaires.
L'inflation s'est encore légèrement accrue en 1980 ; le chômage également : il touche désormais plus de 8 millions de personnes. Le PIB a enregistré un recul de 0,75 %. Pour la première fois dans leur histoire, les États-Unis n'occupent plus la première place mondiale dans la production automobile. Déjà dépassés par le Japon pour les véhicules utilitaires, ils lui cèdent le premier rang pour la production de voitures de tourisme. Cette situation n'a pas contribué à faire disparaître le déficit de la balance commerciale.
Transports. (78) : 16 452 M pass./km, 1 250 000 Mt/km. (*78) : 117 147 000 + 31 921 000. (*80) : 18 464 000 tjb. (78) : 64 386 pass./km.
Information. (77) : 1 829 quotidiens ; tirage global : 62 159 000. (75) : *402 000 000. (75) : *121 100 000. (77) : fréquentation : *1 565 M. (78) : 169 027 000.
Santé. (77) : 381 163. Mté inf. (79) : 13.
Éducation. (76). Prim. : *25 928 000. Sec. et techn. : *20 355 000. Sup. (75) : 11 184 859.
Armée.  : 2 049 100.
Institutions. État fédéral. République présidentielle. Constitution de 1787. Président et chef de l'exécutif : Ronald Reagan, élu le 4 novembre 1980 ; succède à Jimmy Carter.

Deux problèmes pour Reagan : récession et chômage

Motif de préoccupation prioritaire, l'état de santé de l'économie demeure incertain, ainsi qu'en témoignent la baisse de la production industrielle et la montée continue du chômage. Toutefois, le parti républicain n'enregistre que des pertes relativement modestes aux élections de novembre 1982, et la popularité du président Reagan ne semble guère très affectée par les difficultés de la conjoncture. En politique étrangère, les relations des États-Unis avec leurs alliés connaissent de nouvelles phases orageuses, tandis qu'un certain attentisme caractérise les rapports américano-soviétiques. Washington, enfin, peut se prévaloir d'avoir loué un rôle décisif dans le dénouement de la crise libanaise.

Économie

Quelques motifs de satisfaction, mais beaucoup de points noirs. Amorcé au cours de l'hiver 1981-1982, le ralentissement de la hausse des prix se poursuit et le pays enregistre à la fin de l'année son taux d'inflation le plus faible depuis 1971 : 3,5 %. Cependant, la récession continue à faire sentir ses effets dans tous les secteurs d'activité, et, contrairement aux prévisions officielles, les perspectives de reprise restent moroses.