Éducation

Primaire et secondaire : une rentrée scolaire difficile malgré des moyens accrus

Le mois de septembre 1982 est celui de la première véritable rentrée scolaire préparée depuis une vingtaine d'années par un gouvernement socialiste, puisque celle de l'an dernier suivait de près l'arrivée de la gauche au pouvoir. Le changement le plus immédiatement perceptible pour les élèves, les parents et aussi les enseignants est le retour, à peu de chose près, à une date unique de rentrée des classes (le 7 ou le 9 septembre suivant les académies). Mais ce n'est pas le seul changement. Si, au cours de l'été 1981, André Savary n'avait pu opérer que dans la hâte des « replâtrages de fortune » en augmentant le nombre des enseignants, donc en se limitant aux aspects quantitatifs, tout au long de l'année ses services ont consacré leurs efforts au qualitatif.

Effectifs

Ce qui ne veut pas dire que les moyens ont été oubliés. Quelque 14 500 emplois supplémentaires ont été créés à la rentrée de 1982. Chiffre important, surtout si on le rapproche de la diminution du nombre total des élèves. La baisse globale des effectifs constatée l'an dernier continue, et il y avait en septembre 1982 environ 47 000 élèves de moins qu'à la rentrée précédente. La baisse affecte plus particulièrement l'enseignement élémentaire (130 000 élèves en moins), tandis que, dans les écoles maternelles, le redressement amorcé en 1981 s'amplifie et la demande de scolarisation augmente.

Mais la poussée des effectifs constatée dans l'ensemble de l'enseignement secondaire a surpris les services du ministère et a parfois perturbé la rentrée dans quelques établissements. C'est le cas dans les collèges, qui reçoivent tous les élèves, de la 6e à la 3e. Mais, contrairement à toutes les prévisions statistiques, 40 000 élèves de plus qu'en 1981 ont dû être accueillis à la rentrée. L'explication de cet afflux inattendu est à chercher dans la nouvelle politique du ministre, qui tend à limiter les éliminations précoces du système scolaire ; elle est aussi liée à la situation du marché de l'emploi.

Les mêmes phénomènes produisent les mêmes effets dans les lycées, entraînant un accroissement des effectifs de 15 000 élèves, alors que le ministère s'attendait à une diminution. Dans les lycées d'enseignement professionnel (LEP), il semble que les prévisions d'augmentations aient été plus proches de la réalité.

L'accueil de tous ces élèves imprévus dans les établissements du second cycle n'a pas pu se faire dans des conditions convenables. Souvent faute d'enseignants, quelquefois par absence de locaux, des élèves se trouvent sans cours assurés. Dans le second degré, des parents, des élèves (à Brest et à Marseille) et même des enseignants se mobilisent pour protester contre le fait que des enseignements ne sont toujours pas assurés 10, voire 15 jours après la date de la rentrée. « La plus mauvaise rentrée scolaire depuis longtemps », constatent des enseignants de Rennes, alors que, dans les académies de Lille, de Rouen et de Reims, les recteurs reconnaissent que de nombreux postes d'enseignants ne sont pas pourvus. L'augmentation des effectifs explique les classes surchargées, mais l'absence d'enseignants, après une vague importante de créations de postes, surprend.

Il faut préciser que les nouveaux emplois créés par la loi de finance sont d'abord proposés aux enseignants titulaires. Ce mouvement des personnels entraîne un dépeuplement des académies du nord et de l'est de la France. Phénomène typiquement français, la migration des cadres intellectuels du nord vers le sud de l'hexagone a des répercussions lourdes de conséquences dans l'Éducation nationale. Lorsque des emplois supplémentaires sont créés, les enseignants du nord de la France en profitent pour obtenir un poste dans une autre région, supposée plus ensoleillée. Ces départs augmentent encore le déficit au nord. On sait aussi que des personnels titulaires ne rejoignent pas leur poste pour des motifs d'ailleurs divers – près de 1 500 personnes en septembre 1982, selon le ministère –, souvent sans avertir leurs établissements.