Tenant compte de ces remarques, la déclaration finale du forum de Kyoto reprend les principales conclusions du rapport Camdessus et appelle à améliorer la gouvernance de l'eau, afin de la rendre équitable, transparente et efficace. Cela passe notamment par trois conditions : sécurisation des grands investissements privés internationaux, notamment en matière de risques de change ; encouragement juridique et fiscal aux micro-investissements locaux ; réévaluation de l'aide publique internationale. Ces trois pistes, explorées conjointement, permettraient de raccorder quotidiennement 400 000 personnes à un réseau de distribution d'ici 2015, rythme à soutenir si l'on veut tenir les objectifs de Johannesburg. Une petite gageure qui représenterait 100 milliards d'euros d'investissements supplémentaires par an. Une somme à la fois supérieure aux efforts aujourd'hui consentis (soit 80 milliards d'euros par an) et équivalente à la moitié du coût de la dernière guerre en Irak.

Benjamin Bibas

Barrages et conflits

Le Rapport mondial sur la mise en valeur des ressources en eau, publié en début d'année par l'Unesco, établit que le partage de l'eau est rarement à l'origine de conflits majeurs entre pays. Ainsi, sur 1 831 « interactions » survenues depuis cinquante ans entre nations sur les questions d'eau, seules 37 ont donné lieu à des conflits violents. Ceux-ci surgissent notamment lorsqu'un barrage construit sur un fleuve par un pays prive du débit escompté un autre pays traversé par ce fleuve. Un contentieux oppose par exemple la Turquie et ses voisins syrien et irakien au sujet des eaux du Tigre et de l'Euphrate. L'eau du Nil est un enjeu de pouvoir entre l'Égypte, le Soudan et l'Éthiopie. L'Inde dispute les eaux de l'Indus au Pakistan et celles du Gange et du Brahmapoutre au Bangladesh. Quant à Israël, il est déjà intervenu militairement 18 fois lors de querelles hydrauliques qui l'opposaient à ses voisins.