Journal de l'année Édition 2003 2003Éd. 2003

XVIIe Coupe du monde de football
(Japon, Corée du Sud, 31 mai-30 juin)

La XVIIe Coupe du monde, coorganisée par la Corée du Sud et le Japon, restera celle des premières : premier Mondial du xxie siècle, premier à se dérouler sur le continent asiatique, premier à réserver autant de surprises...

De Séoul à Yokohama, deux pays divisés par l'histoire ont vibré à l'unisson, à leur façon, pour leurs équipes respectives, qui ont fait mieux que de la figuration. Couronnée par la victoire d'un Brésil donné sur le déclin, la Coupe du monde extrême-orientale n'a pourtant pas été celle du beau jeu. Disputée dans la foulée d'une saison européenne épuisante, elle a mis en lumière la démesure des calendriers imposés à des joueurs physiquement à bout, symbolisée par la faillite de l'équipe de France.

Une Coupe du monde exotique

Qui, au soir du match d'ouverture le 31 mai à Séoul, aurait misé un yen sur le dernier carré d'une Coupe du monde certes exotique mais promise une fois encore à la domination des nations de tradition ? Qui aurait parié sur la Corée du Sud ? Imaginé que les Sénégalais alignés ce jour-là contre les champions du monde français allaient voyager jusqu'aux quarts de finale après avoir infligé leur première correction aux coéquipiers de Zidane ? Défenseur des « petits », le président de la FIFA, Sepp Blatter, a été gâté. Jamais les nations émergentes du football n'ont autant brillé que durant ce mois de compétition : la Corée du Sud et le Japon ont comblé des supporters néophytes mais exigeants. Dirigés par des entraîneurs européens déifiés de leur vivant (Guus Hiddink pour la Corée et Philippe Troussier pour le Japon), les pays hôtes ont réussi leur opération commando, l'un en ne cédant qu'en demi-finale face à l'Allemagne, l'autre en atteignant les huitièmes de finale. Troisième pays africain sur le papier, le Sénégal a fait mieux que le Nigeria et le Cameroun. Enfin la Turquie, plus connue pour ses équipes de club que pour sa sélection nationale, n'a cédé que face au Brésil en demi-finale et restera l'une des équipes les plus séduisantes de la compétition.

Éternel Brésil, inoxydable Allemagne

Emportés par la folie ambiante, certains se sont même pris à rêver d'une finale abracadabrante entre la Turquie et la Corée du Sud, mais c'est finalement une affiche beaucoup plus classique qu'a offerte le match de clôture, le 30 juin à Yokohama. À un détail près : respectivement quatre fois et trois fois champion du monde (avant la finale), le Brésil et l'Allemagne ne s'étaient jamais affrontés lors d'une Coupe du monde. L'erreur de programmation a été réparée par une jolie finale, équilibrée jusqu'en milieu de seconde mi-temps et finalement emballée par un Brésil plus talentueux. Auteurs d'un sans-faute avec sept victoires en sept matches, 18 buts marqués pour 4 encaissés, les « Auriverde » ont répondu aux critiques qui avaient éreinté l'entraîneur Luiz Felipe Scolari après des éliminatoires laborieuses.

Fidèle à son habitude, le Brésil l'a emporté grâce à ses brillantes individualités – Ronaldo, Ronaldinho et Rivaldo notamment –, alors que l'Allemagne – qui n'avait pas non plus été épargnée par les sarcasmes et s'était présentée en Asie avec de modestes ambitions – montrait un formidable esprit collectif pour récupérer sa place parmi l'élite du football.

Ronaldo au 7e ciel

Présentée un peu sommairement comme un duel entre l'attaquant brésilien Ronaldo et l'Allemand Oliver Kahn, meilleur gardien du Mondial, la finale a tourné à l'avantage du Sud-Américain. En inscrivant les 2 buts de la finale à Kahn qui n'avait été battu qu'une fois en six matches, Ronaldo a stoppé le parcours inattendu des hommes de Rudi Völler pour devenir le meilleur buteur de la compétition (8). Quatre ans après le rendez-vous manqué au Stade de France, en finale de la Coupe du monde 1998 face aux Bleus, et après une longue traversée du désert consécutive à de multiples blessures au genou, le Brésilien est ainsi revenu à son meilleur niveau, montant en puissance à chacun des sept matches de la Seleçao, pour offrir un cinquième titre mondial à son pays (1958, 1962, 1970, 1994, 2002), également finaliste lors des trois dernières éditions.

La France déçoit

Le Brésil et l'Allemagne ont, en fin de compte, permis à la tradition de triompher sur la jeunesse et à la fougue de nations comme la Corée du Sud ou la Turquie de s'exprimer. Beaucoup d'autres favoris, en revanche, ont fait pâle figure, à commencer par les tenants du titre. Champions du monde chez eux en 1998, les Français sont arrivés avec la prétention de défendre leur bien. Ils sont repartis de Corée sans avoir marqué le moindre but. Défaits d'entrée par le Sénégal, tenus en échec par l'Uruguay, ils ont sombré face au Danemark lors du match qu'il ne fallait pas perdre. Dès le début privés de Zinedine Zidane, leur chef d'orchestre blessé lors d'une rencontre de préparation très contestée face à la Corée, les Bleus de Roger Lemerre ont été inexistants. Péché d'orgueil, usure physique et mentale, mauvais choix tactiques de la part d'un entraîneur limogé à la suite de la compétition, sont autant de facteurs qui ont conduit à la débâcle.