Les « JO du millénaire »

Les « plus beaux Jeux de tous les temps ». Dans la bouche de Juan Antonio Samaranch, président du CIO, le compliment n'est pas mince. Savamment hiérarchisée, l'organisation olympique aime à décerner des notes. Et « Sydney 2000 » a décroché la meilleure. Les Jeux du millénaire ont, il est vrai, été à la hauteur des attentes. Dans le cadre splendide d'une des plus belles baies du monde, après une cérémonie empreinte d'émotion et marquée par la présence de l'athlète aborigène Cathy Freeman chargée d'allumer la flamme, les quelque 4,5 millions de spectateurs et 10 000 athlètes en lice ont vécu quinze jours hors du temps. Quinze jours d'exploits, de surprises, de scandales aussi, encore une fois dominés par les athlètes américains, lauréats de 97 médailles devant la Russie et la Chine alors que l'Australie, après avoir promis un festival, se contentait de 58 médailles. Quinze jours ouverts en fanfare par les exploits des nageurs...

Les nageurs rois

Les épreuves de natation resteront en effet le grand moment de ces XXIVe Jeux d'été. Pas moins de 15 records du monde ont en effet été battus ou égalés dans la piscine « magique ». Mais pas forcément par ceux que l'on attendait. Les Australiens avaient placé tous leurs espoirs en Ian Thorpe, jeune prodige de 17 ans, déjà plusieurs fois recordman du monde sur 200 et 400 m libre. Mais le sport n'est pas une science exacte et Thorpe, héros annoncé de « ses » Jeux, s'est vu voler la vedette par l'insatiable Néerlandais Pieter Van den Hoogenband.

Vainqueur du 400 m libre et auteur d'un nouveau record du monde sur la distance, Thorpe a arrêté là sa moisson de médailles individuelles. Sur 200 m, Van den Hoogenband s'est emparé du titre et du record du monde de Thorpe avant de doubler avec le 100 m, devenant le premier homme à nager sous les 48 secondes (47″ 84). Le premier également depuis Mark Spitz (en 1972) à doubler 100-200 m lors de jeux Olympiques. Piqué au vif, Thorpe ne pouvait que réagir lors du relais. Dans le 4 × 100 m, l'Australien et ses compatriotes l'emportaient en améliorant le record du monde pour infliger aux États-Unis leur première défaite sur la distance dans l'histoire des grands championnats. Ce qui n'empêchait pas les Américains de dominer, au tableau des médailles, les épreuves de natation.

Les femmes n'ont pas été en reste. À elle seule, la Néerlandaise Inge De Bruijn a effacé trois records du monde et remporté trois titres (50 m et 100 m libre et 100 m papillon) pour rejoindre son compatriote VDH dans l'histoire des Jeux et agrémenter le bilan d'une natation européenne en pleine forme.

Pas de records, des surprises

À l'inverse des nageurs, les stars de l'athlétisme ont été avares de records du monde. À l'image de l'Américaine Marion Jones qui a échoué dans sa quête annoncée de cinq médailles d'or, mais qui a tout de même remporté trois titres et deux médailles de bronze, les athlètes ont calé en ce qui concerne les performances.

Si les Américains Marion Jones (100, 200, 4 × 400 m), Maurice Greene (100, 4 × 100 m), Michael Johnson (400, 4 × 400 m), l'Australienne Cathy Freeman (400 m), ou l'Éthiopien Haile Gebreselassie (10 000 m) ont été fidèles au rendez-vous en l'emportant haut la main dans des disciplines qu'ils écrasent de leur talent, d'autres favoris ont déçu au profit d'outsiders. Ainsi le Grec Konstantin Kenteris, profitant de l'absence des favoris Greene et Johnson, fut un inattendu vainqueur du 200 m, comme l'Allemand Nils Schumann qui a détrôné le Danois Wilson Kipketer sur 800 m, le perchiste américain Neil Hysong, ou la Russe Irina Privalova que l'on n'espérait plus en championne olympique du 400 m haies. Talent sûr et reconnu, le Kenyan Noah Ngenyi a lui profité du passage à vide de Hicham El Guerrouj, roi du 1 500 m, pour s'imposer sur une distance où le Marocain restait invaincu depuis trois ans.

Très attendue après trois saisons blanches, Marie-José Pérec a raté sa rentrée... à moins que ce ne soit sa sortie. Traquée par les journalistes australiens avant son duel avec Cathy Freeman sur 400 m, la Française a repris l'avion pour la France à deux jours de son entrée en piste, alimentant les critiques déjà vives à l'égard de son comportement de diva. Pérec envolée, Diagana forfait, Galfione et Barber diminués, la France a été sanctionnée par un zéro pointé en athlétisme. Avec un total de 38 médailles, les Tricolores font cependant un peu mieux qu'à Atlanta (37).

David Douillet : toujours en héros

Source traditionnelle de médailles françaises, le judo n'a pas échappé à la règle. En remportant son second titre olympique des lourds, cumulé à quatre titres mondiaux, David Douillet est devenu le judoka le plus titré de l'histoire. À l'inverse, Djamel Bouras n'est pas parvenu à défendre sa médaille d'or d'Atlanta et à laver son honneur mis à mal par sa suspension pour contrôle antidopage positif. La moins attendue Séverine Vandenhende a apporté à la France sa seconde médaille d'or dans une discipline légèrement dominée par les Japonais.