Saisie par le MQM, la Cour suprême a estimé, le 11 janvier, que les tribunaux militaires instaurés dans la province du Sind étaient illégaux. D'autre part, l'amendement constitutionnel adopté par le Parlement en octobre 1998, qui faisait de la charia – la loi coranique – la loi fondamentale du pays, n'a pas atteint son objectif, qui était de désamorcer les revendications islamistes. Enfin, et plus généralement, le renforcement incessant des pouvoirs du Premier ministre Nawaz Sharif depuis son retour aux affaires, en février 1997, n'a en aucun cas contribué au redressement politique et économique du Pakistan, qui s'est rarement trouvé dans une situation aussi tragique.

L'autre grande source de violence, au Pakistan, est extérieure et tient à la nature des relations entre Islamabad et New Delhi. La tension bilatérale a culminé en mai 1998 avec la série d'essais nucléaires pratiquée par les deux pays. La situation s'est, depuis, plutôt normalisée, comme si l'entrée du Pakistan et de l'Inde dans le club des possesseurs de la bombe atomique s'était accompagnée d'une prise de conscience de leurs nouvelles responsabilités. C'est surtout l'accentuation des pressions internationales sur leurs deux pays qui semble avoir rapproché Islamabad et New Delhi. Mais ce rapprochement très conjoncturel reste fragile, tant sont profondes leurs divergences, notamment sur le dossier du Cachemire indien, région frontalière que revendique le Pakistan.

La diminution des violences au Pakistan ne pourrait résulter que de réformes politiques et économiques profondes. On peut craindre, au contraire, que la fuite en avant autoritaire à laquelle se livre le pouvoir, incapable de s'attaquer aux maux structurels dont souffre le pays, ne fasse qu'exacerber ces violences.

Christophe Péry

Rapprochement indo-pakistanais ?

Le 20 février, Atal Behari Vajpayee a effectué la première visite officielle au Pakistan d'un Premier ministre indien depuis dix ans. Il s'est rendu à Lahore en inaugurant la première ligne d'autobus reliant New Delhi à la grande ville frontalière pakistanaise. Le sommet indo-pakistanais n'a abouti à aucun résultat concret, mais il a permis de mettre en place une structure de dialogue relative aux divers contentieux qui marquent les relations indo-pakistanaises. La « déclaration de Lahore » signée par les deux dirigeants engage ainsi leurs gouvernements à « intensifier leurs efforts pour résoudre toutes les questions, y compris celle du Cachemire », principal sujet de discorde entre les deux pays. Il est décidé que le dialogue se déroulera désormais au niveau des ministres des Affaires étrangères. Concernant le dossier nucléaire, les deux Premiers ministres ont décidé de « prendre des mesures immédiates pour réduire les risques d'un usage accidentel ou non autorisé des armes nucléaires ». Ils sont également convenus d'engager des consultations bilatérales sur la sécurité, estimant préférable de « discuter ensemble et non avec les puissances mondiales » afin de ne pas permettre « aux autres pays de [leur] dicter [leur] conduite ».