Il est vrai que l'embargo mise en place contre le régime Bagdad continue de faire l'objet d'un large consensus aux États-Unis, toutes tendances politiques et toutes institutions confondues. Et à ce jour, les partisans d'une levée progressive des sanctions ont été bien trop peu nombreux à Washington pour espérer peser sur les décideurs, qu'il s'agisse de ceux qui invoquent l'aspect humanitaire ou de ceux qui soulignent les dangers stratégiques d'un isolement prolongé de l'Irak.

Toutefois, la crise de janvier 1998 a souligné les contradictions et les faiblesses de la position américaine, la Maison-Blanche ne parvenant plus à sauvegarder le consensus de façade au sein du Conseil de sécurité. Depuis la fin de la guerre du Golfe, dresser le bilan politique, économique et social de l'Irak équivaut à tenir la chronique des relations – tendues – entre Washington et Bagdad et à « pister » les inspecteurs de l'Unscom dans leur mission.

De ce point de vue, l'année 1998 n'aura pas dérogé. Au bout du compte, on a eu la confirmation – attendue – que tout séparait les deux protagonistes, hormis une « rigidité » dont la population irakienne continue de payer le prix fort.

Éric Jones

La fin du double endiguement

Si l'ordre instaure dam là zone du Golfe au lendemain de la guerre de 1990 n'a pas été formellement remis en cause, il semble pourtant que la stratégie dite du dual containment a vécu. Définie en 1993, cette stratégie se présente alors comme une rupture avec l'ancienne politique américaine d'équilibre entre l'Iran et l'Irak. Il s'agit de contrecarrer les menaces irakiennes (sur le Koweït) et iraniennes (sur le golfe Persique et le détroit d'Ormuz). Le double endiguement s'appuie sur une présence militaire américaine importante dans le Golfe, afin de dissuader toute agression, ainsi que sur des sanctions économiques : loi d'Amato pour l'Iran, sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU pour l'Irak. Mais, en 1998, Téhéran a fait l'objet d'une « réévaluation stratégique » à Washington. Et si Saddam Hussein est toujours tenu en odeur luciférienne, rien n'empêche l'équipe des États-Unis de jouer au football contre une sélection iranienne. Il est vrai que la politique de la porte fermée s'est révélée plus préjudiciable pour les intérêts américains que pour l'Iran, qui contrôle les routes du pétrole de la mer Caspienne.