Alan Shepard, premier Américain à avoir effectué un vol spatial, est décédé le 21 juillet à son domicile de Monterey (Californie), à l'âge de 74 ans. Membre de l'équipe des sept premiers astronautes sélectionnés en 1959 pour le programme Mercury de la NASA, ce pilote d'essai de l'Aéronavale est entré dans l'histoire le 5 mai 1961 en effectuant à bord de la capsule Mercury Freedom 7 un vol suborbital de 15 min 22 s, culminant à 187 km d'altitude, avant de retomber dans l'Atlantique. C'était 23 jours après le vol du Russe Iouri Gagarine, mais ce dernier avait accompli un tour complet de la Terre. Ce vol marquait le départ de l'âpre compétition américano-soviétique pour envoyer des hommes sur la Lune. Par la suite, Shepard fut interdit de mission dans l'espace durant 6 ans en raison d'une affection de l'oreille interne. Guéri, il put réintégrer le corps des astronautes et alla sur la Lune en 1971, comme commandant de bord de la mission Apollo 14. Il quitta la NASA en 1974 et se reconvertit dans les affaires, notamment dans le commerce de la bière et l'immobilier.

John Glenn, lui aussi ancien pilote de l'Aéronavale, sélectionné en 1959 comme astronaute, a été le premier Américain à accomplir un vol orbital, le 20 février 1962, en effectuant trois révolutions autour de la Terre en 4 h 55 min à bord de la cabine Mercury MA-6. En 1964, il a quitté la NASA mais, sénateur démocrate de l'Ohio depuis 1974, il est l'un des plus vigoureux défenseurs, aux États-Unis, des programmes de vols spatiaux habités. C'est pourquoi, malgré son âge, il s'est entraîné en vue d'un second vol dans l'espace. En embarquant à bord de la navette, en octobre, à l'âge de 77 ans, il a ravi à son compatriote Bruce McCandless, alors âgé de 61 ans, le record de l'âge le plus avancé pour une mission spatiale. Bien que soit mis en avant l'intérêt médical de ce vol, il s'est agi surtout d'un geste politique et médiatique pour soutenir les vols spatiaux habités.

La politique fluctuante de la France

Pour une puissance spatiale, le fait de s'engager dans les vols habités relève d'une décision politique. Aussi, le moins que l'on puisse dire est que la position officielle de la France en ce domaine n'a pas été exempte de volte-face. Ainsi, au début des années 80, l'agence spatiale française, le CNES, tout en préparant des spationautes (Jean-Loup Chrétien, Patrick Baudry) à voler à bord d'une station orbitale soviétique et de la navette américaine, menait une réflexion prospective sur la plate-forme orbitale automatique Solaris, qui aurait eu pour fonction de réaliser sans intervention humaine directe, mais en faisant largement appel à la robotique, les activités que la NASA se proposait d'effectuer avec sa navette habitée.

Puis, de 1986 à 1992, sous la pression de ses industriels, la France a défendu jusqu'au-delà du raisonnable le projet de mini-navette habitée Hermès. Après l'abandon de ce projet, trop coûteux pour l'Europe, elle a insisté pour que l'Agence spatiale européenne engage des études préliminaires à la mise au point d'une capsule récupérable capable d'assurer le transport d'équipages à destination ou à partir d'une station orbitale. Et, à l'automne 1995, lors de la conférence des ministres européens de l'espace, à Toulouse, c'est grâce aux efforts du ministre français François Fillon que fut arrachée la décision de la participation européenne à la station spatiale internationale. Pourtant, deux ans plus tard, le nouveau ministre français Claude Allègre, opposant déclaré aux vols spatiaux humains, à défaut de pouvoir remettre en cause la participation de la France à la construction de la station spatiale internationale, soulignait que cet engagement n'impliquait pas une participation ultérieure à l'exploitation de la station. Il décidait aussi le retrait de la France du programme européen de capsule récupérable habitée et le raccourcissement à trois semaines (au lieu des quatre mois prévus) de la durée du dernier vol d'un spationaute français à bord de la station russe Mir, en 1999.

Le rêve d'une expédition vers Mars

L'homme dans l'espace, pour quoi faire ? Telle est, en fait, la question fondamentale. Les rêves d'antan sont loin d'avoir été atteints. En 37 ans de vols habités, moins de 400 personnes sont allées dans l'espace et les puissances spatiales se comptent sur les doigts des deux mains. Les chemins de l'espace restent difficiles et coûteux. Bien des retombées escomptées naguère – telles les usines spatiales – n'ont pas quitté le domaine de l'utopie.