Les cours d'eau, dans lesquels on prélève ce qui est nécessaire pour alimenter de très nombreuses villes, sont eux-mêmes pollués au point que leur faune et leur flore sont très appauvries. Le Rhin, par exemple, transportait jusqu'en mer du Nord, au début des années 80, 1 100 000 tonnes de chlorures, 3 500 de phosphates, 450 de cuivre, 10 de cadmium... Le saumon, pour ne citer que cette espèce, avait disparu des eaux rhénanes (il y a réapparu en 1996 après que les 5 pays riverains ont pris, en 1987, des mesures draconiennes). La pollution par les pesticides ne cesse de s'aggraver tant dans les pays industriels que dans les pays tropicaux, où l'utilisation des insecticides et des fongicides croît au rythme des productions d'exportation vers les pays riches (café, cacao, fruits et fleurs). En France, où plus de 100 000 tonnes de pesticides sont utilisés chaque année, des enquêtes ont révélé la présence, dans les eaux distribuées dans plusieurs villes, de lindane, d'atrazine et même d'haloformes provenant de la chloration de l'eau lors de son traitement.

Affectant les eaux fluviales, la pollution atteint, par voie de conséquence, les eaux marines côtières où est concentré l'essentiel des ressources marines renouvelables mais non illimitées.

Ces eaux, où sont pratiquées la pêche, l'ostréiculture, la mytiliculture ou l'aquaculture, comme les littoraux, où se développent les activités portuaires, industrielles, balnéaires et touristiques, sont donc menacés. La fréquence des intoxications des parcs à huîtres et des bassins mytilicoles par la salmonelle ou la dinophysis, les marées vertes en Bretagne ou en Vénétie, la qualité médiocre des eaux de baignade sont les preuves les plus manifestes de la dégradation des milieux aquatiques (sans parler des marées noires).

La production d'eau potable à partir des eaux naturelles insuffisamment pures ou d'eaux polluées implique donc la gestion, le suivi permanent et le traitement de la ressource eau de façon à fournir aux consommateurs un produit conforme à des normes de qualité de plus en plus exigeantes.

Le traitement des eaux

Compte tenu du nombre des substances et des micro-organismes présents dans les eaux superficielles d'où est tirée l'eau destinée à la consommation, il est aisé d'imaginer la somme de compétences et de technicité à mettre en œuvre pour produire l'eau alimentaire. Traiter les eaux consiste à maîtriser les éléments qu'elles contiennent pour les rendre propres à la consommation ou à tout autre usage que l'on souhaite en faire, et pour rejeter finalement dans le milieu naturel des eaux usées en partie épurées.

Une eau potable doit correspondre à des normes bactériologiques, physiques, chimiques et radiologiques ainsi qu'à des critères organoleptiques (l'eau doit être incolore, inodore, insipide) stricts édictés par l'Organisation mondiale de la santé et précisés par les services de santé nationaux. Les eaux captées, soumises préalablement à un suivi analytique, subissent une série de traitements d'épuration et d'affinage permettant d'extraire, de détruire ou de modifier les corps qu'elles contiennent. Les stations d'épuration des eaux captées, encore insuffisamment nombreuses dans les pays industriels et très rares dans les pays du tiers-monde, réalisent à peu de chose près les mêmes traitements : coagulation et floculation, décantation, flottation et filtration, désinfection, ozonation et désodorisation (élimination des facteurs de dureté).

Dans les pays dépourvus de ressources en eau, c'est-à-dire les pays désertiques à façade océanique, l'eau alimentaire est obtenue par dessalement de l'eau de mer, technique simple mais très onéreuse. La capacité de ces unités de dessalement varie entre quelques centaines et 30 000 à 40 000 m3/jour. Les eaux usées doivent être, elles aussi, épurées avant d'être rejetées. Les eaux usées sont ainsi soumises à des traitements variés comme le dégrillage, la décantation, le lagunage, la filtration, la nitrification, la chloration, l'ozonation, autant d'opérations qui permettent d'éliminer aussi bien les matières en suspension que les matières organiques ou certains produits chimiques plus ou moins toxiques.

Le prix de l'eau

« L'eau du robinet » a été extraite du sous-sol, d'une rivière ou d'un lac, artificiel ou non, transportée jusqu'à la station d'épuration, traitée dans celle-ci puis acheminée chez le consommateur. Rien d'étonnant donc à ce que son prix soit élevé et ne cesse d'augmenter (d'autant qu'il inclut le traitement après utilisation). En France, il varie d'une région à l'autre, d'une ville à l'autre ; le prix moyen du mètre cube est actuellement de 10 F. Au prix de revient s'ajoutent les diverses redevances (d'assainissement, communale, de puisage, de pollution, de solidarité, départementale) et la TVA. Les 6 Agences de bassin sont des établissements publics chargés de la gestion rationnelle des ressources ; elles accordent des prêts et des subventions pour la réalisation d'ouvrages améliorant la qualité des eaux et perçoivent des redevances (la redevance de la pollution) auprès des usagers. Elles ne se substituent pas aux maîtres d'œuvre que sont l'État, les collectivités locales et les sociétés privées. Si, en France, l'eau du robinet est globalement bonne, les consommateurs sont de plus en plus enclins à boire de l'eau de source ou de l'eau minérale, dont le prix, courant 1997, se situe entre 1,37 et 4,52 F le litre, soit entre 1 370 et 4 520 F le mètre cube...

Une ressource à partager

Le réseau hydrographique de certains grands fleuves draine parfois tout ou partie du territoire de plusieurs États, qui sont condamnés à s'entendre pour gérer ce bien commun et développer la pêche, la navigation ou la production d'énergie tout en respectant l'environnement. C'est ainsi que des organisations inter-étatiques ont vu le jour au cours de ces trois dernières décennies. En Afrique de l'Ouest par exemple, l'OMVS (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal), qui regroupe le Sénégal, le Mali et la Mauritanie, a déjà réalisé le barrage de Manantali, barrage hydroélectrique et régulateur de débit, et le barrage de Diama, destiné à stopper la remontée des eaux mannes dans la basse vallée. En Asie du Sud-Est, le Viêt Nam, le Laos, le Cambodge et la Thaïlande, 4 des 6 États riverains du Mékong, ont, en janvier 1995, ratifié un accord sur l'exploitation de ce fleuve de 4 180 km.