Asie du Sud-Est

En Asie du Sud-Est, la tendance est au règlement des situations conflictuelles et au développement des échanges. L'admission du Viêt Nam dans l'ASEAN élargit la « zone de paix » initiale jusqu'aux frontières d'une Chine dont les prétentions territoriales commencent à poser la question de la sécurité dans la région.

Birmanie

De bonnes perspectives de croissance économique conduisent le régime militaire birman à fournir un effort décisif pour en finir avec les insurrections armées et l'isolement diplomatique dont il fait l'objet. La signature d'un contrat de livraison de gaz naturel à la Thaïlande rend en outre indispensable le rétablissement de la sécurité à la frontière des deux pays.

Depuis dix-huit mois, le SLORC (State Law and Order Restoration Council, la junte au pouvoir) avait conclu des cessez-le-feu avec une douzaine de mouvements insurgés, et il avait engagé, fin 1994, de difficiles pourparlers avec les Karens, dont la rébellion, dans l'est du pays, dure depuis 1949. En janvier, une dissidence bouddhiste au sein du mouvement karen fournit à l'état-major de l'armée une occasion d'asséner à la KNU (Karen National Union) un coup fatal. Profitant de la saison sèche, il lance une offensive et parvient à s'emparer rapidement de Manerplaw, le QG de la KNU depuis vingt et un ans, puis de Kawmoora, dernier bastion des rebelles, qui sont plusieurs milliers à se réfugier en Thaïlande. En mars, les Karens déposent les armes à Loikaw (dans l'État kayah). Enfin, en juin, le groupe ethnique des Môns est le quinzième (sur 16) à accepter la négociation. L'offensive contre les Chans de Khun Sa remporte moins de succès. Le maintien futur de ces cessez-le-feu dépend maintenant de la mise en œuvre des autonomies promises.

Tout en s'engageant dans un vaste programme de réformes économiques, le SLORC poursuit lentement la réorganisation politique du pays. Depuis janvier 1993, une grande convention tente d'élaborer une Constitution fondée sur la « réconciliation nationale », que le SLORC appelle de ses vœux. En mars, des prisonniers politiques, tels que le général Tin U, sont libérés. En juillet, l'armée libère sans condition Aung San Suu Kyi, opposante en liberté surveillée depuis dix ans, sur qui s'était focalisée l'attention mondiale, et dont la libération conditionnait toute aide étrangère. Aung San Suu Kyi avait dit, en janvier, vouloir « contribuer à l'établissement d'un véritable système démocratique » en Birmanie. Le seul moyen, selon elle, de parvenir à une réconciliation nationale était « un dialogue fructueux entre les diverses forces politiques ». Libérée, elle invite ses partisans à la patience, seuls de lents progrès pouvant conduire à des compromis durables. En effet, l'élaboration de la Constitution va encore demander des mois. Considérant que les solutions aux problèmes birmans sont du ressort de la convention, l'armée ne veut pas négocier avec Aung San Suu Kyi.

Sur le plan économique, le blocus américain est un échec, les Asiatiques (Chine, Taïwan, Singapour, etc.) s'étant empressés d'investir, notamment dans le commerce et l'hôtellerie. La rénovation de Rangoon commence, et près de 3 milliards de dollars d'investissements sont annoncés.

Chrono. : 23/01, 10/07.

Thaïlande

Le gouvernement de coalition formé en septembre 1992 par le leader du Parti démocrate, Chuan Leekpai, obtient une révision démocratique de la Constitution de 1991 (abaissement de l'âge électoral de 20 à 18 ans, réduction à deux tiers de la proportion de militaires dans la Chambre basse), mais il ne survit pas à la défection du parti Palang Dharma qui lui fait perdre la confiance de l'Assemblée. En précisant qu'il ne serait pas candidat à sa succession, Chuan Leekpai dissout l'Assemblée en mai. Aux élections du 2 juillet, le Parti démocrate est battu par le parti de la Nation thaïe (Chart Thai), dont le leader, Banharn Silpa-Archa, est appelé par le roi pour former un nouveau gouvernement ; il s'appuie sur une coalition comprenant sept partis.

La croissance économique se maintient en 1995 au même taux qu'en 1994 (environ 8,5 %). Souhaitant augmenter ses ressources énergétiques, la Thaïlande conclut avec la Birmanie un accord de 30 ans lui assurant le bénéfice du gaz naturel du golfe de Martaban mais qui nécessitera la construction d'un gazoduc à travers le Tenasserim. Les rapports avec la Birmanie sont cependant compliqués par le nouvel afflux de réfugiés karens, chassés par l'offensive militaire de Rangoon. En avril, à Chiang Rai, un accord est conclu avec le Laos, le Cambodge et le Viêt Nam sur la future utilisation des eaux du bassin du moyen Mékong.