En 1950, le Championnat du monde de formule 1 voit le jour. Fangio a déjà trente-neuf ans, l'âge où les pilotes remisent aujourd'hui leur casque. Fangio remporte trois Grands Prix sur six, mais il est devancé de trois points au classement final par l'Italien Giuseppe Farina. En 1951, au volant d'une Alfa Romeo, il enlève son premier titre. Il est déjà le « Maestro ». La finesse de son pilotage, son exceptionnel coup d'œil, son inaltérable sang-froid font l'admiration de tous. Son visage d'aigle fascine les femmes. Blessé en 1952, battu par Ascari en 53, il triomphe de nouveau en 54, 55, 56 et 57. Cette année-là, au volant d'une modeste Maserati, Fangio multiplie les exploits. Sur le circuit du Nürburgring, après une course d'anthologie, il remporte le Grand Prix d'Allemagne. Un ultime succès, qui lui offre son cinquième titre de champion du monde. « J'ai fait des choses que je n'avais jamais tentées au volant et que pour un empire je ne voudrais recommencer », déclare-t-il à l'issue de la course. À quarante-sept ans, il met un terme à sa carrière. Le mythe Fangio prend forme. Tous les grands pilotes, de Clark à Lauda, de Prost à Senna, ont toujours vu en lui leur maître à piloter. Ayrton Senna confiait un jour : « Fangio est le plus grand. Pour toujours. »

Laurent Jalabert

« Jaja » est grand ! Nouvelle divinité du vélo en bleu, blanc et rouge, Laurent Jalabert est le successeur tant attendu des « Poupou » et autres « Blaireau ». Le sauveur du cyclisme français. Un cyclisme en mal de champions, qui, ces dernières années, a fait fuir les sponsors, bailleurs de fonds de ces équipes qui transcendent les efforts solitaires. À 27 ans, Laurent Jalabert a redonné, cette saison, des couleurs vives au camp tricolore. Il a remporté une bonne vingtaine d'épreuves, classiques d'un jour, courses à étapes et même un grand Tour. Pêle-mêle : Milan-San-Remo, la Flèche Wallonne, Paris-Nice, et, last but not least, la Vuelta (Tour d'Espagne).

Cette riche année 1995, le Tarnais de Mazamet l'a d'abord vécue comme une résurrection. Une revanche sur ce fichu sort qui, le 3 juillet 1994, le fait chuter à Armentières, à l'arrivée d'une étape du Tour de France. Lancé à 70 km/h, il heurta un panneau publicitaire à cause d'un policier paparazzi qui tentait d'immortaliser sur une pellicule le sprint final du peloton. Laurent Jalabert, sérieusement blessé, dut mettre un terme à sa saison beaucoup plus tôt que prévu. Après un mois de convalescence, il reprend l'entraînement, comme un forcené, sur les conseils de son entraîneur et mentor Manolo Sainz.

Manolo Sainz, directeur sportif de l'équipe espagnole Once, repère son protégé en 1991. Professionnel depuis deux saisons, Jalabert ne parvient pas à percer au sein de la formation Toshiba, avec laquelle il se classe treize fois 2e et se forge une réputation de bon sprinteur (et de jeune Poulidor), mais ne remporte aucune victoire probante. Manolo Saiz devine pourtant chez lui de réelles qualités de rouleur. Il l'engage donc, sans se ruiner car les « seigneurs » du peloton ne prédisent aucun avenir à son protégé, et lui apprend à souffrir sur un vélo. Sérieux et discipliné, Laurent Jalabert devient un galérien de l'entraînement. Ce travail de longue haleine finira par payer, en 1995.

Volant enfin de succès en victoires, Laurent Jalabert a le triomphe modeste. « Je suis encore en-dessous de certains coureurs, mais en travaillant encore je pourrai arriver à leur niveau », disait-il au soir de l'arrivée du Tour de France, qu'il a terminé en 4e position. Modeste, le Mazamétain ne manque pas pour autant de panache. Il l'a amplement démontré dans le Tour d'Espagne, le 14 septembre, au sommet de la sierra Nevada. Après avoir rejoint dans les derniers lacets l'Allemand Bert Dietz, auteur d'une échappée solitaire au long cours, Laurent Jalabert a encouragé son infortuné adversaire qui semblait à la dérive. Plutôt que de souffler la victoire à ce coureur, qu'il ne connaissait pas mais qui venait d'accomplir un authentique exploit en solo, et d'empocher une sixième victoire d'étape dans la Vuelta, le Français a préféré le « porter » jusqu'à la ligne d'arrivée, se contentant de la deuxième place. Il est comme ça, Jaja !

Jonah Lomu

Physiquement, Jonah Lomu est un véritable phénomène. Dans l'équipe néo-zélandaise de rugby, finaliste de la Coupe du monde, il était le plus lourd : 118 kilos. Mais il était aussi le plus rapide. Ce jeune homme de vingt ans court le 100 mètres en 10 secondes et 7 dixièmes. C'est cet alliage explosif de puissance et de vélocité qui fait de Jonah Lomu un joueur hors normes, un décathlonien du rugby. Meilleur marqueur d'essais de la Coupe du monde (sept en cinq matchs), cet employé de banque originaire des îles Tonga a débuté en équipe nationale en 1994 contre la France, à l'âge de dix-neuf ans, devenant ainsi le plus jeune joueur à porter le célèbre maillot des All Blacks. À cette occasion, il n'avait pas convaincu. Mais les dirigeants néo-zélandais ne pouvaient pas se passer d'un tel potentiel. Après avoir hésité à le faire jouer deuxième ou troisième ligne, ils ont donc placé Jonah Lomu à l'aile. « Des joueurs de ce gabarit, j'en ai vu beaucoup dans ma vie, explique Colin Meads, la manager néo-zélandaise, mais aucun ne jouait à l'aile. »