Fer de lance de l'activité spatiale européenne, la fusée Ariane 4 a confirmé en 1995 sa fiabilité avec une cadence élevée de lancements, jamais atteinte auparavant. Au total, 11 lancements, tous réussis, ont permis de placer en orbite 15 satellites : principalement des satellites commerciaux de télécommunications, mais aussi ERS 2, deuxième satellite européen de télédétection par radar ; Helios 1A, premier satellite d'un programme d'observation spatiale militaire conduit par la France, l'Italie et l'Espagne ; et ISO, observatoire spatial infrarouge européen.

On attendait pour la fin de l'année le premier vol du nouveau lanceur Ariane 5, destiné à préserver la compétitivité de l'Europe, à la fin du siècle, pour la mise en orbite de satellites (tout particulièrement, de satellites de télécommunications) tout en lui autorisant l'accès aux vols habités. Des difficultés rencontrées lors des essais de l'étage principal cryotechnique et des problèmes de logiciels au Centre spatial de Kourou ont cependant conduit à différer ce vol inaugural à la fin avril 1996.

La déception causée par ce retard est toutefois compensée par la satisfaction que provoque le succès de la conférence ayant réuni à Toulouse, du 18 au 20 octobre, les ministres en charge de l'espace dans les 14 États membres de l'Agence spatiale européenne. Après trois ans d'atermoiements, et au prix de divers compromis entre la France, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni, les Européens décident enfin de participer au projet de station spatiale internationale. Ils fourniront un module-laboratoire habité (COF) et un véhicule de transfert orbital automatique (ATV). Ils engageront également des études en vue de la construction éventuelle d'une capsule balistique de transport d'équipages (CTV). Les ministres ont aussi approuvé un programme en trois volets destiné à adapter le lanceur Ariane 5 à l'évolution des besoins de ses utilisateurs ainsi qu'à maintenir et consolider sa compétitivité et sa fiabilité. Enfin, ils ont entériné la poursuite du programme scientifique.

ISO, explorateur du ciel infrarouge

Lancé de Kourou le 17 novembre par une fusée Ariane, et placé sur une orbite très allongée de 1 000 km de périgée et 70 000 km d'apogée qu'il parcourt en 24 h, le satellite européen ISO (Infrared Space Observatory) vient renforcer la panoplie des outils spatiaux utilisés par les astronomes. Équipé d'un télescope de 60 cm de diamètre, refroidi par un cryostat rempli de 2 100 litres d'hélium superfluide, à − 271 °C de température, il emporte quatre instruments (une caméra, un photomètre et deux spectromètres) qui doivent lui permettre d'explorer avec une précision et une sensibilité sans précédent le ciel dans l'infrarouge, sur une gamme de longueurs d'onde s'étendant de 2,5 à 250 μm. Les astronomes en attendent une moisson d'informations nouvelles sur les objets froids du système solaire (astéroïdes, comètes, planètes lointaines et leurs satellites), les étoiles en formation dissimulées dans des cocons opaques de gaz et de poussières, les disques de poussières entourant certaines étoiles et regardés comme des précurseurs de systèmes planétaires, ou encore les galaxies infrarouges ultralumineuses.

Philippe de La Cotardière et Jean-Pierre Penot, Dictionnaire de l'espace, Éd. Larousse, 1995.

Philippe de La Cotardière