Journal de l'année Édition 1995 1995Éd. 1995

Sur le plan national, le Paris-Saint-Germain a conquis son deuxième titre de champion. Très réguliers tout au long de la saison, les Parisiens devancent de 8 points l'Olympique de Marseille, plongé dans la tourmente de l'affaire VA/OM. Empoisonnée par ce scandale, cette saison a singulièrement manqué de suspense.

La boucle est bouclée. En 1979, c'est à l'occasion de la Coupe de France que l'on découvre l'AJ Auxerre, alors en deuxième division. Les Bourguignons atteignent la finale, qu'ils perdent contre Nantes (4-1). Quinze ans plus tard, les Auxerrois remportent cette coupe aux dépens de Montpellier, accrochant ainsi à leur palmarès un premier titre national.

VA/OM. Le Conseil fédéral de la FFF, réuni le 23 avril à Paris, a conclu qu'il y avait eu tentative de corruption avant le match Valenciennes-OM du 20 mai 1993. Il a donc pris les décisions suivantes, selon les termes de son communiqué :
– concernant Bernard Tapie : retrait de sa licence de dirigeant et interdiction de se voir délivrer une licence lui permettant d'exercer une fonction officielle dans le football français (NDR : une sanction qui, dans les faits, n'aura eu aucun effet. Tapie ne dirigeant plus le club en 2e division) ;
– concernant Jean-Pierre Bernès : ne pourra prétendre à vie à la délivrance d'une licence lui permettant d'exercer une fonction officielle dans le football français (NDR : Bernès a, depuis, démissionné de l'OM) ;
– concernant les joueurs Burruchaga, Eydelie, Robert (NDR : déjà suspendus) : levée de l'interdiction de licence FFF au 1er juillet 1996 [...] ;
– concernant l'Olympique de Marseille : rétrogradation en 2e division pour la saison 94-95, mais maintien de son classement à l'issue de la saison 93-94 [...] (NDR : le « mais » a son importance, car il a permis à l'OM de disputer la Coupe de l'UEFA 94-95).

Champion de France : Paris-Saint-Germain.

Vainqueur de la Coupe de France : AJ Auxerre.

Qualifiés pour la Coupe de l'UEFA : Marseille, Bordeaux, Nantes et Cannes.

Rétrogrades en 2e division : Marseille, Toulouse et Angers.

Accèdent en 1re division : Rennes, Nice et Bastia.

Coupes d'Europe

Coupe des champions

Finale (Athènes, 18 mai) : Milan AC (It.) b. Barcelone (E.) 4-0.

Coupe des coupes

Finale (Copenhague, 4 mai) : Arsenal (Angl.) b. Parme (It.) 1-0.

Coupe de l'UEFA

Finale aller (5 mai) : Inter Milan (It.) b. Austria Salzbourg (Aut.) 1-0.

Finale retour (11 mai) : Inter Milan b. Austria Salzbourg 1-0.

Coupe de France

Finale (Parc des Princes, 14 mai) : AJ Auxerre b. Montpellier 3-0.

Les matchs de l'équipe de France

16 février (Naples) : France b. Italie 1-0 (amical).

22 mars (Lyon) : France b. Chili 3-1 (amical).

26 mai (Kobé) : France b. Australie 1-0 (Kirin Cup).

29 mai (Tokyo) : France b. Japon 4-1 (Kirin Cup).

17 août (Bordeaux) : France et République tchèque 2-2 (amical).

7 septembre (Bratislava) : Slovaquie et France 0-0 (Championnat d'Europe).

8 octobre (Saint-Étienne) : France et Roumanie 0-0 (Championnat d'Europe).

16 novembre (Zabrze) : Pologne et France 0-0.

Football
Coupe du monde
(17 juin-17 juillet)

D'aucuns étaient perplexes. D'autres, franchement inquiets. Pour la première fois de l'histoire, une Coupe du monde se déroulait dans un pays où le football est très largement méconnu du grand public et totalement absent des médias. Les doutes ont été vite balayés. Les sceptiques avaient tort. Cette 15e Coupe du monde fut un grand succès sportif et populaire. 3,5 millions de spectateurs et 2 milliards de téléspectateurs ont assisté au 4e sacre du Brésil, au surprenant parcours des Suédois et des Bulgares, au renouveau du jeu offensif, à la disgrâce du dieu Maradona. Et tous ont appris avec stupeur l'assassinat du défenseur colombien Andres Escobar.

Le 22 juin au Rose Bowl de Pasadena, près de Los Angeles, ce joueur de 26 ans marque un but contre son camp lors du match contre les États-Unis. La Colombie s'incline alors 2-0. Présentée comme l'une des candidates au titre, elle est éliminée dès le premier tour. 10 jours plus tard, le 2 juillet, Escobar, de retour au pays, est assassiné à la sortie d'un restaurant de Medellín. Pour expliquer ce geste, on a parlé de la mainmise des cartels sur le football, des sommes énormes engagées par certains parieurs sur les résultats de la sélection colombienne, de la violence routinière que connaît ce pays. Quoi qu'il en soit, Andres Escobar est bien malgré lui mort en martyr pour une simple maladresse.

« Brasil ! Brasil ! »

24 ans que le Brésil attendait cela : un 4e titre de champion du monde. Depuis sa victoire en 1970 à Mexico contre l'Italie, la sélection brésilienne avait accumulé échecs et frustrations lors des 5 Coupes du monde suivantes, laissant le grand rival argentin collectionner les succès. Aux États-Unis, les « jaune et bleu » ont reconquis le monde. Sortis premiers de leur groupe à l'issue du premier tour, les Brésiliens ont disposé successivement des États-Unis (1-0), des Pays-Bas (3-2), de la Suède (1-0) et, en finale, de l'Italie (0-0 puis 3 tirs aux buts à 2). Le Brésil a vaincu sans vraiment séduire. Le nouveau quadruple champion du monde laissera dans les esprits une image mitigée. L'équipe de 1970, celle de Pelé, Gerson, Jaïrzino, était entièrement tournée vers l'offensive. Celle de 1994 a d'abord valu par sa défense de fer, la meilleure du tournoi (seulement 3 buts encaissés en 7 matchs). L'organisation tactique très rigoureuse et parfois frileuse imposée par l'entraîneur Carlos Alberto Parreira a été vivement critiquée, mais elle s'est avérée payante. Aux yeux des millions de supporters brésiliens, l'ivresse du titre a fait oublier l'absence de magie du jeu brésilien. Les coups de patte des deux attaquants Romario et Bebeto (8 buts à eux deux) ont suffi à aligner les victoires (6 en 7 matchs) et à éviter le moindre revers.

Décevant Final

Pour la première fois dans l'histoire du football, une finale de Coupe du monde s'est jouée aux tirs aux buts. Brésiliens et Italiens ont offert au Rose Bowl de Pasadena un spectacle sans saveur. Crispés par l'enjeu, fatigués par un mois de compétition, usés par la chaleur, les finalistes ont d'abord pensé à ne pas perdre. Après 120 minutes d'un combat stérile, la loterie des tirs aux buts a fait office de juge de paix. L'ironie du sort a voulu que ce soit Roberto Baggio (auteur de 4 buts décisifs en huitièmes, en quarts et en demi-finale) qui ait manqué le tir au but décisif. 3 mois après la disparition tragique d'Ayrton Senna, le peuple brésilien retrouvait le goût de la fête.

L'Europe en force

Le Brésil fut la seule équipe à résister à la domination des Européens. 7 des 8 quart-de-finalistes venaient du Vieux Continent. Une mention pour la sélection suédoise et pour l'équipe bulgare, tombeuses des Français en éliminatoires, surprenants demi-finalistes et battus de peu à ce stade de la compétition. Les Suédois ont séduit par leur jeu direct et offensif (15 buts en 7 matchs). Les Bulgares ont su réagir après un départ catastrophique (défaits 3-0 par le Nigeria). Jouant sans complexe, les coéquipiers de Hristo Stoïchov ont réussi l'exploit de dominer, à New York, l'Allemagne, tenante du titre, en quarts de finale, 2 buts à 1. La Bulgarie, qui présentait la particularité de n'avoir jamais gagné le moindre match en phase finale de Coupe du monde, éliminait logiquement une équipe allemande vieillissante. Depuis 1978, l'Allemagne avait toujours atteint au moins les demi-finales de l'épreuve. Quant aux Roumains, au football chatoyant et offensif, ils ont longtemps fait figure d'outsiders sérieux avant de tomber à la suite des tirs aux buts en quarts de finale contre la Suède. Aux États-Unis, le football européen s'est montré sous son meilleur jour.

Une mention pour l'Asie

Le Nigeria, champion d'Afrique en titre, a sauvé l'honneur de son continent. Sortis premiers du groupe D, les « Super Eagles » ont été éliminés après prolongations par l'Italie 2 buts à 1, après avoir mené 1 à 0. Mais le football nigérian a pris date pour l'avenir. Le Cameroun, miné par des rivalités internes, et malgré la présence du « sorcier » Roger Milla, a beaucoup déçu. À l'instar d'une équipe marocaine trop tendre. Les équipes asiatiques en revanche ont agréablement surpris. Les Sud-Coréens ont frôlé la qualification et les Saoudiens, très doués techniquement, ont atteint les huitièmes de finale. Il faudra compter avec l'Asie dans les prochaines années.

Triste épilogue

Cette Coupe du monde a eu son scandale : l'exclusion pour dopage de Diego Maradona, qui disputait sa 4e phase finale. Le coup de tonnerre s'est produit le 29 juin à Dallas. Contrôlé positif à l'éphédrine (produit couramment utilisé pour les traitements des sinusites mais placé sur la liste des produits interdits) à l'issue de la rencontre Argentine-Nigeria, Maradona quittait la compétition par la petite porte, celle de la disgrâce. En deux matchs contre la Grèce et le Nigeria, Maradona avait prouvé que, en dépit de ses 34 ans, de son inactivité, de ses kilos superflus, il n'avait rien perdu de son exceptionnel talent. Il avait inscrit un but splendide contre les Grecs. Tout le monde avait cru alors que le miracle de la résurrection se produirait. Réunie en septembre, la Fédération internationale suspendait le joueur argentin pour 15 mois. La carrière de Maradona, succession de triomphes et de gâchis, de rédemptions et de déchéances, a pris fin en pleine Coupe du monde, un événement qui aurait pu offrir au magicien un dernier titre de gloire. Déstabilisée par l'exclusion de son maître à jouer, l'équipe d'Argentine tombait en huitièmes de finale contre la Roumanie (3-2), au terme d'un des plus beaux matchs de cet été américain.

Les attaquants à l'honneur

Exception faite de la finale, cette Coupe du monde a consacré le retour en grâce du jeu offensif. En 52 matchs, on a inscrit 141 buts, soit une moyenne de 2,8 buts par match. On en était à 2,2 en Italie en 90, à 2,5 au Mexique en 86. Ce bilan très honorable doit beaucoup aux nouvelles règles imposées par la Fédération internationale. La victoire à 3 points lors du premier tour a libéré les esprits et débridé les matchs, le match nul n'étant plus un bon résultat. Toutes les équipes qualifiées pour les huitièmes de finale ont gagné au moins une rencontre, ce qui n'avait pas été le cas lors du Mondiale 90. La sévérité accrue à rencontre des tacles par derrière, sanctionnés immédiatement d'un carton jaune, parfois même d'un rouge, a porté ses fruits. Les attaquants ont pu mieux s'exprimer à l'abri des mauvais coups. Pas étonnant, dès lors, que ce soient des joueurs à vocation offensive, Romario, Baggio, Hagi, Dahlin, Klinsmann, qui ont enflammé la compétition.

Bilan doré, avenir incertain

Les États-Unis ont réussi leur Coupe du monde. L'organisation s'est avérée sans faille. Sur le plan sportif, l'équipe nationale a passé le premier tour à l'énergie avant de tomber contre le Brésil, avec les honneurs, en huitièmes de finale (1-0). Ce 4 juillet, jour de la fête de l'Indépendance, 8 millions de foyers ont suivi le match à la télévision. Un chiffre remarquable qui prouve que les Américains n'ont pas été indifférents à l'événement. Avec 3,5 millions de spectateurs payants, soit une moyenne d'environ 68 000 par match, cette World Cup a crevé tous les plafonds (2,5 millions de spectateurs avaient assisté au Mondiale 90). Les minorités italienne, irlandaise, grecque, hispanique, comme prévu, ont répondu présentes. Mais, au-delà de ce public « attendu », de nombreux Américains ont découvert les charmes du « soccer » avec une certaine naïveté. D'où une ambiance parfois inédite dans les stades. Plus proche de la kermesse que de la grand-messe à l'européenne. Sans passion excessive. Résultat : pas le moindre incident à l'occasion des 52 matchs. La World Cup a certes retenu l'attention des Américains. De là à espérer l'organisation d'un championnat professionnel de football aux États-Unis, il y a un pas difficile à franchir. Les télévisions et les annonceurs, prépondérants dans le sport américain, ne sont pas enthousiastes. La concurrence (base-ball, basket, football américain) est féroce. Le soccer ne rentrera pas facilement dans l'univers sportif outre-Atlantique. Cette Coupe du monde a toutes les chances de n'être qu'une parenthèse dorée dans l'histoire du football aux États-Unis.