Lillehammer 94, XVIIes jeux Olympiques d'hiver

Un modèle du genre

Un succès qui réconcilie le sport et ses pratiquants, le champion et ses supporters. Inaugurant un nouveau rythme olympique (désormais, les JO d'été et d'hiver ont lieu en alternance tous les deux ans), ces XVIIes Jeux d'hiver ont sans conteste gagné une place de choix dans l'histoire centenaire de l'olympisme moderne.

Le secret de fabrication des Norvégiens ? La simplicité et la qualité. Simplicité, dans leur façon de vivre un tel événement. Ni strass ni paillettes, mais de l'authenticité. Authentique comme l'enthousiasme des 2 millions de Norvégiens (la moitié de la population du pays) qui, du 12 au 27 février, ont envahi les sites olympiques de Lillehammer. Une foule immense qui s'est illustrée par son inaltérable bonne humeur et son inébranlable fair-play, que ce soit au pied des pistes et des tremplins, le long du parcours des épreuves du très populaire ski de fond ou dans les gradins des différentes patinoires. Aucun doute, les spectateurs norvégiens ont été les véritables héros de ces Jeux.

Autre cachet estampillé « Lillehammer », la qualité. Une organisation de haut vol, un calendrier respecté à la lettre (et à la seconde) ont favorisé le bon déroulement des épreuves sportives. Qualité de vie également. Le comité d'organisation a affiché une volonté farouche de préserver l'environnement pour que les montagnes de la région de Lillehammer ne succombent pas sous le béton. Pas question, par exemple, de défigurer le paysage pour construire un tremplin de saut à ski ; la ligne de pente, à flanc de colline, a été religieusement respectée. Autre exemple, la patinoire de Gjovik, où s'est déroulé le tournoi de hockey sur glace, a été entièrement creusée sous une montagne. Des travaux herculéens certes, mais la Norvège en a fait un dogme : l'équipement sportif doit s'harmoniser avec la nature.

Les écologistes norvégiens ont collaboré étroitement avec le LOOC, le comité d'organisation de ces Jeux de Lillehammer. Du coup, à Hamar, l'anneau de patinage de vitesse a été déplacé pour protéger une réserve d'oiseaux. Inspiré par la popularité de ce genre de mesure, le Comité international olympique a pris le train en marche. Son président, Juan Antonio Samaranch, n'a pas manqué une occasion de saluer « les premiers Jeux blanc et vert ». Mieux, le CIO a sellé au galop son nouveau cheval de bataille, en laissant entendre aux futurs postulants à l'organisation des Jeux d'hiver que, dorénavant, l'écologie devrait occuper autre chose qu'un simple alinéa dans les dossiers de candidature.

Lillehammer 1994

Située à 180 km au nord de la capitale norvégienne, Lillehammer (petite ville de 23 000 habitants) a accueilli, du 12 au 27 février, 1 900 athlètes représentant 66 nations.

Lillehammer 2010

Au nom d'une saine gestion des équipements, les élus de Lillehammer envisagent sérieusement de postuler à l'organisation des Jeux d'hiver de 2010. Juan Antonio Samaranch en personne leur a déjà demandé de se porter candidats. Le président du Comité international olympique s'est dit très impressionné par ces XVIIes jeux Olympiques d'hiver, les « plus beaux de tous » selon lui.

Une patinoire sous la montagne

Les épreuves de hockey sur glace se sont déroulées à 55 mètres sous terre. La patinoire de Gjovik a été creusée à la dynamite dans la roche d'une montagne vieille de 1,5 million d'années et il a fallu 29 000 camions pour extraire les 420 000 tonnes de granit de la montagne. Cela en fait un ouvrage de génie civil unique au monde.

Écologie, mode d'emploi

Durant la quinzaine olympique, 70 % des 10 tonnes d'ordures collectées chaque jour ont été recyclées. Pour lutter contre la pollution, les habitants de Lillehammer n'ont utilisé leur voiture que la nuit. Les douilles des balles tirées dans les épreuves de biathlon ont été ramassées pour ne pas souiller la nature. Même la flamme olympique brûlait à l'éthanol.

Samaranch à Sarajevo

Le CIO a placé ces Jeux sous le signe de la solidarité avec Sarajevo, ville martyre en 1994, ville olympique 10 ans auparavant. Le président du CIO s'est même rendu dans la capitale bosniaque pendant les Jeux de Lillehammer. Le Comité international olympique a, par ailleurs, appelé à une trêve olympique dans tous les pays en guerre.

Pour les Norvégiens, l'écologie n'a donc pas de prix. Mais elle a un coût

Et le label vert vaut cher. À titre indicatif, l'anneau de vitesse de Hamar, qui a préservé un parc ornithologique protégé, a finalement coûté 292 millions de couronnes (233 millions de francs). Le montant de la facture totale de Lillehammer 94 s'élève à 5,6 milliards de francs, soit 2 milliards de plus que les Jeux d'Albertville, lesquels s'étaient soldés en 1992 par un déficit de 285 millions de francs.