Menés par le tandem formé de M. Ichiro Ozawa, ancien bras droit de Shin Kanemaru, et M. Tsutomu Hata, ancien ministre des Finances, devenu par la suite le chef de la diplomatie dans le cabinet Hosokawa, une quarantaine de membres du PLD brandissant l'étendard de la réforme (ce qui, étant donné leur appartenance au clan le plus corrompu du PLD, ne manque pas de sel) votèrent, le 18 juin, une motion de censure déposée par les socialistes. Ils formèrent par la suite le parti de la renaissance. Mis en minorité, le Premier ministre Miyazawa décidait de dissoudre le Parlement et d'appeler des élections anticipées.

Cette consultation fut marquée par la progression d'une petite formation conservatrice, le nouveau parti du Japon, dont le président était l'ancien gouverneur de la préfecture de Kumamoto, Moritomo Hosokawa, descendant d'une grande famille aristocratique : il obtint 35 sièges. Propulsé en position d'arbitre du jeu politique, M. Hosokawa put briguer sans l'avoir vraiment cherché le poste de Premier ministre.

Il ne faut pas attendre des réorientations drastiques d'un cabinet qui repose sur un équilibre de forces trop fragile pour pouvoir prendre des grandes décisions. Le gouvernement s'est donné jusqu'à la fin de l'année pour réaliser ce qui semble être sa tâche primordiale : faire adopter par le Parlement une réforme du système électoral par la création de circonscriptions plus petites avec un seul siège à pourvoir. Une fois cette réforme adoptée, il est vraisemblable que seront convoquées de nouvelles élections.

Le scandale le plus retentissant : celui auquel est mêlée l'entreprise de transport rapide Sagawa Kyubin ; il révèle une fois de plus la collusion du monde politique non seulement avec les milieux d'affaires, mais aussi les éléments les plus interlopes de la société. L'une des figures mises en cause est M. Shin Kanemaru, « parrain » du PLD et grand arbitre des dessous de la politique. Son arrestation, en mars, pour fraude fiscale, affaiblit le cabinet Miyazawa, auquel on reprochait, en outre, son indécision.

Relations diplomatiques

L'arrivée au pouvoir du cabinet Hosokawa a surtout été marquée par une déclaration controversée du Premier ministre, au cours de sa conférence de presse initiale, sur la responsabilité du Japon dans la guerre et le caractère « agressif » de celle-ci. Propos qui suscitèrent des protestations du camp conservateur et que M. Hosokawa a nuancés par la suite. Dans son discours de politique générale prononcé devant le Parlement le 23 août, le Premier ministre exprima cependant clairement les remords du Japon pour son « agression ».

L'activité diplomatique du Japon au cours de l'année écoulée n'en a pas moins été placée sous le signe de la continuité. Mais deux évolutions sont sensibles : tout d'abord, une accentuation du recentrage de la politique étrangère nipponne sur l'Asie et un assouplissement de la position de Tokyo à l'égard de la Russie.

Les Kouriles

La visite, en octobre, du président russe Boris Eltsine au Japon n'a guère fait avancer le dossier épineux du contentieux territorial qui bloque la passation d'un traité de paix entre les deux pays : les quatre îles du sud de l'archipel des Kouriles, occupées par l'URSS à la fin de la guerre et revendiquées par les Japonais. Alors que le Japon avait fait du règlement de cette question une condition préalable à l'accroissement de son aide à la Russie, il a été contraint, sous la pression de ses partenaires, d'assouplir sa position. En avril, il admettait implicitement (car officiellement la position de Tokyo demeure inchangée) qu'il ne ferait plus dépendre son assistance de la résolution du contentieux territorial. Au cours de la visite de M. Eltsine, Tokyo n'a pris aucun engagement supplémentaire en matière d'aide (au total 5 milliards de dollars, dont 10 % seulement avaient été versés).

Recentrage

Si les visées politiques (stabilité de la région) sont claires, les facteurs économiques jouent également un rôle déterminant dans ce recentrage du Japon en direction de l'Asie. Le taux de croissance de la région est le double de celui des pays de l'OCDE et, à la fin de cette décennie, le produit national brut de cette région représentera un tiers du PNB mondial : elle pèsera donc d'un poids égal à celui des États-Unis et de l'Europe. Or, le Japon est entré dans une phase de son histoire économique où il a non seulement un besoin impérieux de délocaliser sa production, mais encore de participer plus activement à des synergies de croissance : il parie sur les marchés en expansion de l'Asie.