Égypte

L'intensification des attentats islamistes

Explosions sur des sites touristiques, assassinats de policiers, affrontements violents entre forces de l'ordre et islamistes jalonnent l'année 1993. Fin février, une bombe a explosé dans un café du centre du Caire, faisant quatre morts, dont trois touristes ; l'attentat contre le World Trade Center à New York, quelques jours plus tard, est attribué à des extrémistes de la Jamaa Islamiya, l'un des principaux groupes islamistes égyptiens...

La multiplication de ces violences a des conséquences catastrophiques sur le tourisme, qui fait vivre plus de dix millions de personnes, rapportant 3 milliards de dollars par an, et 40 % des devises étrangères du pays : les recettes touristiques ont chuté en douze mois de 1,3 milliard de dollars, et le chiffre d'affaires de près de 40 %.

Le bon élève du FMI (Fonds monétaire international).

Le FMI a approuvé en octobre un accord en faveur de l'Égypte qui autorise ce pays à emprunter jusqu'à l'équivalent de 569 millions de dollars, au cours de la période de trois ans qui s'achèvera fin septembre 1996. Cet accord sanctionne les progrès économiques enregistrés aussi bien en ce qui concerne l'inflation, qui est passée de 20 % à 12 %, que le déficit budgétaire, qui devrait s'élever à 3,5 % du PIB cette année contre 18 % précédemment.

Durcissement des autorités

Devant cette montée du terrorisme islamiste, le gouvernement riposte par une répression sans merci. En mars, les autorités ouvrent ainsi une série de procès, tout en déclenchant de gigantesques rafles au Caire et en Haute-Égypte, au prix d'affrontements violents et meurtriers, tant pour les intégristes que pour les forces de l'ordre. Le président Hosni Moubarak parle de « guerre totale ».

En mai, les premiers condamnés à mort par la Haute Cour militaire sont exécutés. Il s'agit des premières exécutions politiques en Égypte depuis la pendaison des assassins d'Anouar el-Sadate. Ces pendaisons, une quinzaine au total, marquent la volonté du gouvernement de couper les extrémistes les plus convaincus de leur base, plus hésitante. Mais la détermination du noyau dur des islamistes ne faiblit pas ; elle est même renforcée par l'accord de paix israélo-palestinien du 13 septembre, dénoncé comme le fruit d'un « complot sionisto-croisé-athée ». Plus que jamais, leur objectif reste d'instaurer une république islamiste.

Ce climat de violence contribue à bloquer le système politique, puisque, si l'Égypte est théoriquement un régime démocratique, l'alternance et le dialogue politiques semblent difficiles (d'autant que tout candidat à la présidence doit être parrainé par au moins un tiers des députés, qui sont actuellement 80 % à appartenir à une unique formation, le Parti national démocrate du président Hosni Moubarak). Aussi, le 4 octobre, celui-ci, unique candidat à sa propre succession, a été reconduit pour la troisième fois à la tête de l'État, par un plébiscite (96,28 % des voix). Cette élection renforce le pouvoir et souligne la victoire au sein de l'équipe dirigeante de la « ligne dure », hostile à toute négociation avec les islamistes.

Hosni Moubarak, le président égyptien, déclare en avril 1993 : « Il n'y a besoin de beaucoup de monde pour créer de l'agitation. En Égypte, il n'y a eu que quarante ou cinquante incidents. Mais cela a suffi pour que les médias en fassent toute une histoire et donnent l'impression que l'Égypte était en flammes. Ce qui n'était pas vrai. »

Droits de l'homme

Middle East Watch (MEW), l'organisation américaine de défense des droits de l'homme, demande le 31 juillet aux pays occidentaux de « condamner publiquement » les procès « iniques » d'islamistes devant des tribunaux militaires : le gouvernement égyptien « est engagé dans une pratique de violations flagrantes des droits de l'homme ».

Olivier da Lage