Journal de l'année Édition 1994 1994Éd. 1994

Politique régionale

L'histoire dira si 1993 aura été une année marquante, voire faste, pour l'aménagement du territoire et si le 30e anniversaire de la création de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) mérite une pierre blanche. En tout cas, on peut, sans risque de se tromper, parler d'une relance vigoureuse, tant dans les symboles et le vocabulaire que dans les faits.

Le délégué à l'Aménagement du territoire, Jean-Pierre Duport, a été remplacé début septembre par Pierre-Henri Paillet, ingénieur des Ponts et Chaussées, qui était membre du cabinet de Charles Pasqua, ministre d'État, ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire. Pierre-Henri Paillet est par ailleurs conseiller municipal d'Hennebont (Morbihan). Jean-Pierre Duport, administrateur civil, a été nommé à la mi-octobre préfet de la Seine-Saint-Denis.

Innovations

Le changement de gouvernement, au printemps, fait apparaître plusieurs innovations. Pour la première fois, la tutelle des collectivités locales est regroupée avec la charge ministérielle de l'aménagement du territoire. C'était une vieille (et logique) revendication des plus ardents militants du développement régional, car, de nos jours, dix ans après le lancement de la décentralisation, les villes, départements et Régions sont devenus des acteurs économiques essentiels, gérant des budgets considérables. Dans beaucoup de domaines, et notamment en ce qui concerne les grands équipements – TGV, ports, zones d'activités, opérations de restructuration urbaine –, l'État ne peut espérer mener à bien un projet s'il n'a pas l'assurance du concours d'un ou de plusieurs de ces partenaires. Voilà donc Charles Pasqua, de surcroît ministre d'État, responsable des deux volets de la dimension géographique et prospective de l'activité gouvernementale. Et pour bien montrer l'importance de la fonction, Édouard Balladur lui adjoint un ministre délégué, Daniel Hoeffel. Tous deux sont, au moment de leur nomination, sénateurs, issus donc de ce qu'on appelle encore le « grand Conseil des communes de France » et aussi, ce qui a son importance, présidents d'un conseil général (les Hauts-de-Seine pour le premier, le Bas-Rhin pour le second). Ce sont donc des élus locaux fortement ancrés dans le terrain, qui sauront de quoi ils parlent et qui pourront être très vite opérationnels.

À s'en tenir à la seule configuration gouvernementale, quelle rupture par rapport au dernier gouvernement socialiste, c'est-à-dire celui de Pierre Bérégovoy, dans lequel un secrétaire d'État à l'Aménagement, André Laignel (qui a fait, du reste, ce qu'il a pu avec des moyens et une autorité limités), était rattaché – on se demande au nom de quelle logique... – au ministère de l'Industrie et du Commerce extérieur !

Côté finances, le projet de budget 1994 fait apparaître une forte progression des crédits puisque les autorisations de programme atteignent 2,64 milliards de francs contre 2,42 en 1993, la hausse des crédits de paiement étant encore plus significative.

Le Comité interministériel du 12 juillet a décidé que les villes de Mende, Aurillac et Rodez pourraient, avec l'aide de l'État, créer un « réseau de villes ». Il s'agit, dans cette zone défavorisée, d'essayer de mettre en place des « interactions » et de renforcer ces pôles qui peuvent constituer des barrières au dépeuplement accéléré du Massif central. Trois villes associées sont mieux armées que chacune prise isolément.

Un commissariat à l'aménagement et au développement des plateaux de l'Est est créé à Bar-le-Duc. Son territoire d'intervention est constitué des parties rurales fragiles des Régions Champagne-Ardenne et Lorraine, et des départements de Haute-Saône et de Côte-d'Or.

Priorité

L'aménagement du territoire tient, depuis qu'Édouard Balladur s'est installé à Matignon, une place de choix dans les discours gouvernementaux. C'est une « priorité officielle », un « grand projet », une « ambition majeure », un « dessein mobilisateur », une façon de « redonner espoir ». La DATAR doit se considérer comme un « commando ».