Journal de l'année Édition 1993 1993Éd. 1993

Les fruits de cette politique ont été engrangés en 1992 sur les chiffres du commerce extérieur. Sur les neuf premiers mois de l'année, l'excédent atteignait 23 milliards de francs, contre 32 milliards de francs de déficit sur la même période de 1991. Ce redressement spectaculaire a tiré la croissance française : pimpantes, les exportations ont compensé l'atonie de la consommation et la chute de l'investissement industriel (– 11 % sur un an).

TDR

En juillet, Pierre Bérégovoy écarte le projet d'instauration d'une taxe départementale sur le revenu. Les députés socialistes avaient imposé au gouvernement Cresson cette réforme qui, par souci de justice sociale, tendait à asseoir davantage la taxe d'habitation sur le revenu des contribuables.

PEA

Lancé le 1er septembre, le plan d'épargne en actions a pour mission d'orienter une partie de l'épargne vers le secteur productif, et notamment d'atténuer l'attrait des sicav monétaires, produits à très court terme qui cannibalisaient peu à peu tous les autres placements depuis cinq ans.

Exportations

La part de marché de la France dans les exportations européennes est passée de 15,5 % en 1987 à 17 % en 1992. Depuis deux ans, les exportations tirent les deux tiers de la croissance nationale.

Le franc fort est le corollaire d'une telle politique de désinflation compétitive : une dévaluation du franc, en renchérissant le prix des exportations, risquerait en effet de relancer l'inflation. Cette politique du franc fort oblige la France à maintenir des taux d'intérêts supérieurs à ceux que pratique l'Allemagne. À défaut, les capitaux franchiraient le Rhin, et le franc serait affaibli. Le problème, c'est que, si l'Allemagne a actuellement besoin de les maintenir à des niveaux élevés, pour lutter contre ses tensions inflationnistes, ce n'est pas le cas de la France, qui cherche au contraire à soulager ses entreprises et à les encourager à investir. Au cours du débat sur le traité de Maastricht, de nombreuses voix, à gauche (Jean-Pierre Chevènement) comme à droite (Philippe Séguin), se sont donc élevées pour réclamer l'abandon de cette politique. Le gouvernement n'a pas écouté ces sirènes, au contraire.

Il a continué à défendre bec et ongles la parité du franc, surtout au plus fort de la tempête monétaire qui a accompagné le référendum de septembre 1992. Malgré la sortie de la livre et de la lire du système monétaire européen, malgré la dévaluation de la peseta, la Banque de France, aidée par la Bundesbank allemande, n'a pas cédé. Elle a engagé 160 milliards de francs dans la bataille, et elle n'a pas hésité à relever provisoirement les taux d'intérêts qu'elle accorde au jour le jour, afin de décourager les spéculateurs d'emprunter des francs en vue de les vendre. Une fois la bataille gagnée, la Banque de France s'est offert le luxe de baisser à deux reprises ses taux d'intérêts directeurs d'un quart de point.

La désinflation compétitive, le mark et les politiques budgétaires en Europe. Groupe international de politiques économiques de l'OFCE, Seuil, 160 p.

Pascal Riché
Journaliste économique à Libération