Ce développement très rapide présente cependant des risques. Outre la surchauffe de l'économie, le Viêt Nam redécouvre en effet les disparités régionales et ses vieux démons de l'époque capitaliste (drogue, prostitution, corruption). Les différences de niveau de vie entre Hanoi, la capitale administrative du Nord, et Hô Chi Minh-Ville (ex-Saigon), au sud, sont particulièrement frappantes.

Retour diplomatique

Est-ce par volonté de débloquer l'aide internationale, ou afin de contrecarrer la politique de plus en plus agressive de la Chine sur les îles Spratly ? Toujours est-il que le Viêt Nam multiplie cette année les gestes d'ouverture en direction de Washington. Après la réhabilitation internationale consécutive au retrait des troupes vietnamiennes du Cambodge en septembre 1989 et à la signature des accords de Paris mettant (sur le papier) fin à ce conflit en octobre 1991, les autorités vietnamiennes se sont montrées plus réceptives aux questions de Washington concernant le sort des 2 265 MIA (« missing in action »), les soldats américains « disparus au combat » pendant la guerre du Viêt Nam. Cette question reste en effet la principale pierre d'achoppement des relations vietnamo-américaines. Au niveau régional, Hanoi a pu accéder cette année au statut d'observateur dans le cadre de l'ASEAN (Association du Sud-Est asiatique), un forum que le gouvernement vietnamien tend à privilégier en raison du durcissement de ses relations avec son voisin, la Chine. Les deux frères ennemis, qui s'étaient réconciliés en novembre 1991 après douze ans de brouille, ont, cette année, développé une nouvelle discorde à propos des îles Spratleys.

Verrouillage

Le Viêt Nam adopte en avril une nouvelle Constitution accordant davantage de latitude au gouvernement et au Parlement. Il est prévu l'élection d'une Assemblée nationale chargée d'élire en son sein un chef d'État, doté d'un mandat de cinq ans. Chef des forces armées, ce chef de l'exécutif aura également la responsabilité de nommer le Premier ministre.

L'élection de la nouvelle assemblée a lieu le 19 juillet ; elle est marquée par un profond renouvellement des parlementaires. Toutefois, sur les quarante candidats « indépendants » (non-membres du Parti communiste), deux seulement se sont effectivement présentés, et il n'y a pas eu de campagne électorale.

Le 24 septembre, conformément aux nouveaux textes, l'Assemblée désigne le général Le Duc Anh à la tête de l'État. Ce dernier reconduit Vo Van Kiet au poste de Premier ministre. Pour la première fois, un représentant d'une minorité ethnique, Nong Duc Manh, est élu président de l'Assemblée. Mais il ne s'agissait pas à proprement parler d'« élections », les trois hommes ayant été préalablement désignés par le Parti à ces postes... La plupart des observateurs considèrent que l'élection de Le Duc Anh à la tête de l'État ne se traduira par aucune amélioration de la situation politique, toujours bloquée dans le carcan d'un régime communiste monopartite.

Chrono. : 20/01, 3/03, 22/03, 23/04, 17/05, 10/06, 1/08, 13/09, 23/09, 26/09.

Caroline Puel