De nouveaux concurrents sont apparus ; les transports se sont fortement développés ; les tarifs douaniers ont baissé et les produits, comme les consommateurs eux-mêmes, se sont homogénéisés.

Avec de tels changements, les firmes industrielles ont été amenées dans un premier temps, pour réduire les coûts de production, à articuler leur processus de fabrication sur plusieurs pays (cas des industries à fort coefficient de main-d'œuvre qui ont délocalisé leur production dans des pays à salaires bas ou modérés). Dans un second temps, les firmes ont dû adopter une « autre stratégie, mondiale ou globale, consistant à saisir immédiatement le marché ou l'industrie dans sa totalité planétaire » (C.A. Michalet). Dans ces conditions, la firme globale a été conduite à se concentrer sur un nombre limité de produits où elle détient un avantage compétitif qui lui garantit une « niche » dans le marché mondial. Pour ce type de situation où le marché mondial sert d'emblée de référence, les stratégies progressives d'implantation pays par pays ont dû être abandonnées et remplacées par des stratégies de choix d'un secteur à développer ; une fois la décision prise, la firme qui est la première à occuper ce secteur devra veiller à ce qu'aucun concurrent ne veuille se jeter dessus à son tour. À cette fin, elle cherchera à renforcer sa position initiale par l'élimination (rachat, absorption) de l'adversaire potentiel.

La stratégie française

Face à ce défi d'un type tout à fait nouveau, les firmes industrielles françaises, tout en conservant leurs attaches nationales, ont suivi deux voies non exclusives l'une de l'autre ou les ont combinées à des degrés divers. D'un côté, elles cherchent à vendre à l'étranger une fraction de plus en plus importante de leur production nationale : c'est la voie de l'exportation. D'un autre côté, elles produisent, par des filiales créées ou rachetées dans d'autres pays : c'est la solution de la délocalisation. Entre ces deux voies extrêmes, il existe évidemment des variantes, comme la stratégie d'intégration internationale. En ce qui concerne les firmes industrielles françaises, l'observation montre qu'elles ont su très bien jouer, puisque la présence d'un grand nombre d'entre elles est notée dans la plupart des pays industrialisés (à l'exception du Japon) et aussi dans les nouveaux dragons du Sud-Est asiatique.

Gilbert Rullière