C'est avec les mêmes hésitations qu'au cours de l'été le Japon a réagi au putsch de Moscou. En revanche, il entend faire sentir davantage son poids dans les négociations de paix au Cambodge : en devenant le plus gros bailleur de fonds de la reconstruction, le Japon s'apprête en effet à effectuer son retour politique en Indochine et dans toute la région.

En décembre, le débat parlementaire sur le projet de loi relatif à l'envoi de contingents japonais à l'étranger dans le cadre de missions de paix sous l'égide des Nations unies (dont la première application a été précisément le Cambodge) avait pour objectif de modifier de manière substantielle la position du Japon sur la scène internationale et de lui permettre de jouer un rôle plus actif dans le maintien de la sécurité mondiale. Cette loi a suscité une vive opposition de la part des partis de gauche qui la jugent contraire à la Constitution et qui ont tout fait pour bloquer son adoption.

Sur le plan intérieur, l'année 1991 aura été marquée par le départ de Mme Takako Doï, charismatique présidente du parti socialiste, mais affaiblie par les revers électoraux de son parti et par l'éviction de M. Toshiki Kaifu dont on pensait encore, quelques semaines avant le terme de son mandat, qu'il serait maintenu dans ses fonctions. Ses mentors au sein du Parti conservateur en ont décidé autrement. Il a été remplacé, fin octobre, par M. Kiichi Miyazawa, l'un des hommes forts du Parti conservateur, qui devrait être en meilleure position que son prédécesseur pour gouverner. En tout cas, sa nomination clôt une période anormale de fonctionnement du pouvoir au cours de laquelle les « caciques » conservateurs avaient été paralysés par des scandales.

L'une des préoccupations majeures du nouveau Premier ministre est la situation économique. Après cinq ans de croissance ininterrompue, qui s'est traduite par une augmentation annuelle moyenne de 6 % du produit national brut, des signes d'essoufflement ont commencé à se faire sentir : l'économie souffre notamment d'une politique de restriction du crédit qui vise à dégonfler la « bulle financière » alimentée par les spéculations immobilières et boursières de ces dernières années.

Le monde des affaires japonais aura surtout été secoué par les scandales financiers qui ont défrayé la chronique pendant l'été. Ces affaires ont abouti à des sanctions prononcées à l'encontre des grandes maisons de titres coupables d'avoir dédommagé leurs gros clients des pertes qu'ils avaient subies à la Bourse. En outre, certaines de ces sociétés, comme d'ailleurs quelques banques prestigieuses, ont été mêlées à de sombres tractations avec la mafia. Le ministre des Finances du cabinet Kaifu, M. Hashimoto, dont le ministère avait fait pour le moins preuve de laxisme à l'égard des maisons de titres, a donc présenté sa démission en octobre.

Philippe Pons

Océanie/Pacifique

Consécutive à l'évolution de l'Union soviétique, la détente a produit ses effets dans le Pacifique comme dans le reste du monde.

Le dispositif stratégique des deux supergrands a été sensiblement réduit, notamment en Asie du Sud-Est, où l'évacuation prévue des forces américaines des Philippines a répondu au repli des nombreux « conseillers » soviétiques du Viêt-nam. Cependant, face à une Corée du Nord soupçonnée de vouloir se doter de l'arme nucléaire, les Américains ont maintenu l'essentiel de leur dispositif militaire en Asie du Nord-Est.

Une certaine détente

Pour le Japon, s'est par ailleurs posé, à l'occasion de la guerre du Golfe, le problème de l'accroissement d'une puissance militaire susceptible d'être déployée hors de l'Archipel. La Constitution imposée par les Américains après la défaite nippone interdisant toute forme de remilitarisation, une telle évolution ne peut être que prudente, d'autant plus qu'elle soulève l'opposition d'une partie de l'opinion intérieure, ainsi que celle des pays qui furent, naguère, les victimes du militarisme japonais, la Chine et la Corée principalement. Cependant, et très habilement, M. Toshiki Kaifu, Premier ministre jusqu'à son remplacement par M. Kiichi Miyazawa en octobre, a réussi à faire envoyer des dragueurs de mines dans le Golfe pour y protéger les intérêts japonais, étroitement dépendants de la sûreté de leurs approvisionnements pétroliers.