Le point sur...

Chine et Corées

Encore une année de normalisation en Chine, deux ans après la répression du mouvement démocratique du second Printemps de Pékin, en 1989.

L'immobilisme politique n'aura guère été remis en cause, en dépit de la guerre du Golfe et de l'effondrement de l'empire soviétique, marqué, en août, par l'échec de la tentative, à Moscou, d'un putsch dont les dirigeants de Pékin s'étaient réjouis un peu vite. Au contraire, la disparition de pans entiers du bloc communiste, réduits à ses quatre membres asiatiques et à Cuba, aura plutôt renforcé leur intransigeance. Alors que s'accentuait le décalage entre les progrès économiques et la stagnation politique, les arrestations et les condamnations de dissidents, la dénonciation des « ingérences » occidentales dans les affaires des droits de l'homme se sont multipliées dans un pays qui se dit l'ultime bastion du communisme, depuis la « grande muraille de fer » idéologique jusqu'au « dernier rempart » de la pensée de Mao Zedong pour protéger la Chine contre les « complots impérialistes occidentaux ».

La forteresse assiégée

La question des droits de l'homme a continué d'empoisonner les relations sino-occidentales. La série de procès de dissidents du Printemps de Pékin au début de l'année – les peines s'étalant de quatre ans pour le dirigeant étudiant Wang Dan à treize pour Wang Juntao et Chen Ziming –, la grève de la faim de ces derniers pour protester contre d'exécrables conditions de détention, les protestations étrangères et l'envoi de missions d'enquête se sont succédé. Tout comme les dénonciations, par les États-Unis, de l'utilisation de détenus dans des usines produisant pour l'exportation.

Deux autres sources de conflit se sont ajoutées à celui sur les droits de l'homme : les différends commerciaux, en particulier avec les États-Unis, et les libertés prises par la Chine avec la non-prolifération nucléaire et balistique. Après avoir longtemps défendu le maintien de relations quasi normales avec Pékin, le président Bush a été contraint de tenir compte du ressentiment du Congrès devant l'accroissement considérable de l'excédent commercial chinois. Dépassement des quotas textiles, refus d'ouverture du marché chinois aux produits américains sont les principaux reproches de Washington, bien entendu démentis par Pékin.

En août, recevant son homologue japonais de l'époque, M. Toshiki Kaifu, le Premier ministre Li Peng avait annoncé que la Chine avait décidé de ratifier le traité de non-prolifération nucléaire (TNP). En octobre, le comité permanent du Parlement repoussait sa décision sous prétexte de demander des éclaircissements au gouvernement. Finalement, la ratification devrait intervenir en 1992. Toutefois, cette valse-hésitation n'a pas rassuré ceux qui s'inquiètent des ventes de centrales nucléaires à des pays comme l'Iran, l'Algérie ou la Syrie, et des exportations de missiles vers le Pakistan ou des pays du Proche-Orient.

Volonté de s'affirmer contre les pays occidentaux d'un régime frappé du complexe de la forteresse assiégée depuis qu'il a mis fin à sa politique de libéralisation politique avec l'écrasement du Printemps de Pékin ? Mais, sans doute, et surtout, désir de se tailler une niche dans un marché fructueux pour accroître les rentrées de devises, et incapacité du pouvoir central à contrôler ses fabricants d'armes, liés à la « nomenklatura » et à l'armée.

Malgré cela, 1991 aura vu le retour de la Chine dans l'arène internationale avec les premières visites de responsables politiques occidentaux à Pékin. Ce fut d'abord, en avril, le chef de la diplomatie britannique, Douglas Hurd, venu discuter l'avenir de Hongkong, puis son homologue français Roland Dumas. Après la visite, en août, de M. Kaifu, James Baker s'est rendu en novembre en Chine, où il a eu des discussions difficiles avec ses interlocuteurs, en particulier sur les droits de l'homme et les différends commerciaux. Enfin, 1991 aura marqué le quarantième anniversaire de la « libération pacifique » du Tibet par l'armée chinoise. Un anniversaire qui n'aura pas empêché le dalaï-lama de poursuivre sa croisade internationale pour l'autodétermination pacifique du Toit du monde.

La Corée au singulier ?

Quatre décennies après la guerre de Corée, les deux États qui se partagent la péninsule sont parvenus, le vendredi 13 décembre 1991, à un accord « historique » mettant officiellement fin à une longue période de tension qui faisait peser sur la péninsule un risque d'explosion permanent. Réunis à Séoul, les Premiers ministres des régimes rivaux – le Nord communiste et le Sud pro-occidental – ont signé un « accord de réconciliation, non-agression, échange et coopération ». Il ne s'agit certes pas d'une normalisation, mais du début d'un nouveau processus, qui risque néanmoins d'être long et délicat.