Journal de l'année Édition 1991 1991Éd. 1991

Le point sur...

Europe orientale

Si presque tous les anciens dirigeants communistes ont dû abandonner le pouvoir en Europe orientale, seulement quatre pays de l'Est sur huit connaissent une libéralisation bien fragile, et la situation économique de tous demeure très souvent dramatique. En effet, depuis le 12 septembre 1989, date à laquelle Tadeusz Mazowiecki a constitué en Pologne le premier gouvernement non communiste de l'Est, les régimes fidèles au marxisme se sont effondrés les uns après les autres.

À Varsovie, ce résultat a été le fruit d'un compromis entre le général Jaruzelski et le syndicat Solidarité. L'élection présidentielle du 25 novembre a opposé le Premier ministre Mazowiecki à M. Lech Walesa et à un nouveau venu, l'homme d'affaires Stanislaw Timinski. Le Premier ministre a été éliminé au premier tour et a démissionné. M. Walesa, qui avait obtenu 39,96 % des voix, a été élu au second tour avec 74,25 % des suffrages.

Dans trois autres pays, les communistes ont perdu le pouvoir à la suite d'élections. Vainqueur le 18 mars en RDA, le chrétien-démocrate Lothar de Maizière est devenu le 12 avril chef d'un gouvernement de coalition. En Hongrie, après le succès de sa formation, le Forum démocratique, le 8 avril, M. Joseph Antall a obtenu l'investiture du Parlement le 23 mai. En Tchécoslovaquie, le scrutin législatif des 8 et 9 juin a été largement dominé par le Forum civique de M. Vaclav Havel, qui a ensuite été réélu président de la République le 5 juillet.

Les communistes ou les anciens communistes ont pu se maintenir au pouvoir dans trois États. En Roumanie, depuis l'échec de la révolution de décembre 1989 et le double succès du Front de salut national aux élections présidentielles et législatives du 20 mai, M. Ion Iliescu maintient un système qui a de nombreux points de ressemblance avec le régime déchu. En Bulgarie, les communistes, qui se présentaient sous un nouveau label, ont conservé de justesse la majorité lors des législatives du 10 juin, mais un représentant de l'opposition, M. Jeliou Jelev, a été élu chef de l'État le 2 août.

Enfin, dans le dernier pays totalement stalinien d'Europe − l'Albanie –, M. Ramiz Alia a entamé de timides réformes. Et, en juillet, grâce au soutien de l'ONU, 4 500 Albanais, qui s'étaient réfugiés dans les ambassades européennes à Tirana, ont pu quitter leur pays.

Aider l'Est

La Yougoslavie semble plus que jamais menacée d'éclatement. Si un communiste détient toujours la présidence fédérale tournante, une coalition d'opposants gouverne en Slovénie depuis les législatives du 8 avril et, le 23 décembre, 88,2 % des électeurs inscrits se sont prononcés pour l'indépendance ; d'autre part, la droite nationaliste administre la Croatie depuis le scrutin du 7 mai. Opposés au nationalisme du président de la Serbie, M. Slobodan Milosevic, les nouveaux dirigeants de ces deux États du Nord sont entrés en conflit avec le pouvoir fédéral.

Les nationalismes resurgissent aussi avec force dans d'autres États. En Roumanie, un vif sentiment anti-hongrois s'est manifesté. Après l'expulsion de 310 000 habitants de souche turque en 1989, la décision du nouveau gouvernement bulgare de rétablir leurs droits (29 décembre 1989) a provoqué de vives manifestations. Enfin, en raison de l'agitation à Bratislava, le slovaque a été reconnu le 25 octobre comme langue officielle dans l'est de la Tchécoslovaquie.

Dans l'ensemble, la situation économique des pays de l'Europe orientale est encore plus mauvaise qu'en 1989 : il est, en effet, très difficile de passer de l'univers marxiste à un système fondé sur la loi du marché.

La Yougoslavie constitue un cas à part. Depuis le début de l'année, six mois de blocage des salaires et des prix et la création d'un nouveau dinar rattaché au mark allemand ont permis de ramener l'inflation mensuelle de 60 % à 6 %.

En Pologne, un traitement de choc, qui comprend la suppression des subventions et une forte dévaluation du zloty, a réduit le pouvoir d'achat de 50 %. En outre, à la fin novembre, le nombre de chômeurs a atteint le million. En revanche, en Hongrie, où les mécanismes du marché ont été introduits dès 1968, le changement est progressif ; si les sans-emploi sont peu nombreux, l'inflation atteint toutefois 30 %. L'économie de la Tchécoslovaquie a peu changé, car l'État possède toujours 99 % de l'appareil productif mais, en novembre, les autorités ont choisi une option ultralibérale, qui doit être mise en pratique à partir du 1er janvier 1991.