Le point sur...

Astronomie

S'ils consternent les astronomes, les déboires du télescope spatial Hubble ne les mettent pas pour autant au chômage. Bien d'autres instruments, au sol ou dans l'espace, leur ont fourni, en 1990, un lot appréciable d'énigmes et de découvertes.

Des bulles dans l'Univers ?

Après sa mise en orbite réussie autour de Vénus, le 10 août, la sonde américaine Magellan entreprend la cartographie radar de la planète. Les premières images obtenues comblent d'aise les spécialistes : montrant des détails au sol de 120 m seulement, elles révèlent de nombreux indices d'un volcanisme intense et récent ainsi qu'une série de plissements, de fractures et de failles suggérant que la croûte vénusienne a subi d'importants mouvements tectoniques.

En astrométrie, le satellite Hipparcos, dont la mission semblait très compromise après l'échec de sa mise en orbite géostationnaire, s'avère nettement plus performant qu'on ne l'escomptait. S'il peut être exploité pendant trois ans, il devrait fournir, avec la précision attendue, au prix d'une réduction des mesures plus complexe que prévu, la position, la parallaxe et le mouvement propre de quelque 120 000 étoiles.

En astronomie gamma, le télescope français Sigma, embarqué à bord du satellite soviétique Granat, lancé le 1er décembre 1989, fournit notamment des données nouvelles sur le cœur de la Voie lactée. Celles-ci semblent indiquer la présence d'un trou noir, non pas au centre même de notre galaxie, mais à quelque 300 années de lumière de ce centre, où se trouve une mystérieuse source de rayonnement gamma, très intense, dont la contrepartie optique reste à identifier. D'importants résultats sont obtenus aussi en astronomie X, grâce au satellite germano-britanno-américain Rosat, lancé le 1er juin. Celui-ci met en évidence le premier halo de poussières interstellaires jamais observé autour d'une étoile, Cygnus X2.

Depuis quelques années, les recherches concernant la structure à grande échelle de l'Univers s'intensifient. Une équipe britannique pense avoir mis en évidence une série de « murs de galaxies » régulièrement espacés d'environ 420 millions d'années de lumière. Certains chercheurs suggèrent que notre galaxie et ses voisines, compte tenu de leur mouvement dans l'espace, sont elles-mêmes sous l'emprise d'une énorme concentration de matière, le « Grand Attracteur », dont la masse ne représenterait pas moins de 30 millions de milliards de fois celle du Soleil. Cependant, toutes les tentatives pour mettre en évidence cette vaste structure sont jusqu'ici restées vaines et son existence même est très controversée.

Quoi qu'il en soit, les observations récentes semblent indiquer qu'à très grande échelle les galaxies se concentrent sur les parois de gigantesques « bulles » dont l'intérieur est pratiquement dépourvu de matière visible. La distribution de la matière dans l'Univers s'apparenterait en quelque sorte à celle que l'on observe dans la mousse de savon. Cette étonnante structure pose de redoutables problèmes aux théoriciens. Elle témoigne, en effet, d'une hétérogénéité difficile à concilier avec l'hypothèse d'un Univers primitivement homogène. Et, pourtant, les observations du satellite américain COBE (Cosmic Background Explorer), lancé le 19 novembre 1989, confortent plus que jamais la théorie du big-bang en confirmant que le rayonnement électromagnétique diffus considéré comme le vestige de la fournaise initiale est tout à fait isotrope et que son spectre (la distribution de l'énergie en fonction de la longueur d'onde) coïncide précisément avec celui du rayonnement thermique d'un corps noir à la température de 2,735 K.

Philippe de la Cotardière

Espace

Encore une année difficile pour la navette américaine, immobilisée au sol à plusieurs reprises pour des fuites d'hydrogène : six vols seulement ont eu lieu en 1990, contre neuf prévus. Aussi les satellites lancés par le Shuttle se comptent-ils sur les doigts d'une main : le satellite de télécommunications Syncom IV-F5 le 11 janvier ; le télescope spatial Hubble le 25 avril ; la sonde interplanétaire européenne Ulysse, destinée à l'étude des pôles du Soleil, le 6 octobre ; et deux gros satellites militaires de reconnaissance, respectivement en mars et en novembre. La première mission de l'année, avec Columbia, du 10 au 20 janvier (plus long vol effectué par une navette : 10 j et 20 h), a permis, en outre, de récupérer la plate-forme LDEF (Long Duration Exposure Facility), satellisée en 1985. L'ultime mission de l'année, avec Columbia, du 2 au 11 décembre, a marqué le 38e vol de navette et le 68e vol spatial humain réalisés par les États-Unis. Émaillée d'incidents, elle a dû être écourtée d'une journée.

Succès et revers divers

L'Europe, pour sa part, a lancé six fusées Ariane en 1990. La première Ariane 40, le 22 janvier, a placé, comme prévu, en orbite Spot 2, deuxième satellite français d'observation de la Terre. Mais, un mois plus tard, une Ariane 44L emportant deux satellites de télécommunications japonais a explosé en vol par suite d'une anomalie de fonctionnement d'un des moteurs du 1er étage. L'enquête a établi que cette défaillance a été provoquée par l'obstruction de la vanne du circuit d'eau du moteur par un morceau de tissu malencontreusement oublié lors d'une intervention. Cet échec est le cinquième enregistré par la fusée Ariane en 36 vols et le premier à affecter une Ariane 4. Les responsables du programme soulignent qu'il fait suite à dix-sept succès consécutifs ayant autorisé la mise en orbite de vingt-sept satellites. Après cinq mois d'interruption, les tirs ont repris pendant l'été et la fusée a renoué avec le succès : en quatre vols, elle a placé huit satellites de télécommunications en orbite (un français, TDF 2 ; un allemand ; un britannique ; un européen ; et quatre américains).