M. Mitterrand l'a encore affirmé, à Strasbourg, le 25 octobre : « L'Union économique et monétaire signifiera qu'un pas décisif aura été accompli en vue de l'objectif qu'il faut bien désigner, l'union politique de la Communauté. Raison de plus pour la vouloir et pour la faire. » Le président français prononçait alors un discours devant les parlementaires européens, avant même l'ouverture de la frontière entre les deux Allemagnes. Par la suite, sa conviction n'a fait que croître, la construction d'une Europe aux structures « plus solides » constituant, selon lui, la meilleure réaction que la CEE pourrait avoir face aux bouleversements dans les pays de l'Est.

L'inconnue reste la position qu'adoptera le gouvernement de Bonn lors du Conseil de décembre. L'Allemagne fédérale répondra-t-elle positivement à la proposition française d'entamer la conférence intergouvernementale avant la fin de 1990 ? Le chancelier Helmut Kohl se trouve dans une position délicate, d'une part en raison des élections législatives qui auront lieu le 11 décembre 1990 en Allemagne fédérale, et surtout du fait des changements intervenus en Allemagne de l'Est. L'ouverture de la frontière entre les deux Allemagnes signifie-t-elle que du jour au lendemain la population de la Communauté européenne s'est accrue de 16,7 millions d'habitants ? On n'en est sans doute pas encore là.

La cohésion de la communauté

À l'initiative de M. Mitterrand, les douze chefs d'État et de gouvernement se réunissent à l'Élysée, le 18 novembre, afin de définir une position commune face aux bouleversements que connaît l'Europe centrale et orientale : ils encouragent les mouvements de réforme et décident d'y contribuer, à condition que le retour à la démocratie soit effectif. Plus concrètement, ils se prononcent pour la création d'une banque d'aide aux pays de l'Est, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).

Par ailleurs, les Douze se mettent d'accord sur une déclaration prévoyant que le peuple allemand pourra « retrouver son unité à travers une libre autodétermination ». Ce droit ne pourra cependant s'exercer que « dans un contexte de dialogue et de coopération Est-Ouest » et « se situe dans la perspective de l'intégration communautaire »... Fin 1990, la cohésion de la Communauté semble indemne...

Petite chronique européenne...

En janvier, à la suite de l'adoption du rapport Prag (du nom d'un élu britannique) par les parlementaires, la « bataille du siège » a été lancée pour décider si, exceptionnellement, le Parlement européen pourrait se réunir à Bruxelles et non à Strasbourg, où jusqu'à présent ont eu lieu toutes les sessions...

Catherine Trautmann, élue en mars à la tête de la municipalité de la capitale alsacienne, a alors entrepris de conforter sa ville dans son rôle européen. Cette campagne a été soutenue par François Mitterrand, et c'est à Strasbourg que la réunion des douze chefs d'État ou de gouvernement (le Conseil européen) s'est tenue les 8 et 9 décembre sous la présidence de la France.

Les 15 et 18 juin, les 140 millions d'électeurs de la Communauté ont été appelés aux urnes afin de renouveler leurs 518 représentants au Parlement européen. Cette élection a peu mobilisé. Bien que le vote soit obligatoire dans certains États membres, le taux de participation ne s'est élevé, globalement, qu'à 58,5 %. La physionomie de l'hémicycle est sortie quelque peu modifiée des urnes. Le groupe socialiste a renforcé sa position de premier groupe de l'Assemblée et les écologistes ont effectué une « poussée » relativement importante.

Si la Communauté acquiert dans l'avenir un véritable statut politique sur la scène diplomatique, on retiendra peut-être alors la date du 8 juillet 1989 comme le point de départ d'une reconnaissance à l'échelle mondiale. Ce jour-là, les chefs d'État ou de gouvernement des sept pays les plus industrialisés se sont réunis en sommet, à Paris. La situation en Pologne et en Hongrie était en train d'évoluer et chacun convenait qu'il fallait les aider. Les Sept ont alors décidé de confier à la Commission européenne le soin de coordonner l'aide des nations occidentales à ces deux pays.