Par rapport à une moyenne nationale de 930 francs par habitant, l'effort de l'État va atteindre 2 100 francs en Corse (une région « ultra-prioritaire » au titre de l'aménagement du territoire et qui recevra en outre de volumineuses subventions de Bruxelles), 1 530 francs dans le Limousin, 1 340 francs en Lorraine. Certaines régions, dans leur contrat, ont mis l'accent sur la formation (par exemple le Poitou-Charentes et la Franche-Comté), d'autres sur la recherche (Languedoc-Roussillon), d'autres, enfin, sur l'enseignement supérieur (Auvergne). Certaines, comme la Bourgogne ou la Picardie, ont cherché à élaborer des programmes d'action concertés du territoire (PACT) pour prendre en compte les handicaps spécifiques de certaines zones rurales touchées par l'exode démographique ou la faiblesse de l'armature urbaine (Morvan, Bresse, Thiérache).

L'Île-de-France et le casse-tête des transports

Il faut faire un sort spécial au contrat de plan signé entre la Région Île-de-France, présidée par M. Pierre-Charles Krieg (RPR), et l'État, représenté par le préfet de Région, M. Olivier Philip. D'abord, parce que la plus importante Région de France par son poids démographique et économique a été la dernière à approuver définitivement l'opération, la signature n'étant intervenue que fin avril. Ensuite, les sommes en jeu sont non seulement considérables, mais dans un rapport inverse de celles des autres Régions.

Sur les 23 milliards à dépenser en 5 ans, 8,5 sont à la charge de l'État, mais 14,5 à la charge de la Région. L'État a voulu non seulement éviter que les contribuables de Bretagne ou du Massif central, à travers le budget national, ne payent pour les Franciliens, réputés « riches », mais que la Région elle-même fasse un effort exceptionnel sur son propre budget pour améliorer le cadre de vie de ses habitants. Sur les 23 milliards, la « part du lion » revient aux infrastructures de communication (18 milliards, dont 12 imputables aux finances régionales). Le contrat comporte aussi un volet relatif à l'enseignement supérieur. La Région prévoit 350 millions pour la création d'une université à Marne-la-Vallée, à condition que l'État accepte que la Région puisse récupérer la TVA sur les travaux de construction. Mais, jusqu'à maintenant, le fisc a dit « non ».

Fin octobre, après des mois de consultations et de préparatifs, Michel Rocard a levé un coin du voile sur ce qui, pendant au moins cinq ans, constituera le « grand chantier » de l'Île-de-France. Une première série de mesures a été prise, à propos de l'offre foncière, de l'accroissement du parc de logements sociaux, des transports en commun (projet Éole, entre la gare du Nord et la Défense via Saint-Lazare). Une taxe sur le stock de bureaux, privés et publics, a été décidée avec un montant modulable géographiquement. Le plan, destiné à accélérer les travaux d'amélioration du cadre de vie, a reçu un accueil mitigé de la part des élus d'Île-de-France. M. Charles Pasqua, président (RPR) du conseil général des Hauts-de-Seine, s'y est déclaré franchement hostile si c'est, pour l'État, l'occasion de reprendre aux collectivités locales des pouvoirs que leur ont conférés les lois de décentralisation depuis 1982.

La coopération européenne

M. Chérèque aurait voulu que, dans le cadre des contrats de plan, les Régions multiplient les opérations de coopération interrégionales, soit entre Régions françaises, soit au-delà des frontières de l'Hexagone. De ce point de vue, il a été déçu. Sans doute a-t-on vu fleurir les initiatives (accords entre le Nord-Pas-de-Calais et la Wallonie, convention de coopération économique entre la Catalogne et Midi-Pyrénées ou Languedoc-Roussillon, communauté de travail du Jura entre la Franche-Comté et quatre cantons suisses), mais jamais avec une programmation financière précise.

C'est pour inviter les autorités régionales à jouer avec davantage de détermination la carte de la coopération que la Commission (qui ne déteste pas d'entretenir des relations directes avec les régions des États membres en contournant si nécessaire, pour les besoins de la cause, les gouvernements) a arrêté une série de mesures fin novembre. Comme l'y autorise le nouveau règlement sur les fonds structurels, la Commission peut en effet décider d'elle-même des opérations qualifiées de « projets d'intérêt communautaire ».