En second lieu, précisément pour lutter contre l'inflation toujours menaçante, la Federal Reserve System n'a pas cherché à baisser son taux d'intérêt, ce qui a amené la Bundesbank, suivie par les autorités des autres pays européens et aussi du Japon, à relever ses taux d'escompte. La structure de ces taux se trouve alors inversée : en tentant de maîtriser le dollar, les banques centrales ont fait monter les taux à court terme au-dessus des taux à long terme, ce qui rend les prêts à long terme peu avantageux.

Cette inversion comporte deux risques : d'un côté, celui d'une fragilisation du marché des titres et d'une chute brutale des cours (cas du krach du 13 octobre) ; de l'autre, celui d'une récession économique avec baisse ultérieure du coût du crédit et incertitude sur les profits des entreprises.

Enfin, toujours aux États-Unis, la fragilité du marché financier a été aggravée par le lancement de nombreuses OPA géantes (Méga OPA), faisant appel, pour leur financement, à l'endettement, à travers les techniques de l'émission de « junk bonds » (obligations pourries) et du LBO (Leverage Buy Out, ou « rachat avec effet de levier »), qui permettent à des investisseurs de lancer des OPA à des prix bien supérieurs à ceux des cours de la Bourse et sur la totalité du capital, tout en n'apportant que très peu d'argent frais (10 à 15 %).

En effet, le financement de l'opération est assuré pour l'essentiel par le recours au LBO, pour 50 à 60 % environ des fonds, et aux junk bonds pour le reste. Dans un cas comme dans l'autre, il s'agit d'emprunts gagés sur les actifs de la société convoitée, souscrits auprès des banques à des taux d'intérêt élevés ou émis en obligations à des taux également très élevés. Ces emprunts couvrent des opérations à hauts risques, favorisant ainsi la spéculation sur les valeurs cotées en Bourse.

Gilbert Rullière

Investissements

La reprise de l'investissement productif, amorcé en 1985, se poursuit cette année, avec une croissance en volume de 7,1 % après 9,1 % en 1988. Tous les secteurs sont concernés (agriculture, commerce, services, bâtiment et travaux publics) mais l'industrie concurrentielle, avec une hausse de 8,9 %, connaît la progression la plus rapide. Ce sont surtout les grandes entreprises qui investissent. En revanche, les dépenses d'équipement des entreprises nationales stagnent.

La bonne conjoncture internationale (la reprise de l'investissement est générale), favorisée par une demande soutenue, et les profits accumulés ces dernières années par les entreprises expliquent ce dynamisme. Depuis 1988, les investissements de capacité ont repris, mais ils restent encore insuffisants comme en témoigne l'apparition de goulets d'étranglement dans certains secteurs en raison de taux d'utilisation très élevés (en moyenne 87 %, soit le niveau le plus élevé depuis le début des années 1980). Les investissements de modernisation et de renouvellement restent majoritaires. De même, les investissements immatériels indispensables à l'accroissement de la productivité se poursuivent. Enfin, les entreprises dopées par les profits et par la préparation du marché unique de 1993 multiplient les investissements financiers (placements spéculatifs, acquisitions, rachats, fusions, OPA) et développent les investissements français à l'étranger (+ 45 % en 1988 et probablement autant cette année) en vue d'atteindre la taille critique et la dimension mondiale nécessaires pour affronter la concurrence.

En France, le retard de l'investissement se maintient cependant ; l'État cherche donc toujours à l'encourager en allégeant les charges des entreprises et en favorisant l'épargne indispensable à son financement.

Dominique Colson

Entreprises

En 1989, les entreprises ont adopté une stratégie de recherche de la « taille critique », consistant à créer des unités productives parfois géantes, pouvant soutenir la concurrence tant nationale qu'internationale, et, en conséquence, à prendre des parts de marchés significatives. Pour parvenir à réaliser ces objectifs, elles ont continué à jouer le jeu des fusions et des acquisitions internationales.