Mais les metteurs en scène puisent surtout chez les auteurs modernes, tels Lorca, pour Jacques Nichet (la Savetière prodigieuse), ou François Billetdoux, pour Lucian Pintillé (Il faut passer par les nuages) au Théâtre de la Ville. Parmi les classiques, ont été remarqués le Cid, situé par Gérard Desarthe dans une Vienne austro-hongroise, et l'École des femmes monté par Marcel Maréchal à Marseille.

Les plus grands serviteurs du théâtre sont toujours les acteurs : François Périer fêtait ses 50 ans de métier avec Mort d'un commis voyageur d'Arthur Miller, mis en scène par Marcel Bluwal, et Jacques Dufilho faisait, avec Georges Wilson, le succès de Je ne suis pas Rappaport, au Théâtre de l'Œuvre. Michel Piccoli s'est prêté au romanesque du Conte d'hiver, et, en Avignon, Gérard Desarthe fut « Hamlet » ; tandis que Laurent Terzieff était fêté lors de la remise des « Molière » pour Ce que voit Fox de James Saunders.

Françoise Devillers

Musique

À vie politique agitée, vie musicale secouée. Les élections à répétition et la crise budgétaire ont non seulement animé le paysage institutionnel musical d'un véritable ballet de responsables dont les déplacements devenaient difficiles à suivre, mais ont fait également planer quelques menaces sur de vénérables établissements.

En effet, la poursuite de la politique des grands travaux crée de tels gouffres financiers que ces derniers, ajoutés à la cherté des spectacles en général, ont fini par entraîner la remise en cause de l'existence de la Salle Favart, ainsi que celle de la véritable vocation du Palais Garnier. De nouveaux statuts juridiques, administratifs et financiers les ont sauvés, reconduisant l'une dans le rôle qui a toujours été le sien et vouant l'autre à la danse ; tous les deux ont été placés sous la direction de Pierre Bergé.

En revanche, jamais répertoire ne fut aussi varié. La septième Fête de la musique a vu l'entrée en masse de musiques extra-européennes, grâce à la Maison des cultures du monde, tandis que les programmations officielles accueillaient force découvertes, résurrections et exhumations : Katia Kabanova et De la maison des morts de Leos Janacek ; Adélaïde de Bourgogne de Rossini et la Naissance de l aurore d'Albinoni (révélés durant le premier festival de Paris). Malgré un cycle Weber au TMP et un show Beethoven proposé à Bercy par Lorin Maazel, les deux points forts de l'année restent l'art lyrique et la musique du xxe siècle. En attestent la présence d'Olivier Messiaen (dont on célèbre le 80e anniversaire) au Festival estival, celle de Pierre Boulez, pour la première fois en Avignon, et, enfin, celle de K. H. Stockhausen au festival d'Automne, où il dirigeait la création française de Montag aus Licht. Le Palais Garnier a assuré le succès de la Célestine de M. Ohana, et Montpellier celui de Noces de sang de C. Chaynes. Mais la France ne réhabilite-t-elle pas, par maintes manifestations, la création artistique des années 50 ? Un pont a été jeté.

Catherine Michaud-Pradeilles

Variétés

À défaut de soleil, le printemps n'a pas manqué de chaleur. L'habituel déferlement de la chanson anglo-saxonne s'est achevé en beauté avec l'arrivée aux beaux jours de quelques géants américains.

Tout a commencé avec Sting, présent à Paris dès le 4 juin. Suivirent : le « boss » Springsteen et son nouveau spectacle Tunnel of love ; le sorcier Michael Jackson, puis le « démon lover » Prince, inaugurant une tournée baptisée Lovesexy. Mais le plus marquant restait à vivre : le retour en force des Pink Floyd. Magie recomposée du rock planant, avec laser et fumigènes.

Ce premier clin d'œil à l'année 1968 fut suivi d'autres rappels, comme la venue de Joan Baez au palais des Congrès ou celle de Joe Coker au Zénith. Johnny Clegg, le leader blanc de la musique zoulou et, grâce à lui, une vague de sons et de rythmes africains, le raï, firent également courir quelque danger à la chanson française. Mais 1988 a marqué le début d'une riposte, fondée sur l'appel lancé aux valeurs sûres à l'occasion d'anniversaires (Chevalier, Piaf, Brel et Gainsbourg, qui a choisi le Printemps de Bourges) ; le recours aux talents confirmés des sixties (Clerc, Hardy, Berger) amorcé en 1987, de circonstance en 1988 ; la reconnaissance d'une relève (Jonasz, Guidoni, Renaud) et la propagation du hard-rock français (Garçons bouchers, Porte-mentaux).