Jean-Marie Colombani

Législation

La réélection de M. François Mitterrand à la présidence de la République et le renouvellement de l'Assemblée nationale après la dissolution ont transformé le paysage politique français. Le travail parlementaire est organisé successivement par les gouvernements Chirac et Rocard et les priorités de chacun divergent quelque peu. Sollicité en début d'année de poursuivre la réorganisation des structures et du marché économique, le Parlement œuvre depuis lors à résoudre les problèmes sociaux les plus criants.

Le 5 janvier sont promulguées quatre grandes lois réformatrices : la première modifie les modalités de renouvellement des baux commerciaux ; une autre (no 88-13) vise l'« amélioration de la décentralisation ». La loi no 88-15 relative au développement et à la transmission des entreprises constitue, selon le rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, une « étape d'une œuvre législative qui devra être accomplie sur plusieurs années pour faciliter le fonctionnement des entreprises et permettre la transmission de celles-ci ». Accordant aux tiers le bénéfice de la donation-partage pour l'attribution des éléments de la seule entreprise individuelle, elle modifie sur de nombreux points le droit des sociétés. La loi no 88-17 sur les fusions et scissions des sociétés commerciales modifie celle du 24 juillet 1966 pour harmoniser le droit français avec les IIIe et VIe directives européennes.

La Caisse nationale du Crédit agricole est mutualisée par la loi du 18 janvier. La loi no 88-70 du 22 janvier modifie en profondeur l'organisation institutionnelle du marché boursier : les agents de change laissent la place à des sociétés de bourse ; les pouvoirs de la Commission des opérations de Bourse (COB) sont étendus. Une loi du 6 janvier organise les opérations de télépromotion, avec offre de vente, dites de « télé-achat ».

L'organisation de la vie politique occupe aussi le Parlement comme en témoignent les lois organiques du 13 janvier ; l'une modifie l'article LO 145 du Code électoral, deux autres étendent aux conseillers régionaux et aux membres élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger le droit de présentation des candidats à l'élection du président de la République. La loi organique no 88-226 du 11 mars, complétée par une loi no 88-227, tente d'organiser la transparence financière de la vie politique. Le Code pénal, accru par la loi du 5 janvier d'un chapitre nouveau, réprime désormais « certaines infractions en matière informatique ». Notons aussi les textes du 5 janvier, relatifs à la Sécurité sociale et au patrimoine monumental, et du 6 janvier, relatifs aux élections cantonales et aux enseignements artistiques. Après la remise du rapport de la commission du Code de la nationalité le 7 janvier, le gouvernement de Jacques Chirac a renoncé à la réforme envisagée.

La loi du 22 janvier portant statut du Territoire de la Nouvelle-Calédonie est abrogée après l'adoption de la loi référendaire le 6 novembre. Le souci de solidarité sociale du gouvernement Rocard trouve sa concrétisation dans la loi du 1er décembre, portant création du revenu minimum d'insertion (RMI). Son financement sera assuré par l'impôt de solidarité sur la fortune dont les dispositions ont été complètement intégrées dans le budget (art. 18).

Un décret du 16 septembre aménage les dispositions de la loi Méhaignerie dans un sens plus favorable aux locataires.

Comblant un vide juridique, la loi du 13 décembre crée un cadre pour les expérimentations biomédicales chez l'homme.

Trois lois du 30 décembre autorisent : la première, l'approbation du protocole no 8 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; la deuxième, celle d'une convention européenne relative au dédommagement des victimes d'infractions violentes ; la dernière, celle d'un traité sur l'assistance internationale en cas d'accident nucléaire.

Hervé Robert

Vie sociale

En 1988, le regain de tension sociale contraste avec le calme relatif des années précédentes. Après quelques conflits phares en hiver (car-ferries, houillères de Lorraine, Chausson), au printemps (mines de Gardanne, Snecma, Michelin), puis en été (imprimerie Jean Didier, chantiers navals de Saint-Nazaire), la rentrée sociale d'automne a été particulièrement agitée (gardiens de prison, audiovisuel public, infirmières, transports, PTT, secteur public et fonctionnaires).