Mais le progrès technique a ses revers. L'homme, au cours des dernières années, a pris conscience des menaces que certaines de ses activités laissent planer sur l'environnement. Employant massivement les produits chimiques, l'agriculture intensive provoque pollutions et déséquilibres écologiques (voir Agriculture, écologie et environnement, par Bernard Roux). Les rejets croissants dans l'atmosphère de chlorofluorocarbones contribuent à détruire la couche protectrice d'ozone. La prolifération des centrales nucléaires s'accompagne parfois d'incidents dont les conséquences peuvent être dramatiques et pose désormais l'épineux problème du stockage des déchets radioactifs, notamment de ceux à haute activité ou à très longue période. On prévoit de les enterrer à grande profondeur, placés dans des conteneurs spéciaux ou enrobés de structures vitrifiées très stables. Quatre sites semblant offrir des conditions géologiques appropriées ont ainsi été présélectionnés en 1987, respectivement dans l'Ain, l'Aisne, le Maine-et-Loire et les Deux-Sèvres, ce qui n'a pas manqué de susciter l'hostilité des populations concernées.

Ces quelques exemples d'inconvénients sérieux de la technique, après l'évocation de grandes avancées de la science, montrent toute l'importance des choix qui incombent aux décideurs. Comme la langue d'Ésope, la science et la technique peuvent engendrer le meilleur ou le pire, selon l'usage que l'on en fait. À l'homme d'exercer judicieusement sa responsabilité, de savoir tirer parti de ses découvertes pour mettre sa planète en valeur et assurer le développement heureux de la civilisation.

Philippe de La Cotardière

Médecine

Prix Nobel

Le prix Nobel a été attribué au chercheur japonais Susumu Tonegawa. Âgé de 48 ans, installé aux États-Unis depuis 1963, M. Tonegawa, après avoir travaillé 10 ans en Suisse à l'Institut d'immunologie de Bâle, a été nommé en 1981 professeur au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et poursuit ses recherches à Cambridge. Il est titulaire de nombreuses récompenses de haut niveau : prix Avery Landsteiner en 1981, prix de la Fondation internationale Gardiner en 1982, prix Lasker en 1987. Le prix Nobel lui a été décerné pour « sa découverte du fondement génétique de la formation d'une riche variété d'anticorps ».

La défense immunitaire de l'organisme repose d'une part sur un mécanisme d'immunité cellulaire assurée par les lymphocytes T (leur maturation se fait dans le thymus), dont il a été beaucoup question ces dernières années à propos du Sida, puisque c'est leur effondrement qui caractérise le syndrome immunodéficitaire acquis ou Sida ; d'autre part, cette défense s'appuie sur un mécanisme d'immunité humorale assurée par des substances protéiques solubles, les anticorps, sécrétées par une autre catégorie de lymphocytes, les lymphocytes B (leur maturation se fait dans la moelle osseuse).

Ce sont les anticorps qui permettent à l'organisme de lutter contre la multitude d'agressions dont il est l'objet. À chaque type d'agression (bactérienne, virale, parasitaire, toxique) correspond un anticorps unique et spécifique. Les lymphocytes B sont ainsi capables de sécréter des millions d'anticorps différents et spécifiques. Cependant, un noyau de lymphocyte ne contient que quelques centaines de gènes et il était admis jusqu'à présent que chaque gène code pour la fabrication d'une seule et unique protéine, strictement et immuablement définie.

La question se posait donc de savoir comment une quantité limitée de gènes pouvait produire un nombre illimité d'anticorps. C'est à cette question que les travaux de S. Tonegawa ont apporté une réponse.

M. Tonegawa a démontré qu'au cours du développement embryonnaire il se produit, pendant la maturation des précurseurs des lymphocytes B, un déplacement et un regroupement des fragments d'ADN (acide désoxyribonucléique) qui constituent leur patrimoine génétique. Les lymphocytes B arrivés à maturation peuvent ainsi coder pour un nombre infini d'anticorps spécifiques, non parce qu'ils contiennent une plus grande quantité de gènes, mais parce qu'ils ont une capacité infinie de combiner entre eux ces quelques gènes, de la même façon qu'avec sept notes un musicien possède une infinie capacité de création.