La période nouvelle qui s'ouvre sur un nouveau rapport de force devrait à cet égard s'inscrire dans une meilleure prise en compte de cette interdépendance. Il est indiscutable que la survie de l'OPEP dépendra de sa capacité à jouer un rôle positif pour la prise en considération de cette interdépendance par ses pays membres.

1985 : Un tournant pour le marché de l'énergie et un rôle accru pour l'OPEP

Les projections de la demande d'énergie sont convergentes sur un point : l'utilisation des hydrocarbures devrait s'accroître, même si la progression de la consommation est moins forte que celle du PNB et même s'il existe des possibilités de nouvelles réductions de l'intensité énergétique.

Dans ce contexte, nous serons de toutes façons confrontés à une progression significative des besoins énergétiques et le pétrole continuera au moins jusqu'à la fin du siècle d'occuper un rang primordial dans l'approvisionnement énergétique mondial, avec, sans doute, un rôle régulateur.

En dépit des écarts relativement faibles qui existent entre elles, les projections concernant la demande énergétique mondiale pour la période 1985-2000 présentent une convergence remarquable. Elles aboutissent toutes à des conclusions très proches les unes des autres et qui peuvent être résumées comme suit en tonnes équivalent pétrole (tep) :

Horizon 1990 :
Consommation mondiale d'énergie : 8,60 ± 0,3 milliard de tep
Consommation mondiale de pétrole : 3,25 ± 0,2 milliard de tep

Horizon 2000 :
Consommation mondiale d'énergie : 10,80 ± 0,6 milliard de tep
Consommation mondiale de pétrole : 3,60 ± 0,2 milliard de tep

Les écarts des estimations sont de 4 à 6 % seulement. Constatation d'autant plus intéressante que les prévisions relatives à la demande d'énergie sont sujettes à des incertitudes considérables compte tenu des hypothèses et des paramètres vecteurs dont l'appréciation est variable selon les estimateurs (la croissance économique, les prix et les élasticités, le développement de sources alternatives d'énergie).

Cette tendance établie au cours de la période 1982/84 vient d'être confirmée par les nouvelles projections publiées en juin 1985 par l'AIE, et qui, pour la première fois depuis 1978, indiquent un renversement de tendance à la hausse de la demande d'énergie dans les pays industrialisés. Selon ces nouvelles prévisions, le marché énergétique mondial connaîtra encore un excédent de l'offre jusqu'à la fin des années 80, mais une croissance économique soutenue ferait disparaître cet excédent dès le début des années 90 et pourrait provoquer de fortes tensions sur les prix. Pour la zone AIE particulièrement, les importations pétrolières nettes passeraient de 11,6 Mb/j actuellement à 18 Mb/j en l'an 2000, ce qui implique une dépendance accrue vis-à-vis des pays tiers, dont, notamment, certains pays de l'OPEP. Ces prévisions sont fondées sur un taux annuel moyen de croissance économique de 3,1 % au cours de la période 1983-90, de 2,8 % entre 1990 et 2000, sur un déclin de la production pétrolière dans les pays de l'OCDE (États-Unis, mer du Nord) et une stagnation, voire une baisse des exportations de pétrole soviétique, que remplace progressivement le gaz pour pourvoir aux besoins en devises de l'URSS.

Des estimations assez proches sont formulées par la CEE. Elles indiquent que les États-Unis pourraient être, à la fin du siècle, dans la même situation de dépendance énergétique que celle qui prévalait au cours des années 70. D'autres estimations indiquent que la production pétrolière hors OPEP continuera à croître jusqu'à la fin de cette décennie, puis commencera à décliner pour représenter vers l'an 2000 48 % des approvisionnements mondiaux, contre 59 % en 1984. Entre-temps, la production OPEP de pétrole brut et de gaz naturel liquéfié augmentera de 18,4 Mb/j en 1984 à près de 28 Mb/j en l'an 2000 ; la part de l'OPEP dans la production mondiale remonterait à 52 % en l'an 2000, avec un taux d'utilisation de la capacité installée d'environ 95 %.

Cette croissance attendue de la demande énergétique mondiale masque en réalité des disparités considérables entre les pays industrialisés eux-mêmes et, surtout, entre ces derniers et les autres.