Panorama

Introduction

L'enlisement dans la crise de l'économie mondiale, ses manifestations changeantes ont conduit, par tâtonnements successifs, à l'évolution des comportements et des politiques économiques. À partir de la fin des années 1970, on assiste, sous l'égide de la Grande-Bretagne et des États-Unis, à une remise en cause des conditions de régulation dans les économies industrielles. Des politiques d'assainissement se mettent alors en place (retour aux grands équilibres), basées sur un désengagement de l'État, un retour au libéralisme et la priorité donnée à la lutte contre l'inflation et à la défense de la monnaie. La France, dans le même temps, adopte une politique de relance à contre-courant, mais se voit contrainte – interdépendance oblige – d'adopter une politique de rigueur à partir du printemps 1983 ; les pouvoirs publics ne renient pas pour autant ce virage, puisqu'ils reconnaissent également la nécessité d'introduire plus de souplesse pour faciliter l'adaptation de l'appareil productif français.

Cette harmonisation des politiques économiques a permis une plus grande convergence des résultats en 1985. L'économie mondiale est entrée dans une période de décélération : désinflation, modération des salaires et croissance plus équilibrée, même si elle reste insuffisante. Ces aspects positifs n'empêchent pas la permanence, voire l'aggravation d'un certain nombre de problèmes : chômage plus que jamais élevé, crise industrielle persistante, déséquilibres croissants entre les balances des opérations courantes des principaux acteurs et les dérèglements sur les marchés de change ; mais aussi, la tendance déprimée du cours des matières premières et toujours la menace de surendettement international.

Derrière ces résultats globaux, on distingue des situations nationales contrastées, en particulier la force du Japon et de l'Allemagne fédérale, face à la conjoncture plus molle des États-Unis et du reste de l'Europe (même si on assiste pourtant au redressement encourageant de la France).

À l'origine de cet assainissement, on trouve le déferlement du libéralisme à tous les niveaux. Défini au sens large, le libéralisme économique repose sur deux grands principes :
– l'entreprise est réhabilitée : la restauration de la compétitivité d'une économie repose sur l'unité économique de production, principal lieu de création des richesses ; il faut donc revaloriser l'esprit d'entreprise, l'innovation et le risque ;
– le marché est reconnu comme la sanction de chaque entreprise. La concurrence doit redevenir le moteur de l'économie, et la recherche du profit est à nouveau légitime. Le redressement de la situation financière des entreprises passe par leur plus grande autonomie, grâce à la déréglementation et à l'extension de la flexibilité.

Ces principes sont appliqués dans la réalité, essentiellement selon deux formes :
– soit l'idéologie domine, et le libéralisme se veut pur et dur ; issue de la révolution conservatrice aux États-Unis et en Grande-Bretagne, cette politique se veut avant tout un retour aux sources et marque une rupture par rapport à l'État-providence keynésien. Elle comporte un risque, celui d'un décalage entre les discours et la pratique, car les modèles ont souvent été contredits dans les faits ;
– soit le pragmatisme est privilégié et le libéralisme est adapté à la réalité. Selon ce point de vue, on distingue, d'un côté, des pays comme l'Allemagne fédérale, ou, mieux, le Japon, qui, par leurs structures sociales plus souples, manifestent à long terme de réelles capacités d'adaptation, sans pour autant adhérer totalement au dogme ; de l'autre côté, l'exemple de la France, qui, partie d'une idéologie socialiste, ajuste discours et pratiques à la réalité économique. Cette volte-face ne vise pas cependant à remettre en cause le rôle de l'État, toujours chargé d'organiser le progrès socio-économique en développant la solidarité et en favorisant l'efficacité économique, fondée sur la rénovation de l'appareil de production.