Les adversaires de ce type d'avortements thérapeutiques expliquent que l'on ne soigne pas le fœtus en l'éliminant et qu'indirectement le diagnostic prénatal est meurtrier. C'est exact. Mais combien de femmes, aujourd'hui, surtout à la quarantaine, se décident à une grossesse naguère redoutée, grâce à la protection des explorations in utéro ? Et combien d'enfants en bonne santé sont-ils ainsi venus au monde ?

L'idéal est bien sûr d'éviter le pénible choix entre avortement et handicap. C'est dire l'importance de la vaccination contre la rubéole de toutes les fillettes non immunisées vers l'âge de douze ans ou des femmes non immunisées, sous couverture anticonceptionnelle. C'est rappeler aussi la nécessité de rechercher la sensibilisation à la toxoplasmose avant la grossesse et d'observer de grandes précautions (manger de la viande très cuite, passer des tests réguliers) pendant celle-ci.

C'est connaître enfin l'utilité de la consultation de conseil génétique, en cas de mariage avec un parent, de maladie héréditaire dans la famille d'un conjoint, de premier enfant anormal ou de fausses couches à répétition. Et ici se pose un premier problème : l'information génétique livre aux candidats parents un pourcentage de risque. Joue-t-on un enfant normal à la roulette ? La question est en partie résolue par les techniques de diagnostic anté-natal.

Celles-ci s'adressent en effet d'abord aux femmes qui courent un risque élevé de porter un enfant mal formé, soit qu'un conseil génétique l'ait indiqué, soit qu'il s'agisse de futures mères relativement âgées (à partir de 38 ans, en général). Mais certains procédés de diagnostic anté-natal ont été aujourd'hui systématisés lors de toutes les grossesses : c'est surtout le cas de l'échographie. Dans tous les cas, une information précise des couples sur les possibilités de diagnostic anté-natal est une nécessité. Sans oublier ni les indications des diverses explorations, ni les risques éventuels, ni les conséquences possibles, en particulier une décision d'avortement.

Les deux échographies systématiques pratiquées lors de la plupart des grossesses ont constitué une véritable révolution : le perfectionnement constant des appareillages permet, avec une innocuité parfaite, de dépister la plupart des malformations internes et externes. Un seul inconvénient : leur coût. Mais ne permettent-elles pas dans bien des cas de substantielles économies ?

L'amniocentèse n'est pas, elle, systématisée. Ce prélèvement de liquide amniotique (effectué à la 16e semaine) permet le diagnostic de diverses affections graves, et surtout de la mucoviscidose et de la trisomie 21 (mongolisme). Il est donc indiqué chez les femmes à partir de 38 ans. Mais l'amniocentèse peut provoquer l'avortement d'un enfant normal. Rarement, il est vrai : 1 % des cas, et moins encore avec les plus récents procédés de prélèvement.

Il faut aussi citer les prélèvements de trophoblaste (ponction, possible dès la 10e semaine, de cellules contenant tout le potentiel génétique de l'embryon), les prélèvements de sang fœtal (par ponction d'une veine du cordon, à la 20e semaine) et ceux de peau fœtale (entre la 20e et la 22e semaine). Toutes ces techniques sont en pleine évolution. Elles fournissent des renseignements très précis permettant de diagnostiquer de nombreuses et redoutables affections. Mais elles impliquent un risque d'avortement non négligeable, bien que ce risque décroisse régulièrement avec l'affinement des instruments et l'entraînement des praticiens.

Le choix éthique est donc double. D'abord : explorer ou non ? Puis, l'exploration faite, si elle révèle une anomalie sévère : avorter ou non ? Surtout si l'affection diagnostiquée, bien que grave, est compatible avec la vie ! D'autant plus que certaines malformations, jadis mortelles, sont aujourd'hui parfaitement curables chirurgicalement ou médicalement. Toutes ces questions se posent, de façon indissoluble, à la fois au médecin (ou à l'équipe médicale) et aux parents. Pour la plupart, les médecins ont reconnu l'impossibilité de prétendre communiquer aux parents une information froide, neutre, « strictement scientifique », et de les laisser « se débrouiller ». Mais il ne faut pas non plus que les parents se voient imposer un choix qu'ils rejetteraient par la suite.