Journal de l'année Édition 1985 1985Éd. 1985

Ayant, ainsi, pris ses responsabilités et payé, pour cela, le prix du sang, la France a pu préserver l'essentiel de sa crédibilité au Proche-Orient, où son gouvernement entend bien poursuivre une politique marquée par la continuité, même si, pour y parvenir, la « porte de la diplomatie française est bien étroite ». Sans doute, celle-ci n'a pas d'initiative spécifique à proposer, mais elle demeure prête à contribuer à un règlement au Proche-Orient dans le cadre des résolutions des Nations unies, plutôt que dans celui d'une conférence internationale réunissant Américains et Soviétiques. Les voyages officiels du président de la République en Jordanie et en Syrie surtout, de fréquentes rencontres avec le roi Hussein de Jordanie et le président Hosni Moubarak, la visite officielle du nouveau Premier ministre israélien, Shimon Peres, en France, même si elles n'ont pas abouti à des initiatives spectaculaires peuvent favoriser, à terme, une relance du processus de paix.

L'engagement africain

C'est également pour garder intacte sa crédibilité que la France s'était décidée, le 8 août 1983, à intervenir militairement au Tchad. Elle voulait y affirmer que les frontières des États africains — et d'abord ceux liés à elle par des accords de coopération — telles qu'elles sont héritées de la présence coloniale sont inviolables. Elle entendait aussi que l'invasion libyenne soit stoppée à la hauteur du 16e parallèle. En même temps, Paris ne négligeait aucun effort pour maintenir le contact avec Tripoli et chercher, avec le colonel Kadhafi, les voies d'un désengagement simultané et progressif des troupes françaises et des troupes libyennes.

Cet accord est finalement annoncé le 17 septembre. Salué comme « un succès marquant de la politique française en Afrique », l'accord franco-libyen est pourtant accueilli avec beaucoup de scepticisme par le président Hissène Habré. Des doutes sérieux sur la réalité et l'importance du retrait libyen poussent le chef de l'État français à rencontrer M. Kadhafi en Crète, en novembre. De toute façon, le Tchad, dont la partie méridionale est le théâtre de sanglants affrontements, n'est pas pour autant délivré de ses propres démons. Pour leur part — et ainsi qu'en témoigne le dernier sommet franco-africain tenu au Burundi —, les capitales africaines ne peuvent qu'observer avec vigilance l'évolution de la situation dans une zone de tensions quasi permanentes.

Le Maghreb — si proche géographiquement, historiquement et humainement de la France — a toujours sollicité l'attention des divers gouvernements français. De même, sur la rive méridionale de la Méditerranée, l'on n'a jamais manqué d'être très sourcilleux sur telle ou telle démarche diplomatique française en direction de l'un ou de l'autre des États arabes riverains. Dans ces conditions, il n'a pas semblé étonnant que l'Algérie prenne ombrage d'un séjour privé effectué par François Mitterrand au Maroc, fin août, au moment même où ce pays signait avec la Libye une « union ».

Pour apaiser la colère algérienne et redonner aux événements leur véritable dimension, le président de la République juge utile de se rendre à Alger, le 19 octobre. Mais les motifs de mauvaise humeur ne semblent pas tant tenir à la grande politique qu'à la persistance de vieux contentieux et au tassement des échanges commerciaux, après une progression spectaculaire en 1983. La controverse à propos de la présence, à Alger, le 1er novembre, pour le 30e anniversaire de la révolution algérienne, de Claude Cheysson traduit bien la difficulté de surmonter, tant en France qu'en Algérie, les ressentiments persistants laissés par la guerre d'indépendance.

Nord-Sud : l'impasse

Au début de son septennat, le président de la République avait pris l'engagement de doubler l'aide publique au développement des pays les moins avancés, entre 1981 et 1988, pour atteindre 0,7 % du PNB en 1988. L'action française en faveur du tiers monde se déroule sur trois fronts : une aide directe, aujourd'hui essentiellement concentrée sur le continent africain, une participation aux actions multinationales et une caution pour catalyser les aides en faveur des pays en voie de développement.