Or, le temps est venu des économies, y compris dans le budget de la Défense. Le chef de l'État l'a souligné, de sa propre initiative, dans son message aux armées du 14 juillet.

« Les forces armées ne sauraient échapper aux mutations de notre temps, leur a déclaré F. Mitterrand. Elles doivent donc soutenir les efforts continus de réflexion et d'adaptation que la situation économique commande dans le cadre fixé par le gouvernement de la République. » Quelques semaines plus tôt, Charles Hernu avait été encore plus direct : « L'effort de rigueur qu'exige la lutte menée par le gouvernement pour le redressement économique doit être partagé par les armées françaises. »

Austérité : c'est donc sous ce signe-là qu'a été préparé le projet de budget de la Défense pour 1985. Avec 150,2 milliards de F, les armées françaises ne disposeront pas des 151,5 milliards que leur allouait, en principe, la loi de programmation militaire votée par le Parlement en 1983 et qui couvre les dépenses de 1984 à 1988. Le manque à gagner est de 1,3 milliard de F, soit l'équivalent du coût d'un sous-marin. L'abattement a porté principalement sur les crédits d'équipement nucléaire et classique, c'est-à-dire qu'il se traduira par des étalements dans l'exécution de certaines commandes de matériels, pour la raison qu'il était devenu difficile de comprimer davantage les crédits de fonctionnement des unités. C'est une baisse de pouvoir d'achat, même si Charles Hernu peut se targuer du fait que son budget de 1985 sera en augmentation de 5,7 % par rapport aux crédits approuvés pour 1984.

De nombreux députés de l'opposition, Raymond Barre, Yves Lancien ou Jean-Marie Daillet, ont aussitôt protesté contre ce projet de budget, arguant que, dès la deuxième année d'application de sa loi de programmation militaire, le gouvernement choisit de n'en pas réaliser toutes les promesses qualifiées, à l'époque, d'intangibles et, même, de contraignantes.

Du côté de certains socialistes, la critique a été identique. Le rapporteur de la commission des Finances de l'Assemblée, Yves Le Drian, député PS du Morbihan, a lui aussi regretté ce manquement à la parole du ministre envers l'armée.

Jacques Isnard