La situation dans la province demeure, comme à l'habitude, tendue. À Belfast, en mars, Gerry Adams, président du Sinn Fein, échappe de peu à un attentat. En août, dans la même ville, l'intervention de la police fait 1 mort et 20 blessés parmi des manifestants catholiques. Globalement, néanmoins, la violence décline : on dénombre 39 tués et 359 blessés au cours des six premiers mois de l'année, contre 77 tués et 510 blessés à la même époque en 1983.

La coopération policière entre les deux Irlandes progresse, comme le prouve l'extradition par Dublin, en avril, de Dominic MacGlinchey, leader présumé de l'Armée nationale de libération irlandaise (INLA). Mais les efforts de l'Eire pour trouver un début de solution politique au problème de l'Ulster ne rencontrent pas beaucoup d'échos à Londres. Margaret Thatcher semble même se désintéresser complètement des conclusions du Forum pour une nouvelle Irlande, présentées en mai à Dublin, qui soulignent que « l'identité unioniste » et la « britannicité » des protestants d'Ulster pourraient être garanties dans toute nouvelle constitution tendant à réunifier les deux parties de l'île.

B. B.

Maggie toujours populaire

Toutes ces affaires — malgré les polémiques qu'elles soulèvent au sein même de la majorité — n'affectent pas vraiment, en tout cas, la cote du Premier ministre dans les sondages. D'une enquête à l'autre, Mme Thatcher est toujours considérée comme le leader politique « le plus capable » du pays. Il n'empêche que son parti, le parti conservateur, enregistre un certain nombre d'échecs à l'occasion d'élections partielles. Quant au résultat des européennes, il n'est pas non plus très bon pour les tories, qui, par rapport à 1979, perdent 15 sièges au profit des travaillistes. En pourcentage de voix, ils restent néanmoins au-dessus de la barre des 40 %.

Ces élections sont marquées surtout par un fort taux d'abstentions (67,9 %), qui traduit une nouvelle fois le peu d'enthousiasme des Britanniques à l'égard de la construction européenne. Le succès du sommet de Fontainebleau, en juin, est salué avec satisfaction à Londres : un accord est enfin trouvé sur la contribution du Royaume-Uni au budget de la CEE. Mais, dès le mois suivant, la décision des députés de Strasbourg de suspendre le versement de la ristourne de 991 millions d'ÉCU due à la Grande-Bretagne provoque une nouvelle levée de boucliers.

Dans le domaine diplomatique, Mme Thatcher rompt la glace avec l'Est, en se rendant en février en Hongrie. C'est la première fois, en effet, depuis qu'elle est Premier ministre qu'elle met le pied au-delà de ce que Churchill avait baptisé le « rideau de fer ». « Nous devons faire un effort pour mieux comprendre la partie adverse », dit-elle. Dans le même temps, le secrétaire d'État au Foreign Office et son homologue soviétique décident de prévoir « de nouvelles rencontres entre les deux pays ».

Curieusement, l'affaire de la Grenade aura servi de révélateur à cette diplomatie new look. Mme Thatcher n'avait pas hésité à critiquer l'intervention US, prouvant ainsi qu'elle savait se démarquer de R. Reagan. Mais ce dernier, en décidant d'intervenir contre l'avis de son principal allié, avait illustré dans les faits le principe de l'autonomie d'action des pays du camp occidental. D'où une diplomatie britannique plus active qu'auparavant.

On en veut pour preuve l'accord conclu, en septembre, avec la Chine sur l'avenir de Hongkong, au terme de deux ans de difficiles négociations. Le bail britannique prendra fin le 1er juillet 1997 ; l'ensemble de la colonie passera alors sous souveraineté chinoise, mais son système économique et social restera inchangé durant 50 ans. Ce compromis est bien accueilli à Londres.

Diplomatie et terrorisme

À la frontière entre la diplomatie, le terrorisme et le fait divers, deux affaires secouent l'opinion britannique : d'abord, le 17 avril, une jeune policewoman de 25 ans, Yvonne Fletcher, est tuée au cours d'une fusillade devant le Bureau du peuple, autrement dit l'ambassade de Libye à Londres. Les coups de feu sont partis de l'intérieur de l'ambassade, alors que des étudiants anti-Kadhafi manifestaient pacifiquement sous les fenêtres du bâtiment.