Ce cri d'alarme laisse perplexes bon nombre de parlementaires chez qui persiste manifestement la peur d'un nouveau Viêt-nam. Le chef de la majorité démocrate à la Chambre, Thomas O'Neill, exprimant les réticences de la plupart de ses collègues, estime que « personne ne veut voir les marxistes l'emporter » mais que « le président va trop loin ».

Finalement, R. Reagan obtient du Congrès, le 26 avril, la moitié des crédits supplémentaires qu'il avait demandés pour le Salvador, soit 30 millions de dollars. Et il accepte d'envoyer dans ce pays un démocrate conservateur, Richard Stone, qui est chargé d'évaluer les chances d'une élection démocratique avant la fin de l'année, avec la participation de toutes les parties en cause, y compris les insurgés d'extrême gauche dont il rencontrera d'ailleurs un représentant en juillet.

Le retour de Kissinger

Les événements se précipitent en juillet. Le 18, l'ancien secrétaire d'État, Henry Kissinger, est nommé à la tête de la Commission nationale bipartite pour l'Amérique centrale. R. Reagan se dit favorable à l'élaboration de solutions négociées à long terme, en accord avec les chefs d'État des quatre pays du groupe dit « de Contadora » (Mexique, Venezuela, Colombie, Panama). Peu après, cependant, la situation se tend dangereusement. Washington dépêche huit navires de guerre au large du Nicaragua et envoie 4 000 GI participer à des manœuvres conjointes avec l'armée du Honduras. Simultanément, le ton monte entre les États-Unis et Cuba. Le président mexicain Miguel de la Madrid, recevant le 14 août à La Paz le chef de l'exécutif américain, n'hésite pas à dénoncer « les démonstrations de force » dans la région qui, selon lui, « risquent de déclencher une conflagration ».

La Chambre des représentants lui ayant infligé un net revers en se prononçant pour l'arrêt de toute assistance aux groupes armés antisandinistes installés au Honduras, R. Reagan réaffirme, le 26 août, la « responsabilité sacrée » de son pays de ne pas laisser la région « devenir une chaîne de dictatures marxistes antiaméricaines ». Néanmoins, à partir de septembre, c'est l'activité des diplomates qui va prévaloir. Tandis que R. Stone poursuit ses contacts avec divers groupes de guérilla et s'efforce de faciliter la tâche du groupe de Contadora, la commission bipartite présidée par H. Kissinger entreprend, le 9 octobre, un voyage d'étude dans six pays de la région. Mais le débarquement de troupes américaines sur l'île de la Grenade, le 25 octobre, fait passer ces tentatives de normalisation au second plan et donne naissance à une nouvelle crise internationale.

Alliés : la persistance des malentendus

R. Reagan s'efforce de restaurer la confiance des alliés dans les États-Unis et de ramener « l'unité d'objectifs et le respect mutuel » au sein de l'alliance. Mais les divergences persistent, notamment sur la politique commerciale à l'égard de l'URSS, la limitation des armements nucléaires et la politique économique de Washington. Pour expliquer la stratégie américaine des relations avec l'Est, tenter d'harmoniser les positions sur le désarmement et de faire reculer le mouvement pacifiste, le vice-président G. Bush se rend en Europe fin janvier.

Le sommet de Williamsburg, auquel participent, du 28 au 30 mai, les dirigeants des sept pays les plus industrialisés, s'achève par l'adoption d'un texte de compromis qui donne, semble-t-il, satisfaction à chacune des parties : convergences de vues sur la défense, rapprochement de façade sur les monnaies. La nécessité d'« atteindre et de maintenir un taux d'inflation faible » et d'« abaisser les taux d'intérêt qui enregistrent actuellement un niveau trop élevé » est clairement affirmée, et R. Reagan parvient à faire accepter par ses partenaires une déclaration commune sur les euromissiles qui correspond aux priorités de sa politique intérieure. Enfin, pour répondre aux vœux de la France, les documents finaux prévoient la tenue, « le moment venu », d'une conférence monétaire internationale.

Néanmoins, les désaccords ne tardent pas à resurgir dans divers domaines. Le 18 juillet, par exemple, les Dix expriment leur « profond mécontentement » à l'égard des mesures prises par les États-Unis pour freiner leurs importations d'aciers spéciaux.