Certains magistrats préconisent, pour lutter contre la mafia et les organisations similaires (camorra à Naples et N Drangheta en Calabre), d'instaurer, comme pour le terrorisme, une loi spéciale favorable aux repentis. Cette proposition provoque un certain scepticisme. L'Omertà, la loi du silence, existe et sait se faire respecter.

La toute-puissance de l'argent et des protections à haut niveau donne ses preuves, une fois de plus, avec la fuite spectaculaire de la prison suisse de Champs Dollon, le 11 août 1983, de Licio Gelli, grand maître de la mystérieuse loge maçonnique P2. L. Gelli, qui attendait d'être extradé de Suisse à la demande des autorités italiennes, a acheté son gardien et, aidé de plusieurs complices, a disparu sans laisser de traces. Le scandale de la P2 et la découverte d'un véritable État occulte ayant ses ramifications dans tous les secteurs avait secoué l'Italie en 1981. Une commission parlementaire enquête toujours sur cette inquiétante société secrète, qui semble se trouver non seulement à l'origine des scandales politico-financiers de ces dernières années, mais aussi du terrorisme de tous bords.

L. Gelli et la loge P2 ont été également évoqués au cours du procès de deux jeunes Italiens, Paolo Farsetti et Gabriella Trevisin, condamnés en Bulgarie pour espionnage. Ce procès, peu convaincant, se déroulait à Sofia fin 1982, alors qu'à Rome se précisait la responsabilité de la Bulgarie et de ses services secrets dans l'organisation de l'attentat contre le pape Jean Paul II en mai 1981.

Portrait
Elda Pucci
Une femme, maire de Palerme

Ce n'est ni à Milan ni à Turin, mais dans la grande ville la plus au sud de l'Italie et, donc, la plus machiste de tradition, Palerme, qu'une femme a été élue maire, en avril 1983. Elda Pucci, 51 ans, pédiatre, responsable du service des prématurés à l'hôpital de Palerme, célibataire et démocrate-chrétienne de la tendance Fanfani, n'a pas été désignée au hasard par son parti. Palerme vit dans la terreur d'une mafia de plus en plus sanglante depuis le développement du nouveau business : le trafic international de la drogue. Une mafia, semble-t-il, intouchable.

Fille d'un avocat de Trapani, Elda Pucci a fait ses études de médecine à l'université de Palerme. Ses sympathies vont, d'abord, au parti socialiste, pour se tourner, après les événements de Budapest, vers la Démocratie chrétienne. Après une première tentative malheureuse en 1975, élue conseillère en 1980, elle partage depuis ses journées entre l'hôpital, la mairie et l'appartement où elle vit en compagnie de sa mère. La tâche qui attend Elda Pucci est rude et dangereuse. Sur un million d'habitants, Palerme compte quelque 100 000 chômeurs, dont beaucoup travaillent au noir. La ville est chaotique, sale, délabrée, et les assassinats de la mafia sont devenus quotidiens : 1 151 morts en 1982. « La maladie est sérieuse mais la guérison est possible », a diagnostiqué le Dr Pucci.

Vanja Luksic

Pologne

La partie de bras de fer continue

Plus d'un an après le coup d'État du 13 décembre 1981, la Pologne du général Jaruzelski est toujours en piètre état. Malade, elle l'était si profondément que personne ne pouvait espérer un rapide rétablissement. Au moins pouvait-on imaginer qu'apparaîtraient les premiers signes d'une légère reprise. Or, le mal polonais ne cesse de s'aggraver en 1983, politiquement et économiquement.

Le retour au socialisme réel que suppose, à l'Est, toute normalisation est ici vide de sens. Le grand principe de la dictature du prolétariat est battu en brèche par le refus des Polonais d'accorder le moindre crédit à leur gouvernement. La fiction même de l'adhésion populaire qu'entretiennent habituellement les gouvernements de l'Est semble ici s'être définitivement évanouie. Plus que dans la brutalité du régime, il faut en trouver la raison dans le désastre économique. La Pologne est plus que jamais un pays à haut risque. Il suffit, pour en être assuré, de se rappeler que, depuis un quart de siècle, toutes les émeutes, tous les soulèvements ont eu pour détonateur les difficultés économiques. Au début 1983, la Pologne doit 25 milliards de dollars aux pays occidentaux et 3,5 milliards de roubles aux États socialistes. Fin 1983, la dette extérieure a crû de plus de 3 milliards de dollars et de 1 milliard 200 millions de roubles.