En effet, se conformant aux injonctions de la CEE, le gouvernement accepte de réduire la production sidérurgique de 1,4 million de t de laminés à chaud supplémentaires, en plus des limitations prévues par le plan Gandois. Le plan social accompagnant la restructuration de Cockerill-Sambre prévoit un dégagement de 7 800 emplois (sur 23 000), par recours à la prépension notamment. En outre, une « modération salariale » d'un total de 7 % jusqu'en 1986 est proposée aux travailleurs de Cockerill-Sambre, qui devront se prononcer par référendum sur la restructuration envisagée.

Une amnistie « immorale »

Du fait de la réaffectation du produit des droits de succession, le compromis de Cockerill-Sambre grève lourdement le budget de l'État. Or, déjà, le déficit budgétaire de la Belgique, exprimé en pourcentage du PNB, est un des plus grands d'Europe. Contenir dans ces conditions le déficit budgétaire sans augmenter la pression fiscale, largement au-dessus de la moyenne de l'OCDE, est un véritable tour d'équilibre, surtout quand il faut concilier à l'intérieur du cabinet thèses libérales et positions social-chrétiennes, avec leurs nuances flamande et wallonne.

Début août, le tour est joué : le déficit budgétaire s'élèverait à 503 milliards, soit 11,5 % du PNB au lieu des 10 % initialement prévus. Cette modification est conforme aux vœux du ministre du Budget, Philippe Maystadt, social-chrétien wallon, qui, suivant les recommandations de l'OCDE, voudrait s'assurer contre les risques d'une déflation due à un assainissement trop rigoureux. Martens V n'atteindra donc pas l'objectif fixé en début de législature : la réduction du déficit budgétaire à 7 % en quatre ans.

Parmi les mesures accompagnant le budget, la plus spectaculaire, la plus choquante aussi en raison de son caractère immoral, est l'« amnistie fiscale » favorisant le rapatriement des nombreux capitaux réfugiés à l'étranger. Le gouvernement, qui augmente lui-même considérablement la tranche des investissements publics (+ 10 %), réaffirme sa volonté de favoriser l'investissement dans la construction et le redéploiement industriel.

Par contre, le programme d'austérité concomitant, aussi douloureux soit-il, n'étonne plus personne : limitation des indemnités d'invalidité, interdiction de certains cumuls en matière de pensions et d'allocations, augmentation des cotisations d'assurances sociales, augmentation du précompte immobilier, non-indexation des pensions supérieures à 33 000 FB, etc. Pour dorer la pilule, quelques réductions d'impôts et de prélèvements mensuels sur les allocations familiales pour les salariés et les ménages. Mais on est en droit de se demander si ces quelques concessions pèseront lourd dans la balance.

Élisabeth Helberg

Municipalités
Les dettes des communes

L'endettement des communes bat tous les records et menace, en cas de cessation des paiements, d'entraîner dans la faillite de nombreuses firmes locales qui ont fait crédit aux pouvoirs publics. 527 communes sur un total de 589 connaissent des difficultés financières, accusant un total de 400 milliards de dettes. La ville d'Anvers touche le fond des caisses. L'endettement global de Liège, qui déclare la cessation des paiements en avril, atteint 45 milliards. 17 000 salariés sont concernés. Manifestations et grèves protestant contre « le désordre et l'incompétence » du conseil municipal se poursuivent pendant des semaines. Celui-ci cherche la garantie du gouvernement et des exécutifs régionaux pour obtenir de nouveaux crédits : des coupes sévères dans le budget municipal et des restrictions salariales s'imposent.

Espagne

L'an I du gouvernement socialiste

Le 20 septembre, Felipe Gonzalez prononce, à l'occasion de la rentrée des Cortes, son premier discours sur l'« état de la nation », bilan de 10 mois de gouvernement socialiste.

Le jeune chef du gouvernement peut faire montre d'un optimiste prudent en ce qui concerne la situation sociale et économique de l'Espagne. En effet, si l'extrême gauche lui reproche la pusillanimité de sa gestion, il a su freiner le déficit des finances publiques aussi bien que la progression du chômage. Et, à la fin de l'année, il aura ramené à 12 % le taux d'inflation, contre 14 % l'année précédente. En cela, le PSOE demeure fidèle à la stratégie économique qu'il avait annoncée lors de sa campagne électorale. Le secrétaire d'État aux Finances, Jose Sevilla, expliquait dès le mois de février : « une politique sévère sur le plan monétaire ou en matière de dépenses publiques, transcendant les options idéologiques, est indispensable pour remettre sur pied l'économie ». Le premier budget, présenté le 23 avril par le ministre de l'Économie, Miguel Boyer, est le reflet de ces options anti-démagogiques : prudence et austérité, réduction du déficit de l'État grâce à des coupes sombres pratiquées dans tous les secteurs ministériels.

Satisfecit du FMI

La nationalisation du groupe Rumasa, l'un des géants de l'économie, fait craindre un instant que le gouvernement Gonzalez ne succombe au penchant des régimes socialistes pour l'étatisation. Miguel Boyer à beau jeu d'expliquer : « Nous n'avons pas agi avec une voracité d'expropriation ou par infantilisme gauchiste, comme certains aimeraient le faire croire, mais pour protéger un édifice qui pouvait s'écrouler à tout moment. » Démonstration convaincante qui sera parfaitement comprise et retenue par la population.