Henri Ménudier

Les ambiguïtés des Verts

Le SPD a nettement reculé, passant de 42,9 % en 1980 à 38,2 % en 1983. Ce résultat le rejette quelque vingt ans en arrière, entre 1961 (36,2 %) et 1965 (39,3 %). Président du SPD depuis 1964, Willy Brandt aura ainsi fait atteindre à son parti des résultats extrêmes car il y eut aussi la victoire exceptionnelle de 1972, lors des premières élections anticipées (45,8 %). Pour raison de santé, mais aussi pour désapprouver les divisions internes, Helmut Schmidt a refusé de conduire une nouvelle fois son parti aux élections. Il a été remplacé par Hans Jochen Vogel, 57 ans, ancien maire de Munich, ancien ministre de la Construction, puis de la Justice dans les cabinets Schmidt, maire régnant de Berlin-Ouest au cours du premier semestre 1981.

La grande nouveauté du scrutin du 6 mars est l'élection — pour la première fois dans l'histoire du Bundestag — de 27 députés écologistes, avec 5,6 % des voix. Déjà présents dans de nombreux conseils municipaux et, depuis 1979, dans plusieurs parlements régionaux, les Verts deviennent une force politique qui trouble le tête-à-tête des trois grands partis, seuls représentés au Bundestag depuis 1961. Héritiers du mouvement de contestation des années 60 et de l'engagement pour la protection de l'environnement, considérablement renforcés par la lutte contre l'utilisation de l'atome civil et militaire, les Verts, très divisés, n'ont pu résoudre de façon convaincante leur problème de fond : s'intégrer aux institutions pour les changer de l'intérieur ou, au contraire, les combattre radicalement.

Le 29 mars, le 10e Bundestag porte à sa présidence Rainer Barzel, CDU, ministre des Relations interallemandes depuis le 1er octobre 1982 ; ancien président de la CDU, il avait été l'adversaire malheureux de Willy Brandt de 1969 à 1973. Le second gouvernement Kohl diffère peu du premier. Heinrich Windelen, CDU, remplace Rainer Barzel aux Relations interallemandes. Après le départ de Josef Ertl (FDP), ministre de l'Agriculture depuis 1969, ce poste est confié à un autre Bavarois, Ignaz Kiechle, CSU. La déclaration gouvernementale du chancelier Kohl, le 4 mai 1983, met fin à une période de transition de sept mois. Le principal changement dans l'opposition est le remplacement de Herbert Wehner par Hans Jochen Vogel à la présidence du groupe parlementaire SPD.

La montée de la démocratie chrétienne se traduit aussi par la reconduction des majorités absolues de la CDU aux élections régionales de Rhénanie-Palatinat, le 6 mars, et de Schleswig-Holstein, le 13 mars. En revanche, aux élections régionales de Brême et de Hesse, le 25 septembre, la gauche l'emporte largement, contre toute attente. Le SPD, grand vainqueur, arrache la majorité absolue (51,8 % des voix, 58 sièges sur 100) à Brême et redevient le premier parti en Hesse (45,8 % des voix, 51 sièges sur 110). Les Verts maintiennent leur présence (5 sièges à Brême, 7 en Hesse). C'est un avertissement sans frais au gouvernement fédéral, la CDU réalisant en Hesse son plus mauvais score depuis 1966 : 39,4 % des suffrages et 44 sièges seulement.

Trois faux pas

Une tromperie coûteuse

La lamentable supercherie des faux carnets de Hitler — lancée à grand renfort de publicité, l'année du 50e anniversaire de la prise du pouvoir par le Führer — défraie la chronique, à la fin du premier semestre 1983. Avec la complicité du collectionneur de souvenirs nazis Konrad Fischer, alias Dr Kujau, le journaliste Gerd Heidemann commence début mai, dans l'hebdomadaire de Hambourg Stern, la publication des souvenirs inédits de Hitler. L'expertise révèle, en réalité, qu'il s'agit d'une « falsification grossière » pour laquelle l'hebdomadaire a dépensé quelque 9 millions de marks. Un nouveau rédacteur en chef est nommé, les deux complices mis en prison.

Prévu par le gouvernement Schmidt, le projet de recensement de la population, le quatrième depuis 1950, vaut une désagréable surprise au gouvernement Kohl. Au terme d'une vive campagne due aux craintes suscitées par une éventuelle utilisation abusive des nombreuses demandes de renseignements contenues dans les formulaires, le Tribunal fédéral constitutionnel décide, le 13 avril, d'ajourner les opérations de recensement prévues le 27 du même mois afin de se donner le temps d'examiner la loi sur le recensement du 25 mars 1982. Une autre querelle du même ordre éclate au second semestre, avec le projet de création d'une carte d'identité infalsifiable dotée de données codées.