A. Savary a révélé avant l'été qu'il formulerait début octobre de nouvelles propositions. Le Comité national d'action laïque (CNAL), qui ne s'était satisfait que mollement des premières propositions du gouvernement, paraît si peu rassuré qu'il annonce l'organisation de rassemblements régionaux pour le cours de l'automne 1983. Entre-temps, le 14 août exactement, le pape Jean-Paul II rencontre François Mitterrand à l'occasion de sa venue à Lourdes. Une fois de plus, officiellement, il n'est pas question de l'avenir de l'enseignement catholique au cours de l'entretien. Quelques heures après avoir quitté le chef de l'État français, Jean-Paul II fait acclamer une petite phrase, évoquant « les parents qui se voient refuser la possibilité d'assurer à leurs enfants une éducation inspirée par la foi ».

Ce qui n'empêche pas les chrétiens, et singulièrement les catholiques, de se montrer divisés sur la question scolaire. Déjà, après les propositions Savary du 20 décembre 1983, des voix s'étaient levées du côté des chrétiens, présents dans l'enseignement public, d'aumôneries, de militants... pour regretter le refus de négocier affiché par les dirigeants de l'enseignement catholique. En septembre 1983, un « appel aux chrétiens pour la paix scolaire » rappelle à quelques jours des nouvelles propositions du ministre que, décidément, l'école privée n'a pas fini de peser sur la société française pour en bousculer les clivages et déranger les classements simplistes.

Charles Vial

Religions

Catholiques

Jean-Paul II, seul maître à bord

Reprise en main de l'Église catholique : cinq ans après son élection, il apparaît de plus en plus clairement que Jean-Paul II veut donner ce sens à son pontificat. C'est l'un des objectifs qu'il fixe à plusieurs de ses voyages, notamment en Amérique centrale. Il prépare aussi, durant ses vacances d'été à Castel Gandolfo, une réforme de la Curie attendue de longue date, et qui va dans le même sens. Il répète enfin à plusieurs reprises l'enseignement traditionnel de l'Église : sur la sexualité ou le péché par exemple. Mais l'activité du pape ne s'arrête pas là : il consacre une grande partie de son temps à la Pologne, à la politique internationale, à la défense des droits de l'homme. Certaines de ses prises de position sont contestées par des fractions plus avancées du monde catholique, et l'importance qu'il accorde aux affaires polonaises provoque des critiques au Vatican, où des prélats lui reprochent de ne pas avoir une vision assez internationale. Mais contestations et critiques sont discrètes : il n'est pas facile de s'opposer à ce pape dont la popularité est immense.

Cette année est pour l'Église une Année sainte. Le pape a décidé de commémorer ainsi le 1 950e anniversaire de la mort du Christ, sans se prononcer clairement cependant sur « la question de la date précise de la crucifixion du Seigneur » (bulle d'indiction du jubilé, publiée le 22 janvier). Ce jubilé, commencé le 25 mars 1983, jour de l'Annonciation, doit s'achever le 22 avril, dimanche de Pâques 1984. Pendant ce temps, les catholiques sont invités à réfléchir au sens de la Rédemption. Le pape veut leur rappeler « que la grandeur de leur condition doit être rapportée non à leurs mérites, mais à une grâce spéciale du Christ ; s'ils n'y correspondent pas par la pensée, la parole et l'action, ce n'est pas le salut qu'elle leur vaudra, mais un plus sévère jugement ». Il lie ce thème de la Rédemption à celui du synode des évêques qui se réunit à Rome à partir du 30 septembre : « La réconciliation et la pénitence dans la mission de l'Église. »

Ordres religieux
182 congrégations

Un document publié par le Vatican, en juillet, fait apparaître que l'Église compte 182 congrégations religieuses masculines.

Dix-sept d'entre elles ont plus de 3 000 membres. Ce sont : les Jésuites, 26 778 membres ; les Franciscains, 20 666 membres ; les Salésiens, 16 893 membres ; les Capucins, 12 000 membres ; les Frères des écoles chrétiennes, 10 011 membres ; les Bénédictins, 9 472 membres ; les Dominicains, 7 062 membres ; les Frères maristes, 6 805 membres ; les Rédemptoristes, 6 592 membres ; les Verbites, 5 311 membres ; les Franciscains conventuels, 4 038 membres ; les oblats de Marie Immaculée, 4 020 membres ; les Lazaristes, 4 014 membres ; les Trappistes, 3 584 membres ; les Augustins-Ermites, 3 397 membres ; les Carmes déchaux, 3 297 membres ; les Passionistes, 3 023 membres.

Jésuites
Un nouveau général

Peter-Hans Kolvenbach a 54 ans. C'est un ascète souriant — sa chambre n'a pas de lit, il couche par terre —, mais son humour fait la joie de ses compagnons. Il est né aux Pays-Bas et a surtout vécu en Orient ; il parle neuf langues. Il a été élu, le 13 septembre, supérieur général des Jésuites. L'élection de ce nouveau pape noir devrait mettre un terme au malaise qui régnait depuis des années entre le Vatican et la Compagnie de Jésus, accusée par tous les papes depuis Paul VI de laisser ses membres s'engager trop avant dans le combat politique et social, notamment en Amérique latine. Le pape avait même — l'ancien général, le père Arruppe, ayant été atteint d'une thrombose cérébrale — nommé deux jésuites pour diriger la Compagnie et repoussé dans le temps l'élection de son successeur. Un acte d'autorité qui n'avait pas été apprécié de tous les jésuites. Mais le temps a fait son œuvre ; de part et d'autre, on s'est expliqué. Le père Giuseppe Pittau, l'un des deux délégués de Jean-Paul II à la tête de la Compagnie, lui a remis, à l'issue d'une tournée d'inspection, un rapport très favorable soulignant le dynamisme des jésuites, notamment dans le tiers monde. Restait à revenir au fonctionnement normal des institutions. Ce que permet l'élection du père Kolvenbach, qui n'était pas le candidat du pape, mais auquel le Vatican ne peut rien reprocher.

Nouveaux cardinaux

L'un des premiers actes importants de l'année est le consistoire du 2 février, au cours duquel le pape crée dix-huit nouveaux cardinaux, dont neuf européens (parmi lesquels l'archevêque de Varsovie, Mgr Josef Glemp, l'archevêque de Malines-Bruxelles, Godfried Daneels, l'archevêque de Paris, Mgr Jean-Marie Lustiger, le théologien jésuite Henri de Lubac, et Mgr Julijans Vaivods, administrateur apostolique de Riga, qui se trouve ainsi être le premier cardinal résidant en URSS). Le groupe des nouveaux cardinaux comprend aussi deux Africains, un Américain du Nord, deux Américains latins, un Libanais (le patriarche des maronites, ce qui est évidemment un geste significatif), un Asiatique, et un Néo-Zélandais.