Il est certain que cette priorité aux choix individuels ne peut se faire au détriment d'une politique globale de sécurité sociale collective. La question en 1983 est de déterminer un dosage entre les garanties légales pour tous et des arbitrages effectués au coup par coup par chacun des agents.

Création et initiative individuelle

Ces idées vont leur chemin, quand, dans le même temps, l'ensemble des représentants politiques ou syndicaux s'entendent au moins pour reconnaître l'importance de l'initiative individuelle et de la création d'entreprises qui en est l'expression la plus achevée.

Là encore, l'arrivée de la gauche au pouvoir aura contribué à lever une des grandes préventions d'une partie de l'opinion à l'égard de l'entreprise. La cellule de travail est de moins en moins considérée comme un moyen honteux de faire du profit et d'exploiter la force de travail, et de plus en plus comme l'outil indispensable de promotion individuelle et collective.

Cette évolution des mentalités est, en soi, une avancée importante. Encore faudrait-il que bien des verrous sautent pour permettre à des individualités de se lancer dans cette aventure. Quand donc un véritable capital-risque existera-t-il en France, à l'instar du capital-aventure américain, constitué de circuits financiers abondants, alimentant directement ceux qui ont de l'idée et de la suite dans les idées ?

Économie sociale

Cette conversion à l'esprit d'entreprise et à l'initiative individuelle a été d'une certaine façon préparée depuis quelques années par le regain de ce que l'on appelle maintenant « l'économie sociale », en d'autres termes un tissu de petites structures à la limite de l'action sociale et de la démarche économique (associations, coopératives, entreprises répondant à des besoins locaux de création d'emplois, d'exploitation de ressources et également de savoir-faire régionaux...).

Le point commun de toutes ces expériences — très différentes dans leurs formes, leurs activités et leurs créneaux — est une volonté de trouver, d'une part, des nouveaux rapports au travail, par une remise en cause des hiérarchies traditionnelles, une participation de voix, une créativité plus grande, et, d'autre part, une nouvelle définition de l'entreprise qui serait ainsi beaucoup mieux intégrée dans son environnement social, parce que reliée à des réseaux de sympathisants, de fournisseurs et de consommateurs.

Ces expériences intéressent les pouvoirs publics. Des programmes d'aides, de subventions ont été mis sur pied.

L'économie sociale apparaît d'autant plus digne d'attention qu'elle peut correspondre à une façon originale de concilier travail et mode de vie. En effet, il n'est pas exclu d'imaginer à terme des formules de partage dans le temps et dans l'espace de l'activité professionnelle. Une même personne pourrait ainsi occuper à mi-temps une fonction peu passionnante, assurée dans une grande entreprise, si, en contrepartie, elle participait pendant un autre mi-temps à une petite structure sociale de type coopératif ou bien à une entreprise de solaire ou de vidéo...

Par ailleurs, ces petites structures de l'économie sociale sont bien adaptées pour servir de relais de formation et d'emploi en direction des jeunes qui trouvent là une plate-forme d'intégration et un véritable projet éducatif et économique.

La culture des images

Les Français seraient-ils de plus en plus individualistes (ou plutôt attachés à un hédonisme personnel), de plus en plus consommateurs de spectacles et de vacances, adoptant chaque jour davantage des modes et des comportements venant de l'étranger ?

Qu'en est-il des notions de loisir et de mondialisation de la culture, surtout dans la jeunesse ? Une jeunesse qui vit des temps plus difficiles que lors des années d'expansion, mais qui vit aussi dans un univers de communication généralisée, où chaque récepteur est branché sur un univers d'émetteurs. En d'autres termes, que signifie le concept de loisir dans une période de crise économique et de prégnance croissante des images de la vie quotidienne ?